Tabac en Afrique francophone - Centre Régional de ressources
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Tabac en Afrique francophone - Centre Régional de ressources
Hors série – Supplement – Edición especial 4 2005 QUARTERLY TRIMESTRIEL TRIMESTRAL INTERNATIONAL JOURNAL OF HEALTH PROMOTION AND EDUCATION REVUE INTERNATIONALE DE PROMOTION DE LA SANTÉ ET D’ÉDUCATION POUR LA SANTÉ REVISTA INTERNACIONAL DE PROMOCIÓN DE LA SALUD Y EDUCACIÓN PARA LA SALUD La crise croissante du tabagisme en Afrique francophone ISSN 1025 - 3823 • Tabac en Afrique francophone • Étude de cas : l’Afrique du sud • Pratiques manipulatrices • Quel espoir pour l’Afrique ? Promotion & Education: english page 52 español página 63 Published by the International Union for Health Promotion and Education. Promotion & Education, the International Journal of Health Promotion & Education, is an official publication of the International Union for Health Promotion & Education (IUHPE). It is a multilingual journal, which publishes authoritative peer-reviewed articles and practical information for a world-wide audience of professionals interested in health promotion and health education. The content of the journal reflects three strategic priorities of the IUHPE, namely, advancing knowledge, advocacy and networking. Promotion & Education, la Revue internationale de Promotion de la Santé et d’Éducation pour la Santé, est une publication officielle de l’Union internationale de Promotion de la Santé et d’Éducation pour la Santé (UIPES). Il s’agit d’une revue multilingue, contenant des articles de référence sur tous les aspects théoriques et pratiques de la promotion de la santé et de l’éducation pour la santé. Elle s’adresse à un public de professionnels de toutes les régions du monde. Le contenu de la revue reflète trois des priorités stratégiques de l’UIPES, à savoir, développement des connaissances et compétences, plaidoyer pour la santé, et communication et travail en réseau. Promotion & Education, la Revista Internacional de Promoción de la Salud y Educación para la Salud es la publicación oficial de la Unión internacional de Promoción de la Salud y Educación para la Salud (UIPES). Es una revista que incorpora artículos revisados por una junta editora e incluye información práctica dirigida a una audiencia de profesionales interesados en los campos de la promoción de la salud y educación para la salud a nivel mundial. El contenido de la revista refleja las tres prioridades estratégicas de la UIPES, a saber, desarrollo de conocimientos y capacidades, argumentación en favor de la salud y fortalecimiento de los intercambios y del trabajo de redes. The views expressed in articles which appear in this journal are those of the authors, and do not necessarily reflect those of the IUHPE. Any material published in Promotion & Education may be reproduced or translated provided credit is given and copy sent to the address of the Journal. 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Tel: 33 (0)1 48 13 71 20 Fax: 33 (0)1 48 09 17 67 E-mail: [email protected] www.iuhpe.org Founding Editor – Fondatrice – Fundadora: Annette Kaplun • Director – Directeur: Pierre Arwidson • Editorial Advisory Board –Conseil de Rédaction – Consejo Editorial: Hiram Arroyo (Puerto Rico), Dora Cardaci (Mexico), Juan-Manuel Castro (Mexico), Alain Deccache (Belgium), Atsuhisa Eguchi (Japan), Shane Hearn (Australia), Saroj Jha (India), Lloyd Kolbe (USA), Balachandra Kurup (India), Diane Levin (Israel), Gordon MacDonald (United Kingdom), David McQueen (USA), Maurice Mittelmark (Norway), David Nyamwaya (Kenya), Michel O’Neill (Canada), K.A. Pisharoti (India), Mihi Ratima (New Zealand), Irving Rootman (Canada), Becky Smith (USA), Jim Sorenson (USA), Alyson Taub (USA), Thomas Karunan Thamby (India), Keith Tones (United Kingdom), Marilyn Wise (Australia), Pat Youri (Kenya) • Executive Editorial Board – Comité de Rédaction – Comité Editorial : Editor in Chief - Rédactrice en Chef - Jefa de redacción : Jackie Green • Managing Editor - Coordinatrice éditoriale Coordinadora editorial : Catherine Jones • Assistant - Assistante - Asistente: Martha Perry • Ex-officio: Marie-Claude Lamarre • Translators – Traducteurs – Traductores: Catherine Jones, Marita Oses, Martha Perry, Sylviane Ratte, Marie-Cécile Wouters • Graphic Design – Conception Graphique – Diseño gráfico: Frédéric Vion (01 40 12 27 41) • Printer – Imprimeur – Impresor: Imprimerie Landais – 93160 Noisy-le-Grand (01 48 15 55 01) Commission paritaire n° AS 64681 du 1409-8 37 Bénin : signature de la CCLAT, premier espoir pour la lutte anti-tabac au Bénin ? D.Tongbaza 4 Préface La lutte contre le tabac en Afrique A. Hirsch 38 Madagascar : le tabac à chiquer, goudron du pauvre H. Razafiarisoa 5 Éditorial La crise croissante du tabagisme en Afrique francophone M-C. Lamarre et S. Ratte 39 Présentation de Syfia International 40 La Convention-cadre pour la lutte anti-tabac : espoir pour l’Afrique ? L. Huber, F. Thompson et S. Ratte 42 La Déclaration de Montréal 43 Vers une nouvelle stratégie de lutte contre le tabagisme en Afrique D. Houéto et C. Kassa 45 Problématique du tabac en Afrique francophone et perspectives régionales de l’OTAF M. H. Cherif 47 Tunisie : projet pilote de reconversion d’exploitations agricoles cultivant du tabac en cultures diversifiées R. Ben Zid Tabac en Afrique francophone 7 Les conséquences sanitaires de l’épidémie tabagique dans les pays francophones de l’Afrique de l’Ouest et les mesures de contrôle du tabac C.Audera et V. L. da Costa e Silva 12 L’impact économique de la consommation de tabac en Afrique J. de Beyer 17 État de la recherche sur le tabac en Afrique francophone S. Ratte et K. Slama 22 Pays pauvres, le nouvel Eldorado du tabagisme I. Saouna 25 28 30 31 Étude de cas Le contrôle du tabagisme en Afrique du Sud C.Van Walbeek Pratiques manipulatrices La conquête des lieux non-fumeur se heurte aux tactiques de l’industrie du tabac : désinformation scientifique et groupes de front. L’expérience canadienne N. Collishaw Stratégies de l’industrie du tabac : marketing des cigarettes auprès des jeunes F. Damphousse La contrebande de cigarettes : un phénomène d’une ampleur considérable dont la seule raison d’être est de servir les intérêts des grands fabricants de tabac L. Gauvin 32 La fraude du siècle : les cigarettes « légères » F. Thompson 34 Le sponsoring du tabac n’est pas une fatalité E.Aimah 35 Guinée : la petite allumeuse de cigarettes M. Bineta 36 RD-Congo : mobiliser contre le tabac pour mieux le vendre P. Ouesso Quel espoir pour l’Afrique ? English section 52 Preface The fight against tobacco in Africa A. Hirsch 53 Editorial The growing crisis of tobacco consumption in francophone Africa M-C. Lamarre and S. Ratte 54 Abstracts 62 The Montreal Declaration Cuaderno español 63 Prefacio La lucha contra el tabaco en África A. Hirsch 64 Editorial El aumento del tabaquismo en el África francófona M.-C. Lamarre y S. Ratte 66 Resúmenes 74 La Declaración de Montreal Contents Sommaire Índice Dossier français Hors série – Supplement – Edición especial 4 2005 préface Albert Hirsch La lutte contre le tabac en Afrique L’usage quotidien et sur une longue période des produits du tabac constitue la première cause de mortalité prématurée. Un fumeur régulier sur deux meurt d’une maladie liée au tabac et un sur quatre meurt entre 35 et 69 ans. L’usage du tabac est responsable de 30 % de la mortalité par cancers, de 25 % de la mortalité par maladies cardiovasculaires, de 75 % de la mortalité par maladies respiratoires chroniques et aggrave l’évolution des maladies chroniques, et particulièrement celle de la tuberculose. L’Organisation Mondiale de la Santé, OMS, estimait en 2005 que l’usage du tabac a tué 5 millions de personnes dans le monde, dont la moitié dans les pays en voie de développement, les prévisions pour 2025-2030 étant de 10 millions de décès dont 7 millions dans les pays en voie de développement. L’OMS estime que le tabac a tué au XXe siècle 100 millions de personnes et pourrait en tuer 1 milliard au XXIe siècle. Le Centre International de Recherche sur le Cancer, CIRC, estime que le tabagisme passif accroît le risque de cancer du poumon et de maladies cardiovasculaires de 30 %. Cette épidémie industrielle se développe en fonction de la prévalence chez l’homme qui atteint son pic puis décroît en 50 ans, la prévalence chez la femme suit la même évolution avec un décalage de l’entrée dans la consommation d’une cinquantaine d’années. Elle est responsable d’une mortalité masculine puis féminine décalées toutes deux d’une vingtaine d’années. Ainsi, les morts du tabac sont-elles liées à son usage dans les 20 à 50 années précédant leur observation, et le plein de l’épidémie estil obtenu en prés d’un siècle. Par ailleurs le nombre de morts reste en plateau ou diminue dans les pays industrialisés du fait de la diminution de la prévalence observée dans ces pays depuis quelques décennies. En revanche, le nombre de 4 décès augmente dans les pays pauvres, véritable réserve de marché pour l’industrie du tabac. Les conséquences sanitaires et sociales, entrave au développement, altération de l’environnement (le séchage du tabac est une des premières causes de la déforestation), majoration de la pauvreté, menacent gravement les pays en développement et particulièrement l’Afrique. Pour atteindre l’objectif d’une exposition nulle à la fumée de tabac, la réduction de l’offre et de la demande des produits du tabac constituent deux approches complémentaires. La réglementation de la demande comprend : – l’interdiction totale de la promotion et de la publicité, – l’augmentation substantielle annuelle et en une fois du prix de vente, par l’intermédiaire des taxes sur tous les produits du tabac, – l’impression sur les unités de conditionnement d’avertissements sanitaires pertinents, clairement lisibles et rotatifs, – l’interdiction totale de fumer dans les espaces clos accueillant du public et notamment les lieux de travail, – un étiquetage clair et lisible des composants de la fumée de tabac, des ingrédients et des additifs, enfin – une information précise par des campagnes grand public et une communication au plus prés de la population sur les effets de l’usage, la composition des produits du tabac et les agissements d’une industrie régulièrement condamnée pour son activité mensongère et manipulatrice visà-vis des populations vulnérables et notamment celles des pays en voie de développement. Rares sont les pays qui possèdent d’un dispositif complet, et tout particulièrement en Afrique où le manque de législation, la pauvreté, la multiplication des menaces pesant sur la santé des personnes et des populations constituent un terrain d’élection où s’engouffrent tous les intérêts particuliers. L’industrie du tabac sait en profiter. L’arrêt de l’usage du tabac est bénéfique, quelles que soiten l’ancienneté de l’usage et la quantité de tabac fumé. Ce gain s’observe très rapidement pour les infections des voies aériennes chez les jeunes enfants soumis au tabagisme de leur entourage, au bout de quelques mois pour les maladies cardiovasculaires et de quelques années pour les cancers. Sur le plan individuel, les techniques d’aide à l’arrêt comprennent des méthodes médicamenteuses (substituts nicotiniques et inhibiteur de la recapture des catécholamines) onéreuses et en pratique souvent hors de portée des pays en voie de développement. En revanche un conseil d’arrêt donné par un professionnel de santé (sage-femme, infirmière) est efficace et, s’il est appliqué largement, est susceptible d’obtenir des résultats au niveau des populations. En réalité, la « dénormalisation » de l’usage du tabac, conséquence de la réduction de la demande, en installant une société dévalorisant l’usage du tabac et en en limitant l’usage, accroît puissamment l’intention d’arrêter et constitue la méthode la plus efficace pour obtenir une réduction de l’initiation et de l’usage du tabac. Le 31 Mai, journée sans tabac de l’OMS, ne saurait résumer l’effort à faire, mais représente une occasion de Albert Hirsch Vice-président Ligue Nationale Contre le Cancer Paris, France Email : [email protected] IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 éditorial Marie-Claude Lamarre et Sylviane Ratte La crise croissante du tabagisme en Afrique francophone mobilisation et de sensibilisation des opinions qu’il convient de ne pas négliger. L’association et le maintien sur une très longue période de l’ensemble des dispositions portant sur l’offre et sur la demande des produits, l’évaluation des résultats et la correction des points faibles du dispositif sont nécessaires pour obtenir une amélioration significative de la santé publique. Le commerce du tabac ne connaît pas de frontière et l’industrie organise la contrebande. Le tiers de la production mondiale des cigarettes circule illégalement et échappe aux taxes. Les états africains représentent une énorme réserve de marché pour l’industrie. Tel est le cadre général de la lutte contre le tabac. Compte tenu de la menace, les pays Africains ont su s’organiser pour obtenir la Convention cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) adoptée par l’Assemblée mondiale de la santé le 21 mai 2003. Ce traité est entré en vigueur le 27 Février 2005 pour les pays l’ayant ratifié. La négociation des protocoles additionnels du traité, portant notamment sur la lutte contre le commerce illicite du tabac, doit permettre d’enrayer le développement du tabagisme dans les pays en voie de développement. Ce numéro spécial consacré à la crise du tabac en Afrique francophone réunit expertise, témoignages et concours des associations engagées sur le terrain. Il représente une étape essentielle de l’accord de coopération quinquennal entre les Centres américains de Contrôle et de Prévention des Maladies et l’Union Internationale de Promotion de la Santé et d’Education pour la Santé. Vaincre une catastrophe annoncée pour l’Afrique, tel est le défi que nous devons relever. Ce numéro spécial de Promotion & Education a reçu le soutien financier des Centres américains de Contrôle et de Prévention des Maladies (CDC), une agence du Département de la Santé des Etats-Unis d’Amérique et de la Ligue nationale contre le cancer (France). En 2002, l’Union Internationale de Promotion de la Santé et d’Education pour la Santé (UIPES) a signé un accord de coopération avec les Centres américains de Contrôle et de Prévention des Maladies (US Centers for Disease Control and Prevention, CDC), une Agence du Département de la Santé et des Services sociaux, après avoir défini, à la fois au niveau mondial et régional, un certain nombre de domaines dans lesquels les deux organisations ont des intérêts en commun, en particulier celui de la recherche en promotion de la santé et celui du développement et de la diffusion des connaissances. Depuis la mise en œuvre de cet accord en août 2002, l’UIPES a facilité et le plus souvent coordonné différentes initiatives de promotion de la santé et d’éducation pour la santé allant du développement de politiques de santé publique à la diffusion de connaissances fondées sur les preuves et la pratique et le développement des capacités dans différents domaines, dont le contrôle du tabac. Les CDC ont donc confié à l’UIPES dans le cadre de cet Accord de Coopération, la coordination d’un projet couvrant différentes activités intéressant le monde entier, l’Afrique et l’Afrique francophone plus particulièrement. Il s’agit d’un projet en multipartenariat avec de nombreux organismes internationaux, nationaux et locaux, notamment, l’Organisation Mondiale de la Santé, l’Union Internationale Contre le IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Cancer, « The Campaign For Tobacco Free-Kids », l’INGCAT (Coalition internationale des ONG de Lutte contre le Tabac), l’Union internationale contre la Tuberculose et les Maladies respiratoires, l’Association canadienne de Santé Publique, l’Observatoire du Tabac en Afrique Francophone, la Ligue nationale française contre le Cancer, la Coalition québécoise contre le Tabac, SOS Tabagisme-Mali, SOS Tabagisme-Niger, et de nombreux experts de toutes les régions du monde. L’ensemble des actions menées dans le cadre de ce projet vise à répondre à la situation de l’Afrique francophone. La consommation du tabac est peut-être actuellement inférieure en Afrique, comparée à celle d’autres régions du monde mais la recherche montre que la consommation du tabac augmente rapidement dans cette région. L’industrie du tabac a monté de solides campagnes de marketing et de promotion en Afrique. Si la consommation du tabac n’est pas réglementée et contrôlée, elle se traduira à l’avenir par une épidémie extrêmement grave de maladies chroniques et d’incapacités. Les pays d’Afrique ont donc maintenant devant eux la possibilité et le défi de freiner, voire prévenir, cette épidémie et de protéger la santé future de leurs populations. Des contre campagnes et des réglementations Marie-Claude Lamarre Directeur Exécutif UIPES Email: [email protected] Sylviane Ratte Responsable Programme Tabac Service Prévention-information-dépistage Institut national du cancer Email: [email protected] 5 de santé publique sont efficaces et peuvent diminuer l’impact des efforts de l’industrie du tabac. Pour cela il faut avant tout sensibiliser et informer le public sur les stratégies et tactiques, utilisées en Afrique, pour rendre de nouvelles générations dépendantes du tabac. Cela complétera les efforts concertés de décideurs politiques pour protéger la santé publique à la fois par la législation nationale mais aussi sur le plan international au travers de la Convention cadre pour la lutte anti-tabac. L’importance et la nécessité d’accroître la communication médiatique et la collaboration des médias en Afrique sont évidentes. Les décideurs politiques auront besoin eux aussi d’un soutien solide au moment d’adopter et de mettre en vigueur les stratégies de lutte et de contrôle du tabac autour de la Convention cadre. Une sensibilisation plus importante du public aux dangers du tabac sera elle aussi essentielle pour permettre l’acceptation de nouvelles mesures et de mesures renforcées. C’est à cette stratégie que participe ce numéro spécial sur la crise croissante du Tabac en Afrique francophone. Il constitue une ressource importante pour les acteurs de la lutte contre le tabac y compris les experts en santé 6 publique. Il a pour objectif de sensibiliser l’opinion publique et les leaders d’opinion et de proposer un ouvrage de référence pour les activistes sur le terrain, les professionnels des médias, les décideurs et le grand public. Organisé sous forme d’une série d’articles, ce numéro spécial offre un aperçu des connaissances actuelles sur la situation du tabac en Afrique francophone et des réponses émergeantes qui visent à enrayer cette épidémie grandissante. Au sommaire, les données de la prévalence du tabagisme, l’évaluation de l’impact sanitaire et économique du tabac dans la région, les nouveaux marchés et prévisions d’expansion de l’industrie du tabac et leurs stratégies pour contrer les mesures de santé publique. Des sujets particulièrement pertinents pour la région tels que la contrebande, la pauvreté et la publicité sont couverts dans de courts articles commandés auprès de journalistes francophones africains par Syfia international, une agence de presse francophone, partenaire du projet, qui apporte efficacement son point de vue du rôle et du métier de journaliste. du contrôle du tabac vient illustrer comment l’Afrique francophone s’organise au niveau local et international pour mieux répondre et faire face à cette épidémie en expansion. Enfin, une analyse des initiatives actuelles et des progrès dans les domaines de la promotion de la santé et Mackay, J. et Eriksen, M. (2002) The Tobacco Atlas. Organisation mondiale de la Santé, Genève. Les multiples témoignages rapportés dans ce numéro traduisent bien la stratégie de l’industrie qui cible l’Afrique comme son plus fort potentiel de développement avec une croissance de la consommation escomptée de 16 % sur dix ans, selon l’Atlas du Tabac dans le Monde de l’OMS1. Pourtant, comme l’écrit Corné van Walbeek dans la conclusion de son article, la lutte contre le tabac peut-être gagnée et l’ingrédient numéro un pour ce faire est une forte volonté politique assortie d’un partenariat à tous les niveaux, international, national et local, et de mesures qui ont fait la preuve de leur efficacité. Le développement, la signature et la ratification de la Convention cadre représentent en ce moment un premier aboutissement et un formidable espoir pour tous ceux qui se battent depuis des décennies. Référence IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone Carmen Audera et Vera Luiza da Costa e Silva Les conséquences sanitaires de l’épidémie tabagique dans les pays francophones de l’Afrique de l’Ouest et les mesures de contrôle du tabac La consommation de tabac reste la cause principale de mortalité évitable dans le monde. Elle touche la santé des individus dans tous les pays du monde, à tous les stades de la vie. Le tabac nuit à la santé du fœtus, du nouveau né, de l’enfant, de l’adolescent, des adultes et des personnes âgées. A mesure que la recherche sur les effets du tabac sur la santé avance, le nombre de personnes affectées augmente et la liste des pathologies associées au tabac ne cesse de s’allonger incluant maintenant, la cataracte, les pneumonies, la leucémie myéloïde aiguë, l’anévrysme de l’aorte, le cancer du col de l’utérus, du rein, de l’estomac, du pancréas et les péridontopathies. Ces pathologies viennent s’ajouter à la liste des affections plus connues liées au tabagisme : cancers de la vessie, de l’œsophage, de la cavité buccale, du pharynx, pathologies chroniques des systèmes respiratoires et cardiovasculaires, ainsi que l’impact sur le système de reproduction et la mort subite du nourrisson. (Surgeon General Report 2004) Les dangers du tabac sur la santé sont bien connus et acceptés dans les pays industrialisés, ceci n’est pas encore le cas dans les pays en développement où ces arguments ont peu d’impact notamment dans les pays d’Afrique francophone. Carmen Audera, MD MPH Medical Officer Tobacco Free Initiave Organisation mondiale de la Santé Avenue Appia, 20 CH-1211 Genève 27 Tél : +41 227912938 Email : [email protected] Vera Luiza da Costa e Silva, MD, PhD Director Tobacco Free Initiave Organisation Mondiale de la Santé Genève Dans ces pays, le poids de la morbidité est encore largement attribuable aux maladies communicables et aux problèmes de santé de la mère et de l’enfant. L’épidémie tabagique est relativement récente et ses conséquences dévastatrices font à peine leur apparition. Aujourd’hui, agir contre le tabac n’est pas une priorité de santé. Si la tendance continue, cependant, on observera très rapidement, comme dans le reste du monde, une augmentation du poids du tabac dans la morbidité de ces pays, (figure1) pour les raisons suivantes : a) la consommation de tabac augmente b) la population aura plusieurs années de tabagisme derrière elle c) le statut général de la santé de la population s’améliore et l’espérance de vie augmente. Certaines estimations montrent que même si la prévalence reste constante ou si elle diminue, le nombre de fumeurs augmentera dans la région. L’augmentation du nombre de fumeurs sera d’autant plus importante que les revenus augmenteront. (Tableau 1). L’impact sanitaire de la consommation de tabac dans les pays d’Afrique francophone 1. Les cancers Le cancer du poumon Globalement, l’épidémiologie du cancer du poumon, dans tous les pays et régions du monde, suit la consommation de tabac. Dans les pays où la population fume depuis des décennies, environ 90 % des cancers du poumon sont directement liés au tabagisme. La baisse de l’incidence du cancer du poumon, dans ces pays, est liée à la baisse de la prévalence du tabagisme. L’estimation de la mortalité totale par cancer chez les hommes en Afrique de l’Ouest (1.2/100 000) est bien plus basse que celle pour l’Europe de l’Ouest (93/100 000) (GLOBOCAN 2002, CIRC). IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Dans les pays d’Afrique, l’incidence du cancer du poumon lié au tabac est sans aucun doute en augmentation de façon significative. Des données de mortalité ne sont disponibles que pour l’Afrique du Sud et plusieurs pays d’Afrique du nord : Algérie, Maroc, Tunisie où l’épidémie du tabac sévit depuis plus longtemps. Sur la base de l’augmentation actuelle de la consommation de tabac dans les pays de l’Afrique de l’Ouest et si rien n’est fait pour endiguer l’épidémie, les pays francophones d’Afrique de l’Ouest seront confrontés à une augmentation de la mortalité par cancer du poumon dans les décades à venir. Actuellement l’incidence et la mortalité par cancer du poumon sont plus basses chez la femme dans toutes les régions du monde. En plus du tabagisme actif, d’autres facteurs de risque sont identifiés dans le cancer du poumon, notamment : l’exposition à la fumée des autres, les vapeurs d’huile utilisée pour cuisiner, la fumée de charbon, le radon, la pollution de l’air et les expositions professionnelles à l’amiante et d’autres carcinogènes. L’évidence scientifique montre que ces carcinogènes environnementaux combinés à la fumée de tabac augmentent le risque du cancer du poumon. Ces autres facteurs de risque sont fréquents et présents dans la plupart des pays francophones de l’Afrique de l’Ouest. Le cancer de l’œsophage Le cancer de l’oesophage, une tumeur hautement mortelle a aussi été associé au tabagisme bien que son incidence soit plus faible que celle du cancer du poumon et variable selon les pays de Mots clés •impact sanitaire •tabac •Afrique 7 Figure 1 dans les pays en développement où le risque d’infection avec le papillomavirus est accentué par les capacités limitées de dépistage et de traitement. Si nous ajoutons à cela une augmentation du tabagisme chez les femmes d’Afrique de l’Ouest, l’incidence du cancer du col de l’utérus et la mortalité associée augmenteront dans ces pays. Stades de développement de l’épidémie du tabac 2. Broncho pneumopathie chronique obstructive (BPCO) l’Afrique sub-saharienne. Dans de nombreux pays, son incidence reste faible comme en Côte d’Ivoire et au Mali où l’épidémie du tabac est à ses premiers stades de développement. En revanche, dans les pays africains pour lesquels l’épidémie tabagique a commencé plus tôt, l’incidence a considérablement augmenté, en particulier pour les populations citadines comme à Durban en Afrique du Sud, à Kyadondo en Ouganda ou encore à Harare au Zimbabwe ; une augmentation supérieure même à celle rapportée pour les populations blanches. (Walker AR et al, 2002). Tout comme pour les cancers du poumon, une augmentation de l’incidence des cancers de l’œsophage est à prévoir si la consommation de tabac augmente. Le cancer du col de l’utérus Des études épidémiologiques montrent que les fumeuses ont jusqu’à quatre fois plus de risque de développer un cancer du col de l’utérus que les non fumeuses Tableau 1 et que le risque augmente avec la durée du tabagisme. Des études scientifiques biochimiques ont démontré le lien entre tabagisme et cancer de l’utérus (Simons, A.M. et al. 1993 ; Yang, X et al 1996). Au niveau mondial, le cancer du col de l’utérus est la première cause de décès par cancer chez les femmes, avec plus d’un million de nouveaux cas décelés chaque année (Jones SB, 1999). Fumer, multiplie par 2 ou 3 le risque de cancer du col de l’utérus (Catellsague X et al 2001). En 2002, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a conclu après l’analyse d’un nombre important d’études sur le sujet que le tabagisme était cause de cancer invasif (malin) de l’utérus. (IARC 2002). L’incidence du cancer du col de l’utérus en Afrique de l’Ouest est déjà au moins le double de la moyenne mondiale (29,3 versus 16,2) (taux standardisés sur l’âge selon Globocan CIRC 2002). Il est encore le cancer le plus mortel chez les femmes Nombre de fumeurs (en milliers) dans la région Afrique 2010 2020 2025 Prévalence constante +2 % revenu annuel 88133 118219 137025 Prévalence et revenu constants 85523 111344 127138 -1 % prévalence +2 % revenu annuel 79730 96750 106662 L’augmentation de la prévalence du tabagisme viendra s’ajouter aux facteurs de risque environnementaux déjà existants en Afrique pour la BPCO, à savoir la pollution sur le lieu de travail et la pollution domestique causée par la combustion de biomasse qui contribue en particulier à la BPCO chez les femmes. Les tendances prévues en terme de prévalence de la BPCO s’expliquent également par les changements en terme d’espérance de vie à la naissance et la distribution de l’âge de la population qui varie considérablement d’un pays à l’autre. En 1994, 44 % de la population africaine avait moins de 5 ans et seulement 3 % plus de 65 ans. (Figure 2) (WHO 2001). 3. Les pathologies infectieuses Source : G. Emmanuel Guindon and David Boisclair. Past, Current and Future Trends in Tobacco Use. HNP Discussion Paper). Economics of Tobacco Control Paper N0 6, WHO 2003 8 Bien que la BPCO soit associée à la pauvreté, elle est moins fréquente dans les pays en développement, en raison de la jeunesse de la population et jusqu’à aujourd’hui, de la consommation de tabac moins élevée que celle enregistrée dans les pays industrialisés. Par exemple la prévalence de la BPCO chez des patients hospitalisés dans des services spécialisés oscille entre 2,7 % en Guinée à 14 % au Maroc. La mortalité et la morbidité liées à la BPCO cependant, devraient augmenter dans tous les pays et cette augmentation se fera ressentir tout particulièrement dans les pays africains dans les 20 ans à venir avec l’augmentation progressive de la prévalence du tabagisme.(Chan-Yeung M, et al 2004). La tuberculose Il existe de plus en plus de preuves sur le lien entre le tabagisme et un risque accru d’infection, de décès et de maladie par la tuberculose. Des études menées en Inde, par exemple, montrent que 50 % des décès liés à la tuberculose chez les IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone Tableau 2 Législation réglementant les interdictions de fumer dans les lieux publics Bénin Burkina Côte d’Ivoire Guinée Mali Niger Sénégal Établissements d’éducation Pas connue Interdiction Restrictions Interdiction Interdiction Pas connue Pas de réglementation Etablissements de santé Interdiction Interdiction Restrictions Interdiction Interdiction Pas connue Pas de réglementation Lieux de travail Restrictions Pas de régl. Restrictions Restrictions Restrictions Pas connue Pas de réglementation Restaurants Pas connue Pas de régl. Restrictions Interdiction Pas de régl. Pas connue Pas de réglementation Transports Pas connue Pas de régl. Interdiction Interdiction Interdiction Pas connue Pas de réglementation Source : Tobacco Control Country Profiles 2003 hommes sont causés par le tabagisme et que 75 % des fumeurs infectés par la tuberculose ne l’auraient pas été s’ils ne fumaient pas (Vendhan Gajalakshmi et al 2003). Une étude en Afrique du Sud calcule que si les fumeurs avaient le même taux de mortalité que les non fumeurs, 20 % des décès par la tuberculose seraient évités (Sitas F. et al 2004). Les mécanismes physiologiques précis qui expliquent ce lien ne sont pas bien connus, mais il semblerait que la fumée de tabac en endommageant la muqueuse pulmonaire la rende plus sujette aux infections. D’autre part, la perte de poids et la malnutrition chez les fumeurs seraient également des mécanismes importants dans cette explication, en particulier dans les populations les plus démunis, touchant plus spécifiquement les femmes en Afrique de l’Ouest. L’incidence de la tuberculose dans les pays d’Afrique de l’Ouest est élevée. Elle a récemment été aggravée par l’épidémie du VIH-SIDA. Une augmentation de la prévalence du tabagisme dans ces pays Figure 2 pourrait sérieusement augmenter le nombre de cas d’infection et les décès par la tuberculose comme cela a été le cas dans d’autres pays. 4. La santé de la mère, du nouveau né et de l’enfant Les données récentes de l’enquête menée au niveau mondial sur les jeunes et le tabac (GYTS) montrent que la consommation de tabac chez les filles augmente de façon considérable partout dans le monde, avec des prévalences comparables, voire supérieures à celles des garçons. (Global Youth Tobacco Survey Collaborating Group 2004). Les pays en voie de développement qui tentent d’améliorer les conditions à la naissance et de faire fléchir le taux de mortalité infantile et maternelle doivent pour y parvenir faire face à la difficulté supplémentaire que pose le tabagisme féminin. Le poids du bébé à la naissance Les enfants dont la mère fume pèsent en moyenne 200 grammes de moins à la Changements dans les projections de la mortalité par BPCO en Afrique sub-saharienne Survenant à cause des changements démographiques Cas (milliers) Survenant à cause des changements démographiques et épidémiologiques IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 naissance que les enfants de mères nonfumeuses. De plus, plus la femme enceinte fume de cigarettes, plus il est probable que le poids du bébé à la naissance s’en trouve réduit. Des études récentes suggèrent que la cigarette pourrait réduire l’irrigation sanguine du placenta, réduissant ainsi la quantité des nutriments qui alimentent le fœtus. (Larsen, L.G. et al. 2002). Un faible poids de naissance est la cause principale de mortalité infantile ; les bébés dont le poids est faible ont un risque accru de mourir en particulier dans les pays à faible revenu. L’allaitement Fumer peut contribuer à une production de lait maternel inadéquate. Une étude a trouvé que les concentrations de graisse et le volume de lait des mères fumeuses étaient inférieurs à ceux des femmes non fumeuses. (Hopkinson, J.M. et al 1992). Chez les mères fumeuses qui allaitent, la production de lait est de 250 ml inférieur à celle des non-fumeuses. (Vio F et al 1992). Assurer l’allaitement pendant les six premiers mois de la vie est crucial au bon développement et à la santé de l’enfant dans les pays d’Afrique de l’Ouest en particulier pour les plus pauvres. Les mères ne peuvent pas prendre le risque de nuire à l’allaitement des bébés qui dans certains cas sont déjà de faible poids en raison du tabagisme de la mère pendant la grossesse. Le contrôle du tabac dans les pays d’Afrique de l’Ouest Le contrôle du tabac est une priorité de santé aux retombées internationales. L’adoption et la mise en place de mesures de contrôle du tabac, cependant, varient selon les pays. Les pays industrialisés pour lesquels le tabac est la première cause évitable de décès ont déjà commencé à prendre des mesures pour contrôler l’épidémie. 9 Tableau 3 Législation réglementant la publicité et la promotion pour les produits du tabac Bénin Burkina Côte d’Ivoire Guinée Mali Niger Sénégal Publicité Interdiction Pas de régl. Restrictions – Restrictions Interdiction Restrictions Parrainage et promotion Interdiction Pas de régl. Pas de régl. – Pas de régl. Interdiction Interdiction Distribution gratuite Pas de régl; Pas de régl. Restrictions – Pas de régl. Pas de réglementation Interdiction Source : Tobacco Control Country Profiles 2003 L’expérience des pays industrialisés et celle des pays en voie de développement montrent qu’un certain nombre de mesures ont fait la preuve de leur efficacité dans le contrôle du tabac. Ces mesures peuvent être classées en deux catégories : les mesures qui agissent sur la demande et celles qui agissent sur l’offre. Tandis que l’on sait, grâce à des preuves abondantes, que l’on peut agir pour réduire la demande de produits du tabac, l’évidence est moins probante pour ce qui est d’agir avec succès sur l’offre. Certains pays ont tenté de restreindre l’accès au tabac et de réduire l’offre à travers des restrictions commerciales ou des politiques agricoles et de contrôle de la contrebande. Ces mesures, à l’exception du contrôle de la contrebande, ont prouvé une efficacité limitée. Une observation de base, sur la loi du marché, explique que si l’on empêche un fournisseur de vendre une marchandise ou un bien, un autre viendra rapidement prendre sa place et ce tant qu’il existera de bonnes raisons de le faire. Les mesures qui agissent sur la demande qui ont fait preuve de leur efficacité comprennent l’augmentation du prix des produits du tabac ; l’interdiction complète de toute publicité, promotion et parrainage par les fabricants de tabac ; la sensibilisation et l’éducation accrue de l’opinion publique sur les dangers du tabac ; les politiques d’interdiction de fumer, et l’accès aux traitements de la dépendance tabagique. La mise en œuvre plus ou moins complète de ces mesures a permis de réduire à des degrés différents la consommation de tabac dans certains pays, en particulier dans les pays qui ont été confrontés à l’épidémie en premier et qui ont pu déjà observer les effets mortels du tabac. Le degré de succès d’une stratégie de contrôle du tabac dépend : des ressources techniques et humaines disponibles pour mettre en place un programme complet multi-sectoriel et pérenne ; de la volonté politique de légiférer et de faire respecter les lois ; de l’existence d’une masse critique qui respecte la législation en vigueur et de l’existence de lobbys pour demander et défendre les mesures de contrôle du tabac et contrer, entre autres, le pouvoir et l’influence de l’industrie du tabac. Certains de ces éléments sont absents du contexte des pays d’Afrique de l’Ouest car le tabac n’est pas vraiment une des priorités de santé publique et les ressources humaines et financières disponibles, souvent rares, sont déployées en direction d’autres problèmes de santé. Ces pays ont encore à faire face à une morbidité importante liée aux pathologies infectieuses et aux conditions de santé de Tableau 4 Dates de signature et de ratification de la CCLAT par certains pays francophones d’Afrique de l’Ouest. Février 2005 Signature Ratification Bénin 18 juin 2004 Non ratifiée Burkina Faso 22 décembre 2003 Non ratifiée Côte d’Ivoire 24 juillet 2003 Non ratifiée Guinée 1 avril 2004 Non ratifiée Mali 23 septembre 2003 Non ratifiée Niger 28 juin 2004 Non ratifiée Sénégal Non signée Non ratifiée 10 la mère et de l’enfant. La menace que présente la consommation de tabac et ses conséquences sanitaires est largement sous estimée à ce stade de l’épidémie tabagique. La volonté politique de contrôler le tabac fait souvent défaut à cause de l’influence de l’industrie du tabac. Une des raisons majeures d’inaction de la part des gouvernements est la crainte de l’impact sur l’emploi et de la perte de revenus fiscaux dérivés de la vente du tabac. Ces craintes ne sont toutefois que des arguments avancés par l’industrie du tabac qui clament que les mesures de contrôle du tabac conduiront à des millions de pertes d’emploi au niveau mondial et à des pertes de revenus fiscaux pour les gouvernements. Dans les faits, rien de tel. La fabrication de cigarettes est extrêmement mécanisée et elle n’emploie que très peu de personnes au niveau local. A titre d’exemple, pour la Côte d’Ivoire, un pays producteur d’importantes quantités de cigarettes et qui exporte vers ses pays voisins, la part de l’industrie du tabac dans l’emploi généré par l’ensemble des industries est inférieure à 1 %. (WHO/TFI Francophone African project 2004. non publié) Les mesures de contrôle du tabac en œuvre dans les pays francophones de l’Afrique de l’Ouest Globalement, le continent africain n’a pas véritablement progressé pour redresser le développement du tabagisme. Seuls quelques pays africains notamment l’Afrique du Sud, le Botswana, le Mali, l’Ile Maurice ont adopté des cadres réglementaires complets qui se fondent sur les principes clefs de l’efficacité de certaines mesures en l’occurrence une politique fiscale, une interdiction de la publicité, des restrictions de la consommation de tabac et des programmes d’arrêt et d’éducation efficaces. Un bref rappel sur l’état, dans la région, de l’évolution des mesures et IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone politiques nécessaires pour réduire l’épidémie tabagique, permet d’expliquer que l’industrie du tabac bénéficie encore d’une situation avantageuse comparée à celle des acteurs du contrôle du tabac (Tobacco control Country profiles 2003, WHO). Les prix L’augmentation du prix par l’augmentation des taxes est, de loin, la mesure immédiate prouvée la plus efficace pour réduire la consommation de tabac. Les taxes sur les produits du tabac dans les pays d’Afrique de l’Ouest représentent environ 50 % du prix total.. S’il est difficile de préciser un niveau optimal de taxes sur les produits du tabac, il s’avère toutefois que dans les pays qui ont réussi à réduire la consommation de tabac, les taxes sur les produits du tabac représentent de 2/3 à 4/5 du prix de vente. (Banque Mondiale, 1999). La législation Les lois interdisant de fumer dans les lieux publics sont faibles voire nonexistantes dans les pays d’Afrique francophone de l’Ouest. Dans les pays où ces lois existent pour certains lieux, elles sont généralement limitées, peu respectées et les mécanismes de sanction en cas d’infraction sont rarement mis en place. La publicité Dans certains pays d’Afrique francophone de l’Ouest, une interdiction partielle de la publicité pour le tabac existe ; dans d’autres pays comme au Burkina Faso, aucune réglementation de la publicité, de la promotion et du parrainage n’a été adoptée par les autorités. (Table 3). A titre d’exemple, au Burkina Faso, l’industrie du tabac sur une période de trois ans à dépensé 200 millions de Francs CFA pour le parrainage du football, 30 millions pour la boxe et 22 millions pour le basket. (Francophone African countries WHO tobacco control project. Non publié). Le contrôle de la contrebande Les cigarettes de contrebande échappent à toute réglementation des avertissements sanitaires, des prix et donnent accès aux marques internationales les plus prisées des jeunes. Les cigarettes de contrebande représentent 20 % de la consommation nationale. Pour les pays d’Afrique de l’Ouest le contrôle de la contrebande est un véritable défi lorsque l’on considère les obstacles à la surveillance adéquate des frontières et dans certains cas le niveau élevé de corruption. Au delà de promouvoir leurs produits, les fabricants de tabac tentent également de s’auto promouvoir comme des sociétés responsables et citoyennes qui créent des emplois, aident les agriculteurs et font fonctionner l’économie. Les compagnies de tabac prétendent que leur actions « responsables et citoyennes » réduisent les inégalités sociales, en créant des infrastructures de santé et d’éducation ou en améliorant la qualité des soins ou encore la formation pour l’emploi et le management, ou la culture et les loisirs. Des exemples de ce genre d’activités incluent des programmes d’aide au développement des petites entreprises, la prévention des crimes en Afrique du sud et le soutien à des projets de quartiers au Kenya et au Malawi. Les pays francophones d’Afrique de l’Ouest et la Convention cadre pour la lutte anti-tabac de l’OMS Le contrôle des stratégies de l’industrie du tabac L’industrie du tabac déploie toutes sortes de stratégies afin de promouvoir ses produits. Les fabricants de tabac sont puissants et ont de l’influence dans les pays de l’Afrique de l’Ouest. Ces pays avec d’autres pays à faible et moyen revenus sont aujourd’hui les cibles des cigarettiers qui profitent d’une part, du peu de restrictions en terme de marketing et d’autre part du potentiel énorme de recrutement de nouveaux consommateurs en particulier chez les femmes qu’offrent ces pays. Pour un contrôle du tabac efficace, des accords et une coopération internationale sont essentiels. À l’occasion de l’Assemblée mondiale de la Santé en mai 1996, les Etats Membres ont adopté une résolution appelant le Directeur Général de l’OMS à initier un processus pour le développement d’une convention cadre sur le contrôle du tabac. La Convention cadre pour la lutte anti-tabac (CCLAT) est un instrument juridique international, conçu pour contrôler la croissance de l’épidémie du tabac. Le traité a finalement été adopté après plusieurs années de négociations, en mai 2003. Il mothers of premature infants: influence of cigarette smoking. Pediatrics; 90: 934-938 South Africa Tobacco Control; 13: 396-399 Références Catellsague, X., Bosch, F.X. and Munoz, N. (2001). Environmental co-factors in HPV carcinogenesis. Virus Research; 89: 191 –199 Chan-Yeung, M., Ait-Khaled, N., White N., Ip MS., Tan, W.C.(2004) The burden and impact of COPD in Asia and Africa. Int J Tuberc Lung Dis. Jan; 8(1): 2-14 Gajalakshmi, V., Peto, R. (2003) Thanjavur Santhanakrishna Kanaka, Prabhat Jha Smoking and mortality from tuberculosis and other diseases in India: retrospective study of 43 000 adult male deaths and 35000 controls Lancet; 362: 507–15 Global Youth Tobacco Survey Collaborating Group (2003). Differences in worldwide tobacco use by gender: findings from the Global Youth Tobacco Survey J Sch Health. Aug; 73(6): 207-15 Hopkinson, J.M. et al. (1992). Milk production by IARC (2002). Tobacco smoke and involuntary smoking. IARC monograph volume 83; Lyon : IARC Jones, S.B. (1999) Cancer in the developing world: a call to action. BMJ; 319: 505 – 8 Larsen, L.G. et al. (2002) Stereologic examination of placentas from mothers who smoke during pregnancy. Am J Obstet & Gynecol.; 186: 531-537 Simons, A.M. et al. (1993) Damage to DNA in cervical epithelium related to smoking tobacco. British Medical Journal; 306: 1444-48. Yang, X et al. International Journal of Cancer 1996; 65: 338-344 Sitas, F., Urban, M., Bradshaw, D., Kielkowski, D., Bah, S. and Peto, R. (2004)Tobacco attributable deaths in IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Vio, F., Salazar, G. And Infante, C. (1992) Smoking during pregnancy and lactation and its effects on breast milk volume. American Journal Clinical Nutrition 54: 1011 - 6 Walker, A.R ., Adam, F., Walker, J., Walker, B.F.(2002)Cancer of the oesophagus in Africans in sub-Saharan Africa: any hopes for its control?; Eur J Cancer Prev. Oct ;11(5) :413-8 WHO, (2001) Bulletin of the World Health Organization, 79 (10) Yang, X., et al. (1996) International Journal of Cancer; 65: 338-344 World Bank, (1999) Curbing the Epidemic: Governments and the Economics of Tobacco Control. 11 est entré en vigueur en février 2005, 90 jours après la quarantième ratification. Les pays d’Afrique de l’Ouest ont participé activement à la négociation du traité. Pour ces pays, le processus de négociations a été un pas important dans le contrôle du tabac. Dans certains cas, le traité a permis de mettre le problème du tabac pour la première fois à l’ordre du jour national. Pour être Partie à la CCLAT de l’OMS, les pays doivent ratifier le traité. La plupart des pays francophones d’Afrique ont signé le traité (exprimant ainsi l’intention de le ratifier à l’avenir) mais à ce jour aucun ne l’a ratifié. (tableau 4). Lorsque les gouvernements décident d’agir de façon musclée pour enrayer l’épidémie du tabac, une approche à plusieurs niveaux doit être adoptée. Cette approche doit avoir pour objectifs de prévenir l’entrée des enfants dans le tabagisme, de protéger les non-fumeurs, de favoriser l’accès aux traitements et de diffuser de l’information sur les conséquences sanitaires du tabac. Cette stratégie, adaptée au contexte et aux besoins de chaque pays, devrait inclure : (1) l’augmentation des taxes, en montrant l’expérience d’autres pays qui disposent de politiques complètes et dans lesquels la consommation a chuté. Dans ces pays, la part des taxes représente de 2/3 à 4/5 du prix de vente des cigarettes ; (2) publier et diffuser les résultats des recherches sur les dangers du tabac, ajouter des avertissements sanitaires conséquents sur les cigarettes, adopter des interdictions complètes de la publicité et de la promotion ainsi que des interdictions de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics et (3) élargir l’accès aux traitements de substitution nicotinique et à d’autres aides au sevrage. L’OMS met à disposition un certain nombre de recommandations, d’ouvrages, afin de soutenir les pays dans leurs démarches. L’OMS mène également des ateliers de sensibilisation et de développement des capacités au niveau des régions. A titre d’exemple, l’OMS a organisé en septembre 2004 un atelier à Dakar où tous les pays de la CEDEAO étaient invités à participer. L’OMS encourage vivement les pays, en particulier les pays à faible revenu, à ratifier le traité au plus vite afin de freiner l’épidémie du tabac. Les pays pauvres sont les cibles de l’industrie du tabac et si ces pays ne prennent pas de mesures immédiates ils en endureront les conséquences. Le véritable défi est d’appliquer le traité et de le faire devenir réalité sur le terrain. Cela implique de mettre en place les fondations techniques nécessaires et de transposer les éléments du traité en droit national. Remerciements Nous souhaitons remercier le Dr Heide Richter Airijoki et le Dr Poonam Dhavan pour leurs commentaires dans la préparation de cet article. Joy de Beyer L’impact économique de la consommation de tabac en Afrique On fait souvent référence à la contribution économique engendrée par la culture du tabac et la vente de ses produits : emplois et revenus pour les agriculteurs et les personnes employées dans le secteur, recettes fiscales pour les gouvernements et bénéfices considérables pour les entreprises de tabac, échanges de devises dérivées des exportations nettes et de l’investissement étranger. Ces éléments sont évidemment importants. Cependant, face à ces gains se dressent également des pertes économiques moins visibles et dont on parle peut-être moins, mais qu’il convient de prendre en compte. Les effets du tabagisme sur la santé expliquent en grande partie ces pertes économiques, mais d’autres raisons affectent plus largement toute la population, aggravant en particulier, la pauvreté parmi les 12 fumeurs et leurs familles. Cet article étudie l’impact économique du tabagisme pour les pays en voie de développement, au niveau national et du point de vue des familles et propose un cadre permettant de tenir compte des situations particulières auxquelles sont confrontés les pays d’Afrique francophone. Le coût de la consommation de tabac pour les foyers Le tabagisme affecte économiquement les familles dont un des membres fume ou chique du tabac, sur quatre plans différents : – l’argent dépensé par le fumeur en produits du tabac ; – les coûts de santé pour les fumeurs contractant une maladie liée à leur tabagisme ; – l’absence de rentrées d’argent durant la période de maladie ; et – les conséquences économiques de la mort prématurée des fumeurs succombant durant leurs années productives. Très souvent, les fumeurs ne se rendent pas compte de ce que coûtent leurs cigarettes. Le pourcentage moyen des revenus (ou dépenses) consacrés à l’achat de produits de tabac s’avère parfois important. La figure 1 en donne une estimation approximative pour Mots clés •impact économique •tabac •Afrique IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone Très souvent, les fumeurs issus de milieux pauvres dépensent en produits du tabac un pourcentage bien plus important de leurs (faibles) revenus que les fumeurs dont les revenus sont plus élevés. Ceci est particulièrement vrai pour les fumeurs dont la famille vit à la limite, voire endessous du seuil de pauvreté. L’argent dépensé en cigarettes représente un « coût d’opportunité » extrêmement élevé vu que cet argent détourné prive la famille d’achats qui lui sont plus indispensables, par exemple pour se nourrir, s’habiller, inscrire les enfants à l’école ou encore se soigner. Par exemple, au Ghana, le prix d’un paquet de cigarettes importées est équivalent à celui d’un kilo de poisson. Au Bangladesh, 50 % des enfants âgés de moins de 5 ans souffrent de malnutrition, tandis que la moitié des adultes fument ou chiquent du tabac. Il n’existe aucune preuve qui permette d’avancer que si les fumeurs décidaient d’arrêter, l’argent ainsi économisé servirait à acheter de la nourriture. En théorie, toutefois, pour chaque fumeur qui déciderait de s’arrêter, ce serait une personne de plus au Bangladesh qui mangerait à sa faim. Les fumeurs ne sont pas les seuls à payer pour leur consommation de tabac, leurs familles elles aussi, en paient les pots cassés. Joy de Beyer Coordinatrice pour le Contrôle du Tabagisme Banque Mondiale World Bank, 1818 H St NW Washington DC, 20433, USA Email : [email protected] www.worldbank.org/tobacco Figure 1 Dépenses moyennes en cigarettes par fumeur (en % du PNB/habitant) Côt ed ’Ivo ire Gh ana Ma law i Ile Ma uric e Ma roc Nig éria Sé Afr néga iqu l ed uS ud Tun isie Ou gan da Tan zan i Zim e bab we 12 pays d’Afrique et montre que le montant moyen dépensé en cigarettes par les fumeurs pour ces 12 pays réunis représente 6 % du PIB par habitant, avec des chiffres allant de 1 à parfois plus de 13 %. (Ces estimations ont été obtenues en prenant les ventes totales de cigarettes, en les divisant par le nombre estimé de fumeurs adultes, en prenant le prix en 2002 de la marque locale la plus vendue, et en calculant ensuite les dépenses moyennes par fumeur, exprimées en pourcentage du PIB par habitant, pour les pays dont les données étaient disponibles dans Shafey et al 2003.) En plus des effets négatifs quotidiens et immédiats sur le bien-être de toutes ces familles, de cette (mauvaise) allocation du maigre revenu familial disponible, les fumeurs, leurs enfants et toutes les personnes exposées passivement à leur fumée sont à plus grand risque de contracter des maladies, de perdre leur revenu et d’encourir des dépenses supplémentaires pour des soins médicaux. Les fumeurs prennent environ 50 % de plus de congés maladie que les non fumeurs (Woollery et al, 2000). Les pays qui possèdent des données estiment qu’entre 6 et 15 % des dépenses en soins dans le pays sont consacrés au traitement de maladies imputables au tabagisme et que ces dépenses représentent entre 0,1 et 1,1 % du PIB. Du point de vue des familles ou des ménages, des chiffres tirés de deux études dans des pays en voie de développement donnent une idée de l’impact économique important que peut avoir la maladie sur une famille. En Inde, une étude de 1990, estimait les dépenses médicales annuelles et « payées de sa poche » d’un patient atteint d’un cancer, à presque une fois et demi le revenu annuel moyen par habitant (Rath et Chaudhry,1999). Similairement, une étude indonésienne en 1995 estimait les dépenses médicales pour le cancer à près de 70 % du PIB moyen par habitant (Kosen, 2003). Pour une famille à faible revenu, cela signifie que les dépenses médicales pour une maladie grave peuvent très vite dépasser la totalité de son revenu annuel. Il faut cependant tenir compte des coûts nets de santé et non des coûts bruts : si toutes les maladies liées au tabagisme étaient éliminées, d’autres causes rendraient les gens malades, ces IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 maladies, toutefois, se manifesteraient plus tard dans la vie. Le résultat net sur le coût des soins de santé dépendrait alors de la charge globale des maladies dans un pays, de l’accès aux soins, des frais de traitement et de qui paye pour ces frais. Nous avons affaire ici à un problème complexe, mais cependant, certaines études suggèrent qu’il existe bel et bien sur une vie, des dépenses nettes supplémentaires en soins de santé liées à la consommation de tabac (Lightwood et al, 2000). Bien plus conséquentes que le coût des soins sont les pertes de revenus et de productivité durant la maladie, ainsi que les pertes de revenus dues à une retraite ou un décès prématuré durant les années productives chez beaucoup de fumeurs. Cette perte de salaire est une considération économique importante que le poids de la maladie causée par le tabagisme fait peser tant sur les familles que sur le pays. Une étude menée par McIntyre et al en Afrique du Sud en 1985 montrait que le coût des maladies attribuées au tabagisme en termes de soins (en dépenses publiques) et en pertes de revenus, était trois fois supérieur aux revenus fiscaux dérivés des taxes sur le tabac perçus par les gouvernements. De plus, 50 % des fumeurs à long terme paient très cher leur consommation de tabac... au prix de leur vie ; la moitié de ces décès survenant durant les années productives de la personne. D’un point de vue privé, chacune de ces morts représente une véritable tragédie humaine, cause de tristesse et d’espoirs perdus et ce quelle que soit la situation financière de la famille. Pour une famille pauvre ou proche de la pauvreté, la mort 13 Figure 2 utilisés sur les plants de tabac sont des poisons tant pour les cultivateurs que pour l’eau et la terre. Enfin, les plants de tabac, après un certain temps, appauvrissent le sol, rendant nécessaire l’utilisation d’engrais, qui eux aussi peuvent devenir une source polluante. Prix de production pour Burley Tobacco La contribution économique du tabac source : Jaffe 2002. du chef de famille peut avoir des conséquences dévastatrices sur le bienêtre et la survie de celle-ci. Dans une récente étude, « Voices of the Poor », menée dans 23 pays, vingt mille personnes vivant dans la pauvreté ont été interrogées sur les causes et les conséquences de la pauvreté (Narayan et al, 2000). Dans tous les pays, les personnes interrogées évoquent l’impact de la maladie sur la famille, en particulier lorsqu’elle touche le soutien de famille, comme faisant partie des menaces les plus importantes auxquelles elles doivent faire face. Nombreuses sont les personnes qui évoquent également les frais médicaux et la perte de revenus à la suite d’une maladie comme l’une des causes précipitant la pauvreté. Par conséquent, tous les efforts mis en œuvre pour améliorer et préserver la santé Emploi dans la fabrication de produits de tabac en Afrique du Sud, 1945 – 1995. 1945 1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 Figure 3 (notamment à travers les campagnes contre le tabagisme) restent une part importante, à l’ordre du jour des politiques de développement, contre la pauvreté. Avant d’aborder le sujet de la contribution économique du tabac, il reste encore deux autres types de coûts qu’il serait bon de mentionner. Les incendies causés par les cigarettes mal éteintes ont un impact économique assez considérable, estimé à 27 milliards de dollars par an en moyenne (Mackay and Eriksen 2002), et représentent une cause de mortalité importante. Le tabac nuit également à l’environnement et cause des pertes économiques à court comme à long terme (Lightwood et al. 2000). D’une part, le bois utilisé pour le séchage du tabac contribue largement à la déforestation dans les régions où celui-ci est cultivé. D’autre part, les pesticides Source : van der Merwe in Abedian et al. (eds) 1998. 14 Les avantages économiques du tabac sont à considérer sous trois angles différents : l’emploi, les recettes fiscales et l’échange monétaire. L’industrie du tabac génère également de considérables bénéfices d’entreprise, mais ils ne concernent pratiquement que les sociétés transnationales et ne contribuent que très peu au développement national (sauf via les recettes fiscales qu’ils génèrent pour le gouvernement). Lorsque l’on observe la contribution économique de l’industrie du tabac, il est sûr que celle-ci représente un montant total important, mais à qui profite cet argent véritablement ? L’emploi. Dans de nombreux pays, le chômage représente un problème majeur, et les gouvernements étudient toujours (à juste raison) en détails l’impact de nouvelles politiques sur l’emploi. De nombreuses estimations sont disponibles concernant le nombre de personnes qui dépendent totalement ou partiellement de l’industrie du tabac pour vivre, qu’ils soient agriculteurs, ouvriers dans les usines de fabrication ou grossistes et détaillants dans la vente. Il est clair que tout emploi a son importance, mais dans le cas des emplois dépendant de la consommation de tabac, il est nécessaire d’étudier la question selon quatre points distincts. Premièrement, dans la plupart des pays, le nombre de personnes employées dans l’industrie du tabac ne représentent qu’une part minime et de moins en moins importante de la main d’œuvre totale. Même au Malawi, où le tabac constitue une part importante de l’économie, on estime qu’environ 10 % seulement de petits agriculteurs cultivent le tabac, même si ce pourcentage était déjà plus élevé en 1997 (avoisinant les 19 %) lorsque le prix de la feuille de tabac était à un niveau record (Jaffee 2002). Au Zimbabwe, où le tabac joue également un rôle économique important, seulement 2 % des travailleurs IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone Troisièmement, dans le cas où les efforts mis en place pour limiter la consommation de tabac s’avéreraient fructueux et causeraient une diminution des ventes, cela pourrait entraîner des pertes d’emploi dans l’industrie du tabac, en plus d’une diminution de la demande en feuilles de tabac. Les fumeurs, toutefois, qui décideraient de s’arrêter de fumer ou de limiter leur consommation de cigarettes dépenseraient alors leur argent dans d’autres biens et services, faisant ainsi accroître la demande et générant de nouveaux emplois dans d’autres secteurs de l’économie. Tout compte fait, pour de nombreux pays, et surtout pour les pays importateurs de quantités importantes de cigarettes et/ou de produits de tabac ou pour ceux qui possèdent des usines de production de cigarettes à haute intensité de capital, ce « transfert de dépenses » pourrait avoir un impact net positif sur l’emploi grâce aux bénéfices nets d’emploi qu’il engendrerait. Quatrièmement, l’un des arguments le plus souvent avancé contre les mesures de contrôle du tabac est que la diminution de sa consommation, entraînerait des pertes d’emploi. Or d’autres facteurs importants sont aussi à l’origine de pertes d’emploi dans l’industrie du tabac. Les changements technologiques dans la fabrication des produits de tabac ont réduit de manière importante la quantité de tabac nécessaire à la fabrication des cigarettes, entraînant ainsi une diminution de la demande en feuilles de tabac. De plus, une mécanisation de plus en plus importante, combinée aux nouvelles technologies de production, ont fait dramatiquement chuter le nombre d’emplois dans le secteur de la Figure 5 production de cigarettes. Par exemple, la Figure 3 montre qu’en Afrique du Sud, le nombre d’emplois dans la fabrication des produits de tabac s’est largement mis à chuter dès le milieu des années 50. La tendance s’est légèrement inversée durant les années 70 jusqu’au début des années 80, pour ensuite voir le nombre d’emplois chuter de plus belle, alors que les ventes et les niveaux de production connaissaient un accroissement rapide, et ce, bien avant que des mesures de contrôle du tabac n’aient été instaurées. La diminution de la consommation de tabac en Afrique du Sud n’a eu lieu qu’à partir de 1991, soit les 2 à 4 dernières années représentées sur le graphique. D’autres facteurs n’ayant aucun lien avec les mesures de contrôle du tabac ont également causé une diminution de l’emploi dans l’industrie du tabac, en Afrique du Sud comme dans beaucoup d’autres pays. Taux d’imposition réel sur la cigarette et recettes fiscales réelles en Afrique du sud 1960 – 1997 Taux d’imposition réel sur la cigarette par paquet en devise constante de 1990 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Nig eri Afr a iqu ed uS ud Source : estimations de la banque mondiale Ke ny a Gh an a Ou ga nd a Cô te d’I voi re Ca me rou n Ma law i zim ba bw e Sé né ga li Deuxièmement, les emplois dans l’industrie du tabac sont généralement très mal rémunérés. Ajoutons à cela les risques de maladies professionnelles qu’encourent les agriculteurs et ouvriers à force d’inhaler des particules et poussières de tabac et en absorbant de la nicotine par la peau (ce qui entraîne la « maladie du tabac vert »). La culture du tabac demande un travail considérable, elle a recours a beaucoup d’autres produits (fertilisants, pesticides, bois pour le séchage), et bien qu’elle ait été par le passé une source importante de bénéfices et de revenus, sa rentabilité relative a fortement diminué depuis le milieu des années 90 (Figure 2). Si les forces du marché et le déséquilibre entre l’offre et la demande mondiales en sont un facteur, il faut y ajouter le pouvoir énorme que les acheteurs de tabac monopolistiques/oligopolistiques ont sur le marché, contrairement aux agriculteurs qui n’ont pratiquement aucun pouvoir de négociation sur les prix. Cela permet aux acheteurs d’« écraser » les prix de la feuille de tabac dans le but de réduire les coûts pour les fabricants. Figure 4 Taxes totale sur la cigarette et son pourcentage par rapport aux recettes fiscales totales dans différents pays d’afrique, 1989 Recettes réelles en millions de devises constantes de 1990 A B 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 agricoles sont employés dans la culture du tabac (Jacobs et al. 2000). Quant aux emplois dans les usines de fabrication de tabac, ceux-ci ne comptent que pour un maigre 1 % du nombre total d’emplois dans l’industrie dans les pays d’Afrique. En ce qui concerne les pays d’Afrique francophone, l’industrie du tabac ne contribue que très peu à la création d’emplois. 15 Les recettes fiscales. Dans de nombreux pays en voie de développement (mais pas dans tous), les recettes fiscales issues du tabac représentent une part importante des recettes totales perçues par le gouvernement, allant d’un peu plus de 1 % à presque 10 % des recettes totales du gouvernement (Figure 4). Certains gouvernements se montrent donc très hésitants lorsqu’il s’agit de contrôler la consommation de tabac, de peur qu’une diminution de celle-ci ne porte atteinte à leurs recettes fiscales importantes. Or, une augmentation des taxes sur le tabac constitue une mesure de lutte anti tabac très efficace, une mesure coût – efficace en terme de santé publique et un moyen de l’État d’augmenter les recettes fiscales totales. À moyen terme du moins, des taxes plus élevées sur le tabac généreront des recettes fiscales plus importantes, car elles réduisent la consommation de tabac dans une proportion moindre que l’augmentation des taxes. L’augmentation des taxes sera perçue sur un nombre un peu moins important de cigarettes, engendrant une augmentation des recettes fiscales de l’État ainsi qu’une amélioration de la santé. La figure 5 montre (A) le niveau de taxation sur les cigarettes en Afrique du Sud de 1960 à 1997, et (B) les recettes totales en devises constantes de 1990 (indexée). Des taxes élevées engendrent clairement des recettes fiscales plus importantes. Quand l’inflation faisait baisser le taux d’imposition réel, les recettes fiscales elles aussi connaissaient une diminution. Mais lorsque le nouveau gouvernement élu démocratiquement a instauré une augmentation des taxes, les recettes (réelles) totales ont grimpé et ont continué dans cette lancée dans les dernières années (non reprises dans le graphique). Si les taxes sur le tabac sont importantes, au regard de nombreux gouvernements, elles ne sont pas une véritable contribution économique. Elles seraient plutôt un transfert de ressources d’un groupe (les fumeurs) à un autre (le gouvernement et les personnes bénéficiant des dépenses du gouvernement financées par les taxes). Si l’on oublie la dimension macroéconomique pour s’intéresser au niveau des familles, quel est l’impact d’une telle augmentation des taxes sur le fumeur ? De manière évidente, plus les taxes et le prix du tabac sont élevés, plus le fumeur paiera de taxes (et ce au profit des fabricants de tabac). Dans les pays de 16 Figure 6 Surplus/(déficit) net en cigarettes, feuilles de tabac et tabac total dans la région Afrique, 1961 – 1998 l’Union européenne, ces sommes sont assez importantes, mais elles le sont surtout dans les pays où les taxes et le prix des cigarettes sont bas, comme c’est le cas dans de nombreux pays d’Afrique. Quand le niveau des taxes et le prix des cigarettes augmentent, les fumeurs les plus défavorisés auront plus tendance que les fumeurs plus riches à réduire leur consommation ou à s’arrêter de fumer et par conséquent ils réduiront leurs dépenses en cigarettes (au lieu de les augmenter) tout en réduisant les risques de maladies liées au tabagisme. L’échange monétaire. Dans l’ensemble, les pays africains génèrent des échanges monétaires importants à travers l’export des feuilles de tabac, alors que le commerce de cigarettes et d’autres produits de tabac ont tendance à engendrer un (léger) déficit commercial net. Conclusion En conclusion, l’impact économique du tabac présente à la fois des coûts et des bénéfices, plus ou moins importants selon les cas. La culture, le traitement et la fabrication des produits de tabac créent de l’emploi et engendrent des recettes pour le gouvernement. Dans certains pays ou régions, le tabac joue une part importante dans l’économie. Mais pour la majorité des pays, les contributions apportées par le tabac ne sont que minimes. Seul un faible pourcentage d’agriculteurs cultivent encore le tabac, et très peu d’entre eux gagnent leur vie avec ces cultures. Seule une petite portion de la main d’œuvre totale dépend encore de l’industrie du tabac, et la mécanisation toujours plus importante du secteur réduit d’autant plus le nombre d’emplois. Par conséquent, si dans certains cas, les avantages économiques sont considérables, une grande partie de ces bénéfices se traduit en profits pour les entreprises et n’influence donc pas le développement économique national. Les avantages économiques globaux du tabac pour les pays en voie de développement sont souvent exagérés. Face aux gains économiques du tabac se dresse la liste des coûts importants engendrés par celui-ci. Le coût annuel de santé est plus élevé pour les fumeurs et le poids de celui-ci, retombe sur la famille, le Trésor public et les employeurs/assureurs. Les pertes en revenus et en productivité ou celles causées par une mort prématurée due à une maladie liée au tabac peuvent être énormes pour l’employeur comme pour l’employé. La maladie ne fait qu’accentuer le cercle vicieux de la pauvreté. Les cigarettes mal éteintes sont la cause de milliers d’incendies et de décès. Les dégâts causés par la culture du tabac, l’utilisation de fertilisants et de pesticides, la déforestation due au séchage du tabac sont autant d’éléments environnementaux engendrant des pertes économiques importantes. Reste également le coût insidieux et souvent oublié des dégâts causés pour les foyers défavorisés dont les maigres ressources sont consacrées à l’achat de cigarettes plutôt que d’être utilisées pour se nourrir ou pour d’autres activités vitales. La réduction du tabagisme est bonne non seulement pour la santé, mais aussi pour l’économie et le développement. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone Références Efroymson D, Ahmed S, Townsend J, et al. Hungry for tobacco : an analysis of the economic impact of tobacco consumption on the poor in Bangladesh. Tobacco Control 2001 ; 10 :212-217 Jacobs R, HF Gale, TC Capehart, P Zhang et P Jha 2002. “The supply-side effects of tobacco control policies”, dans Jha P et F Chaloupka (éditeurs), Tobacco Control in Developing Countries, Oxford University Press pour la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale de la Santé, New York. Jaffee, S. Malawi’s Tobacco Sector, Standing on One Strong Leg is Better Than on None, Banque Mondiale, juin 2002. Kosen, S, 2003. Health and Economic Impact of Tobacco Use in Indonesia. Article non publié commandité par la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale de la Santé. Lightwood J, D Collins, H Lapsley et T Novotny, 2000. “Estimating the costs of tobacco use”, dans Jha P et F Chaloupka (éditeurs), Tobacco Control in Developing Countries, Oxford University Press pour la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale de la Santé, New York. Mackay, J et M Eriksen, 2002. The Tobacco Atlas. Organisation Mondiale de la Santé, Genève 2002. McIntyre DE et SP Taylor, 1989. Economic Aspects of Smoking In South Africa, South African Medical Journal, 75(9) :432-5 Narayan, D, R Chambers, M Shah et P Petesch, 2000. Voices of the Poor - Crying Out for Change. Banque Mondiale, Washington DC, USA. Rath, GK et K Chaudhry 1999. Estimation of Cost of Tobacco Related Cancers, Report of an ICMR Task Force Study (1990-1996). Conseil indien pour la Recherche médicale, Ansaris Naga, New Delhi, Inde. Shafey O, S Dolwick et EG Guindon (éditeurs) 2003, Tobacco Control Country Profiles, Deuxième Édition. Société américaine contre le Cancer, Organisation Mondiale de la Santé et Union internationale de Lutte contre le Cancer. Tao Ming 2004. Preliminary Research Findings on the Tobacco Industry in China, Présentation non officielle dans le cadre de la réunion sur le Progrès dans la Recherche pour le Fogerty Center/NIH Fonds économique pour la Recherche sur le Tabagisme, Chengdu, Chine, le 2 novembre . van der Merwe R 1998. “The economics of tobacco control in South Africa” dans Abedian et al (éditeurs), The Economics of Tobacco Control Towards an optimal policy mix. Centre de Recherche fiscale Appliquée, Université du Cap, Afrique du Sud. Woollery, T, S Asma et D Sharp, 2000. “Clean indoor-air laws and youth access restrictions”, dans Jha P et F Chaloupka (éditeurs), Tobacco Control in Developing Countries, Oxford University Press pour la Banque Mondiale et l’Organisation Mondiale de la Santé, New York. Banque Mondiale, 1999. Curbing the Epidemic: governments and the economics of tobacco control. Banque Mondiale, Washington DC, USA. Sylviane Ratte et Karen Slama État des données et de la recherche en Afrique francophone Constat sur l’état des données Les pays à revenus élevés disposent de ressources importantes dérivées des taxes sur les ventes de tabac qu’ils peuvent choisir de mettre au service de la santé publique et de la recherche. Toutefois, la plupart des pays industrialisés, même les plus avancés, sont loin, à ce jour, d’être dotés de tous les indicateurs et données essentiels et nécessaires à l’établissement et au suivi de programmes nationaux de lutte contre le tabac tels que le prévoient la Convention cadre pour la lutte antitabac et les recommandations internationales.1 Globalement, les fonds alloués à la recherche pour le contrôle du tabac sont encore très faibles et loin d’être à la hauteur des enjeux de santé publique que présente l’épidémie tabagique. En 1999, 1. Banque mondiale, data toolkit, CDC Comprehensive tobacco control programmes guidelines. Convention cadre pour la lutte antitabac, OMS. l’OMS estimait que les financements pour la recherche mondiale (et non pas les fonds disponibles dans quelques pays industrialisés) ne dépassaient pas US$15 millions par an (OMS, 1999). L’investissement dans la recherche pour le contrôle du tabac est relativement modeste comparé à l’investissement pour d’autres problèmes de santé. Par exemple, pour chaque décès attribuable, les dépenses des gouvernements et organismes publiques pour la recherche serait (pour la même année) de $50 pour le tabac comparé à $3000 pour le SIDA (Baris et al., 2000). De plus, une grande partie de la recherche concernant le tabac est concentrée dans les pays à revenus élevés. Il est donc peu surprenant que les études et les réflexions menées sur l’état des données dans les pays en développement et notamment en Afrique francophone débouchent sur des constats d’inadéquation (Efroymson, 2002). Il est IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 évident que les données standardisées et comparables manquent dans pratiquement tous les domaines relatifs au tabagisme. Les données disponibles sont souvent vieilles, parcellaires et peu représentatives, tel qu’en témoigne la disparité en Afrique francophone des indicateurs de prévalence du tabagisme enregistrés et diffusés au niveau international (Tableau 1). Les données chez les adolescents sont généralement plus récentes et indiquent des taux plus élevés que les taux connus des adultes, aussi bien chez les filles que chez les garçons (Tableau 2). Comme ailleurs dans le monde, les taux de tabagisme des hommes excèdent ceux des femmes, et, comme dans la plupart des pays en Mots clés • tabac • données • Afrique 17 Afrique, le tabagisme chez les femmes est en augmentation. Aussi insuffisantes soit-elles, les données témoignent toutefois d’une réalité inquiétante. En ce qui concerne l’Afrique toute entière, la consommation du tabac est en hausse spectaculaire dans la plupart des pays excepté en Afrique du Sud. La consommation totale de cigarettes est passée de 131,181 millions d’unités en 1995 à 212,788 millions d’unités en 2000 ; une augmentation de 38,4 % en cinq ans (Jha & Chaloupka, 2000). Les projections d’expansion des plus grandes compagnies de tabac confirment cette tendance (OMS, 2003). On ne peut guère aller plus loin dans le constat des données sur l’usage du tabac en Afrique francophone. Les indicateurs permettant de mesurer l’évolution du tabagisme dans les populations, et préciser leurs besoins sont en développement. Très peu d’informations fiables existent sur les connaissances, attitudes et croyances des individus et leurs communautés, à l’exception de celles recueillies dans le contexte des enquêtes menées dans le cadre de la « Global Youth Tobacco Survey » chez les 13-15 ans, dans certaines villes. L’état insuffisant des données s’explique par le manque de capacité adéquate à mener des recherches, le peu d’accès à la publication de celles-ci lorsqu’elles existent, mais également par le peu d’importance accordée à la lutte contre le tabac. Dans des pays et régions où d’autres problèmes sanitaires tels que le SIDA ou le paludisme sont pressants, Sylviane Ratte Responsable programme tabac Service Prévention – information dépistage Institut national du cancer (INCa) 21 rue Leblanc Le Ponant B 75 740 Paris Cedex 15 France Tél : + 33 1 53 98 55 13 Fax : + 33 1 45 54 18 69 Email : [email protected] Karen Slama Chef de division de la prévention du tabagisme Union Internationale contre la Tuberculose et les Maladies Respiratoires Email : [email protected] 18 l’industrie du tabac propage aisément l’image de l’apport économique du tabac en occultant les inconvénients. Les pouvoirs publics sont soit intimidés par des menaces économiques soit tentés par des bénéfices immédiats ; leur volonté politique d’agir contre le tabac s’en voit affaiblie. Recherche pour les pays d’Afrique francophone : quelle stratégie ? De manière générale, la désapprobation du public ainsi qu’un cadre réglementaire sont les facteurs les plus importants pour le changement de comportement tabagique d’une population (Slama, 2004). Une recommandation importante pour l’Afrique francophone est donc de définir les programmes de recherche afin d’obtenir un impact le plus large possible sur les populations et les amener le plus rapidement possible à l’adoption de mesures et d’instruments reconnus efficaces dans le contrôle du tabac (Jha & Chaloupka, 2000). Par ailleurs, il est essentiel en parallèle d’alerter les décideurs et l’opinion publique sur les pratiques de l’industrie du tabac et ses tentatives et stratégies pour contrer l’adoption et l’application des mesures de santé publique reconnues efficaces (Jha & Chaloupka, 2000). Une recherche qui permette de mieux agir contre le problème du tabac D’après les auteurs du programme « Initiative for Cardiovascular Health Research in Developing Countries » (WHF, 2004) les pays en développement doivent se concentrer en priorité sur de la recherche opérationnelle afin d’identifier, promouvoir et évaluer les interventions de contrôle du tabac en suivant la Convention cadre pour la lutte anti tabac qui s’inscriront au mieux dans le contexte socioculturel et qui seront jugés les plus coût-efficaces. Il serait utile de mettre l’accent sur les obstacles à la ratification ou à la mise en œuvre de la CCLAT et sur les tactiques déployées par l’industrie du tabac pour s’y opposer, d’identifier les facteurs qui facilitent et freinent l’application des lois ainsi que les facteurs qui renforcent les cadres réglementaires. Des études permettant de promouvoir l’interdiction de fumer ou d’autres mesures législatives spécifiques telles que l’interdiction de la publicité, ainsi que des études sur les effets macroéconomiques du contrôle du tabac sont à favoriser. Aussi, le rôle des ONG doit être reconnu dans le contrôle du tabac ainsi que leur capacité à traduire la recherche en action. Pour promouvoir l’arrêt individuel, il est nécessaire de mieux connaître différents aspects de l’arrêt chez les hommes, les femmes et les jeunes, d’évaluer la mise en place des services nécessaires et disponibles et d’assurer l’évaluation de ces services en terme de coût-effacité. Il est important de surveiller les actions de l’industrie du tabac tentant de faire obstacle aux démarches d’aide à l’arrêt et de mesurer régulièrement les connaissances, motivations et compétences, attitudes et pratiques des différents professionnels de santé pour promouvoir l’arrêt auprès de leurs patients. Pour prévenir l’initiation, il est nécessaire de faire l’état des lieux des normes socioculturelles et pratiques autour du tabac, d’étudier les actions et stratégies de l’industrie du tabac (secrètes et publiques) pour encourager l’initiation. Ceci implique de tirer profit de l’expérience accumulée dans la lutte antitabac pour identifier les facteurs préventifs et les méthodes d’évaluation appropriées pour étudier ces domaines. La recherche à moindre coût avec des objectifs politiques En outre de l’importance de toutes les recherches à faire pour mieux connaître et mieux agir contre le problème du tabac, il est urgent d’effectuer des changements d’opinion et de cadre législatif. PATH Canada, une association qui s’intéresse particulièrement à la technologie appropriée en santé pour les pays les plus pauvres, s’est penchée sur la notion de recherche à coût faible pour alerter les décideurs, l’opinion publique et faciliter l’adoption de mesures efficaces (Efroymson, 2002). Dans cette optique, la recherche est choisie selon les objectifs politiques à atteindre. Pour les recherches faciles à mener et peu coûteuses, PATH Canada propose de planifier la recherche en posant des questions très ciblées : • Quel est l’objectif en terme de politique de santé de cette recherche ? IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone Tableau 1 Prévalence du tabagisme des adultes en Afrique francophone Pays Prévalence hommes Prévalence femmes Source Age Date Algérie 43,8 % 6,6 % Publié dans Tobacco Control Country Profiles, 2003. UICC,ACS,WHO 10+ 1997-1998 Bénin 37 % Pas de données Fourn, L. and Monteiro, B. (1998) Smoking and Health in Benin. World Health Forum 9. 589-590* 10+ Burkina Faso Pas de données disponibles Burundi 15,6 % 11,4 % Bujumbura ; Mahwenya, P.(1998). Analyse de la situation actuelle du tabagisme au Burundi. Organisation Mondiale de la Santé. Dans Strong, K. and Bonita, R. (2003). The SuRF Report 1. Surveillance of Risk Factors related to Noncommunicable Diseases : Current status of global data. Geneva : WHO.* 19+ 1995 Cameroun 35,7 % Pas de données Current smoking ; Cameroon smoking population. (2000). TMA –International Tobacco Guide (ITG)* Adultes 1994 Côte d’Ivoire 42,3 % Current cigarette smoking in Abidjan ; Schmidt, D, Dialio, AD., Tiendrebeogo,H and Roudaut, M.(1981)* 15+ 1977 Gabon Pas de données disponibles Mauritanie Pas de données disponibles Ile Maurice 42,1 % 1,8 % Cigarette smoking ; Cox H.S., Williams J.W., de Courten,M.P., Chitson, P., Tuomilehto J., Zimmet, PZ.(2000) Decreasing prevalence of cigarette smoking in the middle income country of Mauritius: questionnaire survey. British Medical Journal 321 (7257) : 345-349.* 20+ 1998 Maroc 34,5 % 3,2 % Données sur l’usage du tabac d’une enquête nationale sur les facteurs de risques cardiovasculaires ; rapporté dans « Country profiles on Tobacco control in the Eastern Mediterranean Region » * Adultes 35+ 2001 Niger 40,8 % 1,6 % Tabagisme parmi 2270 jeunes adultes dans six villes. Adventist Development Relief Agency * 15-35 Pas de date Sénégal 32 % 11,5 % Tobacco and cigarette smoking in Thiadiaye District, Sénégal. année enquête non connue ; Kane, A., Ly M., Diouf,N.D . ; Diop, PS., Diao, M ., Diop, A.K., Dia,A.A., Diop,I.B.,Hane,L. Sarr,M. and Diouf,S.M. Dakar Medical 43 (1) :101-103 12+ Publié en 1998 Tchad 24,1 % 4,6 % Current cigarette smoking in Sahr. Leonard L.(1996)* 15+ 1993-1994 Tunisie 61,9 % 7,7 % Enquête nationale sur le tabac. « Country profiles in the Eastern Mediterranean Region » * Adultes 1997 Source principale : Tobacco Contry Profiles, 2003. UICC, ACS, WHO. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 19 • Cette recherche est-elle appropriée pour les objectifs recherchés en terme de politique ? • Le calendrier de recherche est-il réaliste ? • Comment les résultats vont-ils être utilisés ? • Existe-t-il un autre moyen (moins coûteux, plus facile, plus efficace) d’obtenir le même résultat ? Les types de recherche préconisés sont en particulier les enquêtes d’opinion publique qui peuvent montrer à un gouvernement frileux que l’opinion publique soutient certaines mesures tels que l’interdiction de la publicité, et des recherches économiques qui démontrent que les actions de contrôle du tabac ne nuisent pas à l’économie. PATH Canada a, par exemple, soutenu une étude sur le tabac et la pauvreté au Niger qui montre clairement que le tabac appauvrit le pays et les individus et ne contribue que très peu à l’économie. PATH Canada encourage également l’étude des documents internes de l’industrie afin de dévoiler les stratégies des fabricants de tabac et leur degré d’influence et d’en alerter l’opinion publique. Recherche pour les pays en développement : récentes évolutions Dans les cinq dernières années notamment, les négociations de la Convention cadre pour la lutte antitabac et l’accélération des échanges internationaux ont contribué à débuter des programmes de recherche qui commencent à répondre aux problèmes et obstacles soulignés. En 2001, les « National Institutes for Health » aux Etats Unis lançaient l’« International Tobacco and Health Research and Capacity Building Program » en mettant à disposition US$17 millions pour développer les infrastructures et renforcer les capacités des pays à revenus faibles ou intermédiaires pour la recherche et pour la formation des chercheurs dans ces pays. L’Afrique francophone en raison de la barrière de la langue n’est malheureusement que rarement en mesure de bénéficier de telles subventions. Similairement, la Recherche Mondiale pour la Lutte Contre le Tabac, l’Initiative Canadienne de Recherche pour la Lutte contre le Tabagisme, l’American Cancer Society et Cancer Research UK ont lancé 20 en 2004 un concours de recherche avec des bourses dont le montant se situait entre 1 000 à 10 000 CAD visant spécifiquement à stimuler la ratification et la mise en œuvre de la CCLAT dans les pays les plus démunis. L’initiative globale de recherche sous la forme des enquêtes « Global Youth Survey », « Global School Personnel Survey » et « Global Health Professionals Survey » menées par les US Centers for Disease Control an Prevention (CDC) et l’OMS commence à apporter des données essentielles en terme de prévalence, connaissances et attitudes pour les pays d’Afrique francophone. Qui plus est, ces enquêtes offrent l’avantage d’être comparables au niveau international et permettent progressivement de développer localement les capacités en recherche sur l’usage du tabac. Cette initiative devrait permettre aux pays en développement, qui se prêtent à l’exercice régulièrement, de très rapidement mettre en place quelques indicateurs de suivi de l’épidémie tabagique. De surcroît, la participation à cette initiative offre la possibilité de créer les conditions nécessaires pour maintenir à l’avenir la mesure et le suivi de l’épidémie tabagique dans les pays d’Afrique francophone ainsi que dans toutes les régions. Des actions de recherche menées exclusivement en Afrique Francophone L’Union Internationale de Promotion de la santé et d’Éducation pour la Santé (UIPES) avec ses partenaires développe depuis 2002 des actions en promotion de la santé pour le contrôle du tabac dans les pays d’Afrique francophone. L’UIPES avec le soutien financier des CDC travaille sur une étude pilote dans 4 pays d’Afrique francophone sur les besoins de ces pays pour structurer la mise en place de la Convention cadre pour la lutte antitabac. Une action similaire vient d’être réalisée par l’OMS dans cinq pays d’Afrique francophone. Les premiers résultats devraient être disponibles très prochainement. En parallèle, l’Observatoire du Tabac en Afrique Francophone (OTAF) s’est constitué en 2002 comme centre de référence sur le tabac pour la région. Un premier recueil sur les données disponibles dans les pays membres a été réalisé et a permis de définir les indicateurs à collecter à l’avenir pour tenir compte de la réalité du terrain. Les premières données sont disponibles sur le site de l’OTAF <www.otaf.globalink.org> ; toutefois un travail important reste à fournir. La Ligue nationale de lutte contre le Cancer (France) et L’Union Internationale contre la Tuberculose et les Maladies Respiratoires se sont associées en 2005 pour soutenir la réalisation d’enquêtes comparables et pour affiner les méthodes de recueil de l’information. En dépit des progrès réalisés, un effort accru de la part des organismes internationaux et nationaux est nécessaire pour que les pays d’Afrique francophone ne soient pas exclus des avancées internationales, notamment en ce qui concerne l’accès aux documents et aux formations en langue française. Conclusion L’état des données en matière de tabac pour les pays d’Afrique francophone n’est pas satisfaisant. S’il est essentiel de commencer à développer des recherches sur l’usage du tabac, il est illusoire d’envisager de vastes programmes de recherche interdisciplinaire modelés sur les pays industrialisés les plus avancés dans la lutte contre le tabac, étant donné le contexte politique, culturel et économique de la plupart des pays d’Afrique francophone. Dans le monde, les données existent sur le danger du tabac pour les individus et pour les populations. Les preuves probantes des stratégies de lutte antitabac sont disponibles. L’enjeu immédiat pour l’Afrique francophone est de rapidement mettre en place les stratégies de recherche les plus prometteuses en terme de résultats et de faisabilité. Quelques initiatives internationales récentes ont été mises en place pour aider les pays en développement dans ce sens, et l’Union Européenne recommande que le contrôle du tabac soit intégré dans les politiques de développement (Tobacco control and development policy). Au niveau local, des enquêtes peu coûteuses, ciblées et accessibles devraient permettre de démontrer sans attendre, l’urgence d’agir, de promouvoir la législation et de sensibiliser l’opinion publique à la gravité des conséquences sanitaires, économiques et sociales à venir liées au tabac qui toucheront l’Afrique francophone du 21e siècle. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone Tableau 2 Prévalence du tabagisme des jeunes en Afrique francophone Pays Prévalence garçons Prévalence filles Source Age Date Algérie 4% <1 Current tobacco smoking in Setif area ; Information reçue de Hamdi Cherif Mohktar, Hôpital Mère et Enfant – pas de date d’enquête* 15+ 1997-1998 Bénin Littoral Atlantique 24,9 % 7,6 % Global Youth Tobacco Survey – 2003 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm 11-14 Bénin Borgou Alibori 36,2 % 9,9 % Global Youth Tobacco Survey – 2003 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm 11-14 Burkina Faso 61,9 % 27,4 % Global Youth Tobacco Survey – 2001 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm 11-13 1998 Burundi 14,7 % 7,8 % Smokers among students in secondary instruction school, Bujumbura ; Mahwenya, P. (1998). Analyse de la situation actuelle du tabagisme au Burundi. Organisation Mondiale de la Santé. Dans Strong, K. and Bonita, R. (2003). The SuRF Report 1. Surveillance of Risk Factors related to Noncommunicable Diseases : Current status of global data. Geneva : WHO.* 16-24 1996 Cameroun Pas de données Pas de données Tchad 10,7 % Pas de données Cigarette smoking and perceptions about smoking and health in Chad. East African Medical Journal 73(8) :509-512* 15-24 1993-1994 Côte d’Ivoire 24,9 % 14,6 % Bouke :Roudaut M.,Meda,A.H., Seka.,A, Fadiga D., Pigearias B.and Akoto,A. (1992).Médecine Tropicale 52 (3) :279-283 14-23 1992 Gabon Pas de données Pas de données Mauritanie 22,7 % 33,7 % Global Youth Tobacco Survey – 2001 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm Non spécifié 2001 Maroc 17,4 % 9,3 % Global Youth Tobacco Survey – 2001 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm 13-15 2001 Mali 44,9 % 12,6 % Global Youth Tobacco Survey – 2001 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm 13-15 2001 Niger 27,3 % 14,2 % Global Youth Tobacco Survey – 2001 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm 11-18 Pas de date Sénégal 9% 9% Tobacco and cigarette smoking in Thiadiaye District, Senegal (année inconnue) ; Kane, A., Ly, M., Diouf, N.D., Diop, P.S., Diao, M., Diop, A.K., Dia, A.A., Diop, I.B., Hane, L., Sarr, M. and Diouf, S.M. (1998). Enquête sur le tabagisme en milieu rural de Thiadiaye, Sénégal] Dakar Médical 43(1) : 101103.* 12-18 1998 Tchad 10,7 % 10,7 % Cigarette smoking and perceptions about smoking and health in Chad. East African Medical Journal 73(8) :509-512* 15-24 1993-1994 Togo Pas de données Pas de données Tunisie 28,7 % 7,2 % Global Youth Tobacco Survey – 2001 http://www.cdc.gov/tobacco/global/GYTS.htm 13-15 ans 2001 Source principale : Tobacco Contry Profiles, 2003. UICC, ACS, WHO. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 21 Références Baris E, Waverley Brigden L, Prindiville.J, da Costa e Silva VL, Chitanondh. H, Chandiwana S. Research priorities for tobacco control in developing countries: a regional approach to a global consultative process. Tobacco Control 2000; 9 :217-223. Jha P, Chaloupka F. Tobacco Control in developing countries. Oxford University Press. 2000. Juillet 1999. Slama K. Current challenges in tobacco control. Int J tuberc lung dis 8 (10) :1160-1172. 2004 IUALTD. Organisation Mondiale de la Santé. Confronting the Epidemic: A Global Agenda for Tobacco Control Research. OMS. Discours inaugural du Directeur Régional de l’OMS pour l’Afrique. Dr Luis Gomes Sambo. 1er février 2005. Organisation Mondiale de la Sante. Journée Mondiale Sans Tabac. Tabac et Pauvreté. OMS 2004. Tobacco control and development policy (background paper). Tobacco and Health in the developing World (background paper). Efroymson D. Low Cost Research for Advocacy. Path Canada Guide.2002. Organisation Mondiale de la Santé. Tobacco Atlas. OMS. 2002. World Heart Federation. Initiative for Cardiovascular Health Research in Developing Countries. Disponible sur: http://www.worldheart.org/pdf/activities.science. ic-health.pdf. Inoussa Saouna Pays pauvres, le nouvel Eldorado du tabagisme Voici des siècles que l’on s’adonne à la consommation de tabac, mais ce n’est qu’au XIXe siècle que l’on a commencé à fabriquer des cigarettes en grande quantité. Depuis, l’usage de la cigarette s’est répandu dans le monde entier à une échelle colossale, puisqu’un adulte sur trois, soit 1,1 milliard de personnes, fume. Sur ce nombre, les quatre cinquièmes environ vivent dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Compte tenu de la croissance démographique et de l’augmentation prévisible de la consommation, le nombre de fumeurs atteindra quelque 1,6 milliard d’ici à 2025 (Banque mondiale). L’épidémie du tabagisme est incontestablement une des plus grandes calamités pour la santé des populations du monde. Si la contribution du tabac envers la maladie et la mort est bien connue, une attention moindre est portée sur la manière dont le tabac accroît la pauvreté. Niger : un quart des revenus des travailleurs manuels part en fumée Les plus gros consommateurs de tabac sont les pauvres et les très pauvres. Au niveau national, la consommation de tabac varie en fonction des groupes socioéconomiques. Dans de nombreux pays, Inoussa Saouna Secrétaire permanent Observatoire du Tabac en Afrique francophone, OTAF Niamey - Niger Email : [email protected] 22 indépendamment du stade de développement et du niveau de revenu, la consommation de tabac est nettement plus élevée chez les pauvres pour lesquels les répercussions économiques et sanitaires du tabagisme sont particulièrement lourdes. Ainsi une étude réalisée en 1997 sur la prévalence du tabagisme chez les hommes de Chennai (Inde) a montré que le taux le plus élevé de fumeurs (64 %) se trouve chez les analphabètes. Cette prévalence décroît en fonction du nombre d’années de scolarisation, jusqu’à atteindre un cinquième (21 %) chez les personnes qui ont suivi plus de 12 années d’études (Gajalakshmi, 2000). Au Royaume-Uni, la proportion de fumeurs dans le groupe socioéconomique le plus élevé est à peine de 10 % pour les femmes et 12 % pour les hommes alors qu’elle est de 35 % chez les femmes et 40 % chez les hommes du groupe socio-économique le plus bas (UK Department of Health, 1998). Au Niger, les étudiants consacrent 40 % de leur revenu à l’achat des cigarettes et les travailleurs manuels dépensent 25 % de leur revenu (Tabac et pauvreté au Niger). Au Népal, le tabac représente près de 10 % des dépenses annuelles mensuelles des ménages dans les catégories les plus défavorisées (Karki et al., 2003). Un paquet de cigarettes = 5 kilos de riz quotidienne sur les maigres ressources familiales. Par exemple, pour l’achat d’un paquet de cigarettes blondes ou dites américaines, le fumeur pourrait acheter un kilo de poisson au Ghana, 24 œufs au Pakistan et 5 kilos de riz en Chine et assurer les repas familiaux d’une journée au Niger. Les sans-abri en Inde dépensent plus pour le tabac que pour la nourriture, l’éducation ou l’épargne. Les fumeurs vietnamiens dépensent en cigarettes l’équivalent d’une fois et demie de leur budget annuel familial d’éducation et 5 fois leur budget annuel de santé. La conjonction de plusieurs facteurs tels que l’inaction des pouvoirs publics, les difficultés d’accès à l’information concernant les modes de vies sains, les publicités alléchantes en faveur du tabac qui s’adressent à l’ensemble de la population et, en bout de chaîne, la dépendance à la nicotine, fait que les personnes défavorisées dépensent leur argent pour les produits du tabac plutôt que pour la satisfaction de leurs besoins essentiels. Pour les ménages les plus défavorisés les dépenses pour le tabac peuvent être à l’origine d’une malnutrition. Le taux de la malnutrition étant très élevé dans les pays pauvres, la commercialisation agressive des produits du tabac dans ces Mots clés Chez les pauvres, l’argent dépensé quotidiennement pour se procurer du tabac représente une ponction •tabac •pauvreté •pays en développement IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tabac en Afrique francophone pays constitue un obstacle sérieux au développement. Ainsi il ressort d’une étude réalisée au Bangladesh que les 10,5 millions de personnes souffrant actuellement de malnutrition pourraient bénéficier d’un régime alimentaire adéquat si l’argent quelles utilisent pour acheter des produits du tabac était consacré à l’achat de nourriture (Efroymson et al., 2001). Au Niger, les ménages les plus pauvres dépensent environ 8 fois plus pour le tabac que pour l’éducation de leurs enfants. Il faut noter que le Niger détient le taux le plus faible de scolarisation des enfants au monde. 500 000 décès prématurés en Chine Mais le tabagisme n’affecte pas que les ménages ; très souvent il appauvrit aussi les états. De nombreux pays sont des importateurs de feuilles de tabac et de produits du tabac et perdent par conséquent des millions de dollars de devises par an. En 2002, deux tiers des 161 pays étudiés importaient plus de feuilles de tabac et de produits du tabac qu’ils n’en exportaient. Dix-neuf pays affichaient un déficit commercial des produits du tabac dépassant US$ 100 millions, notamment le Cambodge, la Fédération de Russie, la Malaisie, le Nigéria, la République de Corée, la Roumanie et le Vietnam. Seul 17 des 125 pays exportateurs de feuilles de tabac réalisent plus de 1 % de leurs recettes totales d’exportation grâce à cette activité, et dans seulement cinq de ces pays (Malawi, Ouganda, République-unie de Tanzanie, République centrafricaine et Zimbabwe), les exportations de feuilles de tabac rapportent plus de 5 % du total des recettes d’exportation. D’autre part, la consommation de tabac provoque d’importantes pertes économiques, compte tenu du coût élevé des soins de santé et de la perte de productivité inhérente aux maladies et aux décès prématurés liés au tabagisme. Dans les pays à revenu élevé, on estime que le coût global annuel des soins de santé attribués au tabagisme se situe entre 6 et 15 % de l’ensemble des frais de soins de santé. Une étude réalisée au milieu des années 90 en Chine où le tabagisme est en augmentation, a démontré que les coûts sanitaires directs et indirects liés au tabagisme s’élèvent à US$ 6,5 milliards par année (Jin et al., 1995). En 1998, environ 514 100 chinois sont morts prématurément de maladies liées au tabagisme, ce qui représente une perte de productivité équivalant à 1 146 millions années-personnes (Jiang & Jin, 2000). En Egypte, on estime que le coût annuel direct du traitement des maladies liées au tabagisme s’élève à US$ 545,5 millions (Nassar, 2003). Si les tendances actuelles se poursuivent, environ 650 millions de personnes vivantes aujourd’hui seront tuées par le tabac, la moitié dans leurs années les plus productives, perdant ainsi 20 à 25 ans de vie (Jha & Chaloupka, 1999). Lorsque les fumeurs s’arrêtent de fumer ou diminuent leur consommation, l’argent précédemment consacré au tabac peut être consacré à l’achat d’autres biens ou services, générant ainsi une demande qui permet de créer de nouveaux emplois dans tous les secteurs d’activité. Les pays qui importent d’importantes quantités de tabac et de cigarettes pourraient ainsi bénéficier de la baisse de consommation car ils pourraient consacrer ces dépenses à l’achat de biens et services de production intérieure. Le Bangladesh par exemple, qui importe la quasi totalité de ses cigarettes, réaliserait des bénéfices si la consommation de cigarettes diminuait. Selon nombre d’études, dans la majorité des pays dépendant fortement de la culture du tabac, il n’y aurait pas de pertes nettes d’emplois et le marché de l’emploi pourrait même progresser si la consommation mondiale de tabac baissait. Le bilan net au niveau des statistiques de l’emploi dépendrait alors du type de dépenses, selon qu’elles se reportent sur des biens et services exigeant plus ou moins de main-d’œuvre. Par ailleurs, la fabrication des produits issus du tabac génère peu d’emplois, étant le plus souvent très mécanisée. Dans la plupart des pays, le nombre d’emplois liés à la fabrication de produits du tabac est loin d’atteindre 1 % du total de l’emploi manufacturier. Par ailleurs, à l’exception de quelques rares pays dépendant fortement du tabac, la culture du tabac ne génère qu’un faible nombre d’emplois dans le secteur agricole. Ainsi par exemple, en Chine, plus gros producteur de tabac au monde, seuls IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 quelque 3 % des agriculteurs cultivent du tabac, et cette activité ne correspond qu’à environ 1 % de l’ensemble de la production agricole (Hu & Mao, in press). Au Brésil, autre producteur important, le tabac n’emploie que 1,9 % de l’ensemble de la main-d’œuvre agricole et 0,44 % de la main-d’œuvre totale. Une industrie très rentable La production mondiale de tabac est en pleine expansion, en particulier dans les pays en développement, où elle a augmenté de 128 % entre 1975 et 1998. Plus de 100 pays cultivent maintenant du tabac. Cette augmentation massive encouragée et dans certains cas financée par l’industrie du tabac - a favorisé une instabilité des prix mondiaux du tabac, qui ont diminué de 37 % en valeur réelle entre 1985 et 2000 (Jacobs et al., 2000). Pendant ce temps, les compagnies de tabac mettent au point des procédés qui leur permettent d’utiliser moins de tabac par cigarette et de recycler les balayures récoltées sur le sol des manufactures de tabac, ainsi que les tiges, poussières de feuilles et autres déchets auparavant éliminés, qui sont utilisés pour remplir les cigarettes. En ajoutant des arômes et d’autres produits chimiques à cette substance pour en atténuer le goût trop prononcé, les compagnies peuvent ainsi utiliser les parties de la feuille de tabac de moindre qualité en plus grande quantité (Glass, 2001). Une autre initiative déterminante qui a été adoptée par 1’industrie du tabac est la mécanisation accrue de la fabrication des cigarettes. Les nouvelles machines permettent de produire jusqu’à 840 000 cigarettes par heure, rendant ainsi inutiles de nombreux postes de travail (www.brownandwilliamson.com). Les progrès technologiques entraînent des suppressions d’emplois dans tous les secteurs de l’industrie. Même si elles représentent un faible pourcentage de leurs dépenses globales, ces économies ont indiscutablement contribué aux bénéfices sans précédent enregistrés par l’industrie du tabac. En 2002, les revenus totalisés par les trois plus grandes multinationales du tabac au monde : Japan Tobacco, Philip Morris Altria et BAT, dépassaient US $121 milliards. Ce montant est supérieur à la somme des PIB de l’ensemble des pays 23 suivants : Albanie, Bahrein, Bélize, Bolivie, Botswana, Cambodge, Cameroun, Estonie, Géorgie, Ghana, Honduras, Jamaïque, Jordanie, Macédoine, Malawi, Malte, Moldavie, Mongolie, Ouganda, Namibie, Népal, Paraguay, Sénégal, Tadjikistan, Togo, Zambie et Zimbabwe (Philip Morris, 2003). Aucune information pour les fumeurs des pays pauvres L’usage des cigarettes prend des proportions inquiétantes dans les pays en développement notamment en Afrique. Dans les pays industrialisés, les pouvoirs publics — avec la publication des résultats des recherches ayant établi la dangerosité du tabagisme et sous la pression des ONG et des médias — s’organisent pour contrer l’avancée du tabagisme. L’industrie du tabac, acculée donc dans les pays du Nord, a pris pour cible ceux du Sud où le grand vide organisationnel et juridique est propice à ses activités, compte tenu de la jeunesse et l’ignorance des populations. La plupart des fumeurs ne connaissent pas tous les risques qu’ils encourent ou n’en assument pas le coût intégral. Dans ces conditions les pouvoirs publics peuvent et doivent intervenir, pour contrecarrer l’entrée dans le tabagisme des enfants et des adolescents et pour protéger les non-fumeurs, mais aussi pour donner aux adultes les informations dont ils ont besoin afin de faire un choix éclairé. En effet, le caractère dramatique des conséquences du tabagisme rend indispensable la conception et la mise en œuvre de mesures visant à limiter autant que possible cette catastrophe. Dans cette optique, les Etats ont un rôle primordial à jouer : ils doivent prendre des mesures pour réduire la demande et l’offre, interdire la publicité, informer les populations, impliquer les ONG dans tous les programmes de lutte antitabac. L’industrie du tabac disposant d’une organisation ainsi que de moyens techniques et financiers très importants, la combinaison des efforts s’avère être la seule stratégie capable de la contrer. A ce titre, la Convention cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) de l’OMS adoptée le 21 mai 2003 par l’Assemblée mondiale de la Santé constitue la référence d’inspiration la plus adéquate. Références Banque Mondiale, Maîtriser l’épidémie du tabagisme, Chapitre 1 ; p. 13 Efroymson D et al. Hungry for Tobacco: An analysis of the economic impact of tobacco on the poor in Bangladesh. Tobacco Control 2001, 10 :212-217. Gajalakshmi GK et al. Global Patterns of Smoking and Smoking-Attributable Mortality. Tobacco Control in Developing Countries. Oxford University Press, 2000. Glass C. Paper Tobacco. Tobacco Reporter. August 1998. For a full discussion of these technological innovations, see: The Campaign for Tobacco Free Kids, Golden Leaf, Barren Harvest: The Costs of Tobacco Farming. Washington, DC, 2001 Hu T and Mao Z. Tobacco Farming and Government Policies in China. World Bank Discussion Paper, forthcoming. 24 Jacobs R et al the Supply-Side Effects of Tobacco Control Policies. In : JHa and Chaloupka, eds Tobacco Control in developing Contries, Oxford Univesty press 2000 Environnemental Sciences, 1995, 8, 342–9. Jha P., Chaloupka FJ. Curbing the epidemic: Governments and the economics of tobacco control. Washington, D.C, World Bank, 1999. Prabhat Jha, Chaloupka FJ. Curbing the epidemic: Governments and the economics of tobacco control. Washington, D.C, World Bank, 1999. Nassar H. The economics of tobacco in Egypt, A New Analysis of Demand. HNP Discussion Paper , Economics of Tobacco Control Paper No. 8, March 2003. Jiang Y, Jin S. Social economic burden attributed to smoking in China, 1998. Paper presented at the National Conference on Policy Development of Tobacco Control in China in the 21st Century , Beijing, 29–31 May 2000; and: Hu TW and Z. Mao. Effects of cigarette tax on cigarette consumption and the Chinese economy. Tobacco Control, 2002; 11: 105–108 Jin S et al. An Evaluation on Smoking-induced Health Costs in China (1988–1989). Biomedical And Karki YB et al. A Study on the Economics of tobacco in Nepal. HNP Discussion paper, N° 13 October 2003. Philip Morris-Altria, BAT and Japan Tobacco 2002 Annual Reports. Washington, D.C, World Bank, World Development Indicators, July 2003 Tabac et Pauvreté au Niger, SOS Tabagisme-Niger, Niamey 2003. United Kingdom Department of Health. Smoking Kills: A white paper on tobacco. London: The Stationary Office. 1998. Disponible sur: http://www.archive.officialdocuments.co.uk/document/cm41/4177/contents.htm www.brownandwilliamson.com IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Étude de cas Corné Van Walbeek Le contrôle du tabac en Afrique du Sud De nombreuses recherches ont été menées sur l’impact du tabagisme sur la santé et le sujet est aujourd’hui bien connu.1 Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, chaque année, environ 5 millions de personnes meurent de maladies liées au tabagisme. D’après les estimations, ce nombre atteindrait les 10 millions d’ici 2030 (tel que rapporté par la Banque Mondiale en 1999). Ces vingt dernières années, la consommation de tabac a diminué dans les pays industrialisés mais a augmenté dans les pays en voie de développement, transférant ainsi pour l’avenir le poids de la mortalité et de la morbidité attribuables au tabac vers les pays en développement. Dans un tel contexte, il n’est pas surprenant que l’Organisation Mondiale de la Santé ait lancé la Convention cadre pour la lutte anti tabac. Ce traité, signé en 2003, oblige les pays signataires à imposer des mesures de contrôle du tabac telles que des restrictions sur la consommation sur les lieux publics ou sur la publicité et à augmenter les droits d’accises sur les produits de tabac. Plusieurs pays industrialisés, notamment les Etats-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle Zélande, ont été pionniers en matière de contrôle du tabac et sont parvenus à réduire la consommation par habitant de manière considérable ces vingt ou trente dernières années (Shafey, Dolwick et Guindon, 2003). La plupart des pays en voie de développement sont en retard par rapport aux avancées des pays industrialisés dans ce domaine. Certains de ces pays en voie de développement, comme la Thaïlande, le Bangladesh ou l’Afrique du Sud qui ont toutefois instauré certaines stratégies efficaces de contrôle du tabac, ont enregistré des progrès considérables en très peu de temps. Cet article examine brièvement l’expérience de l’Afrique du Sud dans ce Corné Van Walbeek Maître de conférences, École d’Economie Université du Cap, Afrique du Sud domaine et en souligne les leçons importantes dont les autres pays en voie de développement pourraient s’inspirer. Un peu d’histoire2 Les cigarettes sont sur le marché en Afrique du Sud depuis le début du XXe siècle, mais l’âge d’or pour les fabricants de cigarettes sud-africains se situe autour de la période entre 1948 et le début des années 90. Sous la direction de l’entrepreneur et de son fondateur, la compagnie de cigarettes Rembrandt (et ses filières à l’étranger Rothmans) est passée d’une petite entreprise familiale à l’une des plus grandes des cinq multinationales cigarettières du monde.3 Entre 1960 et 1990, la consommation totale de cigarettes a quadruplé et la consommation par habitant doublé. De vastes campagnes de publicité et l’acceptabilité sociale du tabac, ont contribué à la représentation du tabagisme comme une activité normale et plaisante. Mises à part quelques campagnes d’éducation inefficaces dans certaines écoles, le gouvernement n’avait pratiquement pris aucune initiative pour réduire le tabagisme. En Afrique du Sud, la communauté médicale réclamait dès les années 60 des mesures de contrôle du tabac (Oettlé, 1963). Toutefois, le gouvernement n’a pris des mesures qu’au début des années 90 en adoptant une législation interdisant le tabagisme dans les transports en commun et en introduisant des avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes. Ces interventions législatives bien que modestes, marquaient avant tout un schisme dans la relation très proche qui avait existé auparavant entre l’industrie du tabac et le gouvernement. Le vrai grand changement dans la politique sud-africaine en matière de contrôle du tabac date de 1994, lors des premières élections démocratiques du pays avec la montée du parti du Congrès National Africain. Alors que le parti sortant nourrissait des relations très cordiales avec l’industrie du tabac et se montrait très hésitant dès qu’il s’agissait d’adopter des mesures de contrôle du IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 tabac, le nouveau parti au pouvoir est à l’origine des changements considérables. Le nouveau gouvernement s’est concentré sur les soins de santé préventifs et primaires, plaçant ainsi le contrôle du tabac en haut de la liste des priorités. Deux mois après son accession au pouvoir, le gouvernement a annoncé qu’il augmenterait progressivement sur quelques années les droits d’accises sur les cigarettes, qui passeraient de 20 % à 50 % du prix au détail. Lors de sa déclaration, le Ministre des Finances a précisé que la raison principale d’une telle hausse des droits d’accises était de dissuader de fumer (Budget Révision budgétaire 1994). Cependant, tel qu’indiqué plus bas, cette hausse des taxes a eu également un impact très positif sur les revenus du gouvernement. La hausse a rendu les produits du tabac moins abordables. En fait, entre 1993 et 2003, le prix réel (c’est à dire soumis à l’index) des cigarettes a augmenté de 115 %. Le deuxième grand changement dans la stratégie sud-africaine en matière de contrôle du tabac date de 1998, lorsque le Ministre de la Santé a proposé d’interdire tout sponsoring ou publicité pour le tabac, et de rendre tout espace public et lieu de travail non-fumeur. Cette proposition a suscité l’indignation des industries du tabac et de la publicité. Les opposants ont brandi la menace de conséquences économiques désastreuses. Ils accusaient la loi interdisant la publicité pour le tabac d’être une atteinte à la liberté d’expression. De plus, ils lui reprochaient d’être inadaptée et inapplicable à un pays en voie de développement tel que l’Afrique du Sud. Les défenseurs de la loi quant à eux ont soutenu que le droit à la santé et à la vie passait avant les droits économiques de l’industrie du tabac. Sur la question de l’interdiction de la publicité pour le tabac, les défenseurs soulignaient le caractère trompeur Mots clés •contrôle du tabac •Afrique du Sud •ressource de santé publique 25 inhérent à la publicité pour le tabac. Les partisans de la loi avançaient également que les magazines avaient peur de publier des articles sur les méfaits du tabagisme craignant que l’industrie du tabac réagisse contre eux et retire ses publicités. Après un long débat, des actions en justice sur le caractère constitutionnel de la proposition de loi et des menaces d’autres poursuites, la loi a finalement été adoptée en 1999 et est entrée en vigueur en 2001. Contrairement aux prédictions de l’industrie du tabac, cela n’a pas été la fin du monde. La loi s’applique largement d’elle-même. Alors qu’auparavant, les fumeurs avaient le droit de polluer l’air, la loi interdisant le tabagisme dans les lieux publics donne maintenant le droit aux non-fumeurs d’exiger un air sain. Aucune pression des forces de l’ordre n’a été nécessaire pour que ce changement de comportement s’opère. Ces interventions, cependant, du point de vue du contrôle du tabac ont elles fait la preuve de leur efficacité ? La réponse est un « oui » catégorique. La consommation globale de cigarette en Afrique du Sud a diminué d’un tiers depuis 1993. La consommation par habitant a, quant à elle, diminué de plus de 40 %. La réduction du tabagisme la plus rapide touche les hommes, les jeunes et les individus à faible revenu (Van Walbeek, 2002).4 Chez les femmes, les blancs et les groupes à revenu élevé, cette diminution a été beaucoup moins importante. D’un point de vue économétrique, il est difficile de discerner la part de la contribution précise de la hausse des taxes des interventions législatives sur la diminution de la consommation de cigarettes. L’évidence internationale indique clairement que la mesure la plus importante en matière de contrôle du tabac est la hausse des prix des cigarettes via l’augmentation des droits d’accises. (Chaloupka et Warner, 1999 et Chaloupka et al., 2000). La figure (1) montre de manière évidente la forte relation négative entre la consommation de cigarettes et le prix de celles-ci en Afrique du Sud. mesure est tellement coût-efficace qu’elle entraîne une hausse des revenus pour le gouvernement. En Afrique du Sud, les revenus fiscaux dérivés des taxes sur le tabac pour le gouvernement ont augmenté de près de 150 % entre 1993 et 2003 et ce malgré une diminution d’environ un tiers de la consommation de cigarettes. Les leçons à tirer de l’expérience sud-africaine L’importance cruciale du lobbying En Afrique du Sud, comme dans la plupart des pays, la lutte anti-tabac a été menée par la communauté médicale. Un petit groupe d’individus du Conseil sur la Recherche Médicale et du Conseil National contre le Tabagisme s’est assuré que le public et les législateurs gardent la question du contrôle du tabac à l’esprit. Les deux qualités indispensables d’un bon lobbyiste sont la patience et la persévérance. Pendant des années, dans les années 80, le gouvernement sudafricain a refusé de tenir compte de l’avis du lobby anti-tabac alors que les mesures de contrôle du tabac auraient pu jouir d’un soutien public important. Pour un lobby efficace, il est nécessaire de s’appuyer sur de la recherche claire et focalisée. Les législateurs sud-africains n’ont pris la question du tabagisme au sérieux qu’après l’exposé de résultats de recherche rigoureux et crédibles qui montrait clairement que les dépenses Figure 1 engendrées par le tabac dépassaient largement les bénéfices. Une approche multidisciplinaire de la recherche en matière de contrôle du tabac a été nécessaire. Si la recherche épidémiologique est importante pour présenter la mortalité et morbidité liées au tabagisme, une approche complète doit également inclure les aspects économiques du contrôle du tabac. En Afrique du Sud, l’industrie du tabac s’est opposée à la législation sous prétexte qu’elle est source importante d’emploi et contribue largement aux revenus du gouvernement. Afin de contrecarrer de telles revendications, les défenseurs de la loi ont du s’appuyer sur des preuves économiques scientifiques. La hausse des taxes est particulièrement efficace pour réduire la consommation de tabac Dans beaucoup pays, les taxes représentent une proportion assez importante du prix de vente des cigarettes. En augmentant les taxes, le gouvernement fait augmenter le prix des cigarettes, entraînant ainsi une réduction de la demande pour le produit. En Afrique du Sud, on estime l’élasticité des prix de la demande en cigarettes entre –0,6 et –0,8 (Van Walbeek, 1996, Van der Merwe et al., 1998 et ETCSA, 2003). Cela signifie qu’une hausse de 10 % du prix des cigarettes en Afrique du Sud réduit la demande de 6 à 8 %, maintenant d’autres facteurs tel que le revenu Tendances dans la consommation de cigarettes, prix réels et taxes d’accises Selon les économistes spécialistes du contrôle du tabac, une hausse des taxes d’accise sur le produit est de loin l’intervention la plus coût-efficace (Chaloupka et al., 2000). En fait, cette 26 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Étude de cas constant. Pour la plupart des autres pays en voie de développement, on estime que l’élasticité du prix se situe entre –0,4 et –0,8, ce qui rend l’augmentation des taxes très intéressante comme option dans les mesures de contrôle du tabac.(Chaloupka, et al., 2002). Une hausse des taxes implique une augmentation des revenus du gouvernement et ce malgré la diminution de consommation en tabac qu’elle engendre. Ces résultats ont été confirmés pour tous les pays (Van der Merwe et al., 1998). L’argument typique de l’industrie du tabac pour contrer l’augmentation des taxes est que celle-ci pousserait à la contrebande de cigarettes. L’éventualité de la contrebande doit être prise en compte mais l’expérience sud-africaine a montré que l’industrie avait largement surestimé l’étendue de cette menace. Il est sûr que pour certains pays, le risque de contrebande à grande échelle est plus élevé. Cependant, la leçon retenue de l’expérience sud-africaine est qu’il faut toujours garder à l’esprit que l’industrie du tabac a tout intérêt à formuler de tels commentaires sur la question. Dans de nombreux pays, les taxes sur les cigarettes sont prélevées en tant que taxes spécifiques (càd une certaine somme par paquet de cigarettes) plutôt qu’un pourcentage du prix. Dans les périodes d’inflation relativement importante, la valeur réelle de la part spécifique des taxes peut facilement diminuer si le montant de la part spécifique des taxes n’est pas régulièrement ajustée. En Afrique du Sud, la valeur réelle des taxes sur la cigarette a diminué de 70 % entre 1970 et 1990 parce que la hausse de la taxe nominale ne suivait pas le taux d’inflation (voir figure 1). La leçon à en tirer est que la part spécifique des taxes, doit être régulièrement ajustée, surtout dans les périodes d’inflation modérée et importante. Le rôle de la législation pour une stratégie complète et efficace de contrôle du tabac Dans la littérature, personne ne remet en question l’efficacité de l’augmentation des taxes comme stratégie efficace pour le contrôle du tabac. Cependant, les preuves économétriques de l’efficacité d’autres interventions pour le contrôle du tabac telles qu’une législation interdisant la vente de tabac aux mineurs, le tabagisme dans les lieux publics ou la publicité pour le tabac, ne sont pas aussi claires (Chaloupka et Warner, 1999). Cela ne veut pas dire qu’une législation pour le contrôle du tabac n’a pas sa place dans la stratégie. Cela signifie seulement que l’impact d’une législation sur la consommation de tabac doit être quelque peu nuancée. Pendant plusieurs dizaines d’années, les campagnes publicitaires très efficaces de l’industrie du tabac ont présenté le tabagisme comme étant une activité normale et socialement acceptable, voire même « glamour ». Ce que fait la législation est qu’elle « dénormalise » et « déglamourise » le tabagisme. Un tel environnement « antitabac » confère à la hausse du prix de la cigarette un impact plus important pour ce qui est d’encourager les fumeurs à s’arrêter ou du moins à réduire leur consommation de tabac. Impliquer l’industrie dans le processus législatif Dans le courant des années 90, le gouvernement sud-africain a fait passer deux lois pour le contrôle du tabac : le Tobacco Products Control Act de 1993 et l’Amendment Act de 1999. En ce qui concerne la loi de 1993, le Ministre de la Santé a impliqué l’industrie du tabac dans la rédaction du texte. Compte tenu des relations historiquement très étroites entre le gouvernement et l’industrie du tabac, il était difficile pour le Ministre de ne pas impliquer l’industrie du tabac dans le projet de loi. Cela a permis à l’industrie de freiner l’adoption de la loi, d’en affaiblir sa portée de manière assez importante et d’en exploiter au maximum les failles.5 En revanche, lors du débat sur l’Amendment Bill en 1998, la Ministre de la Santé a largement laissé l’industrie du tabac à l’écart. Malgré les supplications de celle-ci pour une législation «sensée» et «raisonnable» et pour prendre part au processus législatif, ses appels ont été largement ignorés par la Ministre. Ayant tiré les leçons de l’expérience vécue par son prédécesseur, la Ministre s’est assurée que la législation soit la plus robuste possible.6 Souvent accusée dans la presse d’être autocrate et de bafouer la démocratie, en réalité la Ministre a réussi à élaborer une loi beaucoup plus robuste et efficace que ses prédécesseurs, quelques années auparavant. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 L’industrie du tabac ne sera jamais un partenaire constructif dans le combat contre le tabac. L’efficacité des stratégies de contrôle et les intérêts commerciaux de l’industrie du tabac sont totalement opposés par nature et ce malgré le discours tenu par l’industrie affirmant qu’elle souhaite s’engager dans un partenariat constructif dans le processus législatif. La législation de contrôle du tabac s’applique largement d’elle-même En Afrique du Sud, lors des débats sur la législation en 1998, l’industrie du tabac avançait que celle-ci poserait un poids énorme sur les forces de l’ordre. Selon l’industrie, la police passerait son temps à arrêter des fumeurs laissant de côté et s’échapper de grands criminels. La réponse des défenseurs de la loi est qu’une telle législation ne nécessiterait pas une intervention accrue des forces de l’ordre. Trois ans plus tard, avec le recul, il est clair que les partisans de la loi avaient raison. Le tabagisme dans les lieux publics est devenu quelque chose de socialement inacceptable et pratiquement tous les fumeurs observent la loi. De manière décisive, la législation représente une évolution : du droit de fumer au droit de respirer un air sans fumée. En Afrique du Sud, comme dans la majorité des pays, très peu de fumeurs s’aventureront à fumer dans un espace non-fumeur lorsqu’on leur fera remarquer. Conclusion L’Afrique du Sud a connu de grands changements dans les dix dernières années. Dans le domaine du contrôle du tabac, le pays a décidé de garder une position ferme face à l’influence et le pouvoir de l’industrie du tabac. Cela n’a pas été une tâche aisée et nécessite toujours une volonté politique importante venant du gouvernement et du Ministère de la Santé en particulier. Cependant, les avantages de cette stratégie sont évidents. La consommation de tabac en Afrique du Sud a chuté de façon dramatique. Fumer n’est plus aussi prisé aux yeux d’une grande partie de la population. La montée constante du tabagisme a été efficacement enrayée. Il est à espérer que cet article poussera les décideurs politiques d’autres pays en voie de développement à mettre en place des stratégies similaires afin de réduire le 27 tabagisme dans leur pays. La lutte contre le tabac peut être gagnée. L’ingrédient essentiel et primordial repose sur une volonté politique capable de mener au changement. 1. Le Rapport du Royal College of Physicians en 1962 et le Rapport du US Surgeon-General en 1964 furent les premiers rapports complets sur le lien existant entre le tabagisme et certaines maladies graves. Depuis 1964, le US SurgeonGeneral a publié pas moins de 29 rapports sur le tabagisme, plus que sur toute autre question médicale. Ceux-ci sont accessibles sur le site web http://www.cdc.gov/tobacco/sgr/index.htm. 2. Malan et Leaver (2003) et Van Walbeek (2004) proposent une histoire plus détaillée du tabac et du contrôle du tabagisme. 3. En 1999, Rothmans a fusionné avec le British American Tobacco (BAT). Aujourd’hui, environ 30 % des parts de BAT appartiennent à deux firmes sud-africaines nées de Rembrandt. 4. Cependant, il est important de faire remarquer que suite à cette hausse de la taxe sur la cigarette, certains ménages à faible revenu ont préféré l’option des cigarettes roulées (Van Walbeek, inédit). Ce changement de comportement a dans une certaine mesure amoindri les avantages en santé publique apportés par la hausse du prix de la cigarette. Mais comparé à il y a dix ans, l’impact net de la hausse se traduit par une diminution significative de la consommation de cigarettes (roulées ou pas) parmi les personnes. 5. Par exemple, des avertissements sur les risques de la cigarette sur la santé furent imposés dans les publicités pour le tabac ainsi que sur les paquets de cigarettes. Cependant, cette obligation ne comprenait pas les publicités-sponsor, considérées comme des exemples de «publicité indirecte». Comme on pouvait s’y attendre, le nombre d’événements sponsorisés par l’industrie du tabac s’est mis rapidement à grimper. 6. Par exemple, tout sponsoring a été interdit. Alors que certains voyaient cela comme une mesure draconienne, la manière d’agir de l’industrie du tabac par le passé laissait bien présager qu’elle utiliserait la faille du sponsoring pour faire la publicité de ses produits. Références Banque mondiale, 1999. Curbing the Epidemic : Governments and the Economics of Tobacco Control. Washington, D.C. : la Banque mondiale. Oettlé, AG, 1963. Cigarette smoking as the major cause of lung cancer. South African Medical Journal, 37 : 935-941. Chaloupka, FJ et Warner, KE, 1999. The economics of smoking. Dossier 7047, National Bureau of Economic Research, Cambridge, MA : NBER. République d’Afrique du Sud, 1994. Budget Review. Pretoria : Imprimé gouvernemental. Chaloupka, FJ, Hu, T, Warner, KE, Van der Merwe, R et Yurekli, A, 1999. “Chapter 10: The taxation of tobacco products”, dans Jha et Chaloupka (eds.). Tobacco Control in Developing Countries. New York : OUP : publié par Oxford University Press pour l’Organisation mondiale de la Santé et la Banque mondiale. Projet “Economics of Tobacco Control in South Africa” (ETCSA), 2002. The tobacco epidemic can be reversed: Tobacco control in South Africa during the 1990s. Le Cap : Centre de Recherche fiscale appliquée. Gajalakshmi, CK, Jha, P, Ranson, K et Nguyen, S, 2000. “Chapter 2: Global patterns of smoking and smoking-attributable mortality” dans Jha and Chaloupka (eds.). Tobacco Control in Developing Countries. New York : OUP : publié par Oxford University Press pour l’Organisation mondiale de la Santé et la Banque mondiale. Malan, M et Leaver, R, 2003. “Political change in South Africa : New tobacco control and public health policies”, dans De Beyer, J et Waverley Brigden, L, Tobacco control policy: Strategies, successes & setbacks. Washington et Ottawa : Copublication de la Banque mondiale et de la Recherche pour un Contrôle international du Tabagisme. Shafey, O, Dolwick, S et Guindon, GE, 2003. Tobacco control country profiles. American Cancer Society, Organisation modiale de la Santé et Union internationale contre le Cancer. Van der Merwe, R et Annett, N, 1998. “Chapter 4 : The effects of taxation on consumption in South Africa”, dans ETCSA, The Economics of Tobacco Control in South Africa, rapport soumis à l’International Tobacco Initiative, École d’Economie, Université du Cap. Van Walbeek, CP, 1996. Excise taxes on tobacco: how much scope does the government have? South African Journal of Economics, 64(1) : 20-42. Van Walbeek, CP, 2002. Recent trends in smoking prevalence in South Africa: Some evidence from AMPS data. South African Medical Journal, 92(6). Van Walbeek, CP, 2004, forthcoming. Tobacco control in South Africa in the 1990s: a mix of advocacy, academic research and policy. South African Journal of Economic History. Van Walbeek, CP, prochainement publié. Do tax increases on tobacco hurt the poor? Chapitre d’une thèse en médecine qui sera prochainement publiée Neil Collishaw La conquête des lieux non-fumeur se heurte aux tactiques de l’industrie du tabac : désinformation scientifique et groupes de front. L’expérience canadienne En 1978 déjà, l’industrie du tabac était consciente de la menace que représentait la question du tabagisme passif pour sa viabilité économique et sa survie. Cette année-là, un sondage d’opinion publique mené par la Roper Organization à la demande de l’industrie du tabac faisait le constat suivant : Neil Collishaw Directeur de recherches Physicians for a Smoke-Free Canada Ottawa Canada 28 « La dernière tactique des forces anti-tabac concernant la question du tabagisme passif pose cependant un autre problème. … Nous le voyons comme le développement le plus dangereux qui ait jamais pu porter atteinte à la viabilité de l’industrie du tabac. »1 Ayant pris cette menace au sérieux, pendant un quart de siècle, l’industrie du tabac s’est attelée secrètement et avec efficacité à déjouer dans le monde entier les mesures de santé publique en matière de tabagisme passif. Voici, à la dérobée, l’histoire de leur campagne au Canada. Mais cette histoire permet également de comprendre un peu mieux pourquoi le contrôle du tabagisme passif (une mesure de santé qui, au premier abord, semble plutôt simple à mettre en place) s’avère être une tâche bien compliquée. Mots clés •tabac •tactiques de l’industrie •désinformation scientifique IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Pratiques manipulatrices Aujourd’hui, 21 % des Canadiens vivent dans des juridictions où la quasi-totalité des lieux de travail, y compris les bars et restaurants, sont non-fumeur.2 Ce nombre grandit de jour en jour mais très lentement et à chaque étape du processus, c’est un véritable combat auquel doivent se livrer les pouvoirs de la santé publique, ville après ville, province après province. Les méfaits du tabac sur la santé sont bien connus, près des trois quarts de la population canadienne sont en faveur de lieux de travail et endroits publics non-fumeur et les études économiques ont à maintes reprises démontré les bénéfices de telles restrictions sur le business. Comment se fait-il alors que ces mesures pleines de bon sens connaissent une opposition aussi féroce, et surtout, d’où émane cette opposition ? Aujourd’hui, nous avons la réponse. Des documents jusque-là gardés secrets par l’industrie du tabac montrent qu’entre 1995 et 1998, l’industrie du tabac canadienne aurait mené des campagnes très bien organisées et accompagnées de financements substantiels pour endiguer le flot de restrictions pour le contrôle du tabac dans les lieux de travail et autres endroits publics3 en avançant fréquemment une solution «d’accommodation», solution depuis bien longtemps discréditée dans sa manière de répondre au problème.4 Ces campagnes étaient menées dans l’ombre et de manière très rusée, par le biais de groupes de front, issus principalement de l’industrie hôtelière. L’industrie du tabac, alors qu’elle tirait toutes les ficelles, restait totalement invisible, derrière le rideau. Voici quelques exemples des méthodes utilisées, recueillis dans les documents appartenant à l’industrie. 1995 Le Conseil Canadien des Fabricants de Tabac (Canadian Tobacco Manufacturers’ Council) (CTMC) fait appel à la firme de relations publiques Barr, Gass and Wilcox, en Colombie Britannique, dans le but de recruter des groupes de front dont le rôle sera d’exprimer une opposition face à la proposition d’interdiction de fumer dans les restaurants de Vancouver. L’extrait suivant, issu d’une circulaire internationale de l’industrie du tabac, donne un aperçu de la manière dont ses agents s’arrangeaient pour orchestrer une opposition de derrière le rideau via différentes couches d’intermédiaires mais tout en gardant un contrôle total sur les actions entreprises. Le mot « personnel » dans l’extrait fait référence au personnel de Barr, Gass and Wilcox, la firme de relations publiques à qui la CTMC avait confié la tâche de renchérir sur l’industrie du tabac. « Plus de 60 restaurants chinois dans la partie inférieure du continent ont signé la déclaration d’opposition préparée par Chinese Informedia Consulting. Cette opposition sera probablement rendue publique lors d’une conférence de presse prévue pour le 27 juillet (sous réserve des considérations stratégiques pouvant voir le jour et de l’appréciation du personnel concernant la manière dont l’événement aura été organisé par Chinese Informedia). Le personnel ne jouera aucun rôle ouvert lors de la conférence et l’initiative devra apparaître comme émanant de la communauté chinoise uniquement. »5 1998 Des réunions secrètes sont organisées afin de planifier des campagnes contre les interdictions de fumer. Voici un extrait issu d’une circulaire interne de la CTMC, parue le 26 mai 1998, examinant l’organisation d’une réunion secrète pour juin 1998. « De l’avis général, il semble qu’une meilleure coordination de certains acteurs clés dans le combat contre le contrôle du tabac en Amérique du Nord soit nécessaire. ... Les parties prenantes de l’industrie hospitalière ne seront pas invitées à prendre part à cette réunion. Il nous faut d’abord nous organiser ; l’occasion/le besoin de rencontrer ces groupes se fera peutêtre sentir plus tard mais il est probablement moins risqué de faire parvenir l’information aux groupes hospitaliers via leurs collègues travaillant derrière le rideau. »6 Cette pratique de l’industrie du tabac qui consiste à travailler par le biais d’intermédiaires est toujours d’actualité. En 2004, au moins trois groupes de pression canadiens actifs s’opposant aux mesures de contrôle du tabac sont financés par l’industrie du tabac canadienne. Parmi ceux-ci, on trouve la Pub and Bar Coalition of Canada IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 (http://www.pubcoalition.com), la Fair Air Association of Canada (http://www.faac.ca/index2.htm) et My Choice (http://www.mychoice.ca). La création de lieux de travail nonfumeur est une mesure de santé publique robuste, mais elle est encore loin d’être acquise. Les habitants du Canada et de partout ailleurs dans le monde devront continuer à se battre pour la cause des espaces non-fumeur, et face à eux, ils trouveront l’industrie du tabac, agissant souvent dans l’ombre. Cependant, l’industrie du tabac commence lentement à perdre du terrain. De plus en plus de villes, de provinces et de pays ont trouvé le moyen de mettre en place cette mesure de santé publique de manière sensée, efficace et peu coûteuse : en faisant passer des lois rendant tous les lieux de travail et endroits publics non-fumeur. Les gens se rendent mieux compte des méthodes malsaines qui sont utilisées dans le but d’affaiblir les propositions destinées à améliorer la santé publique. Aujourd’hui, de plus en plus, ces méthodes sont dévoilées au grand jour, et ce sont la science et le bon sens qui triomphent sur les manipulations orchestrées dans l’ombre par l’industrie du tabac. 1. Étude sur l’attitude du public face au tabagisme et à l’industrie du tabac menée en mai 1978. The Roper Organization Inc. http://legacy.library.ucsf.edu/cgi/getdoc?tid=jdc70a00&fmt=p df&ref=results 2. Protection contre le tabagisme passif au Canada. Physicians for a Smoke-Free Canada, Octobre 2004. http://www.smoke-free.ca/factsheets/pdf/Q&Asmokefreecommunities.pdf 3. Derrière le rideau : comment les sociétés de tabac ont tenté d’utiliser des solutions de “ventilation” afin de contrecarrer les restrictions sur le tabagisme. Physicians for a Smoke-Free Canada, février 2002. http://www.smokefree.ca/documents/ventilation.htm 4. Neil Collishaw et Heidi Meldrum. Protection contre le tabagisme passif au Canada : Appliquer la science sanitaire à la loi sur la sécurité et la santé du travail.. Physicians for a Smoke-Free Canada. 2002. http://www.smoke-free.ca/Second-Hand-Smoke/200203%20Workshop%20CDROM/index.htm 5. Rapport hebdomadaire par Dirk Laudan, du Barr, Gass and Wilcox Group, pour David Small, CTMC, fin de semaine, 21 juillet 1995. http://www.smokefree.ca/documents/industrydocspdf/2065518282_8288-vanjul21-95.pdf 6. Circulaire CTMC par David Small pour l’Ops (CTMC Operations Committee), 26 mai 1998. http://www.smokefree.ca/documents/industrydocspdf/2065254987_4988-99ventilation-meeting.pdf 29 François Damphousse Stratégies de l’industrie du tabac : marketing des cigarettes auprès des jeunes « La compagnie de tabac Liggett reconnaît que l’industrie du tabac cible le marché des jeunes, ce qui signifie ceux ayant moins de 18 ans, et non seulement ceux âgés entre 18 à 24 ans. » (traduction libre) Cette déclaration étonnante est incluse dans un accord historique conclu le 20 mars 1997 entre la compagnie de tabac Liggett et les procureurs généraux des états américains (Attorneys General Settlement Agreement with Liggett, 1997). Cet accord est survenu à la suite du scandale déclenché en Amérique dans les années 1990 par la publication de nombreux documents confidentiels et des témoignages de plusieurs délateurs exposant les pratiques frauduleuses de l’industrie du tabac. Cette déclaration a créé tout un émoi dans les médias parce qu’il s’agissait d’une première : une compagnie de tabac admettait publiquement qu’elle visait délibérément les enfants avec ses campagnes publicitaires. Cette révélation est d’autant plus importante quand on sait que la grande majorité des fumeurs commencent à fumer avant d’avoir atteint l’âge adulte, fait qui n’a pas échappé à la vigilance de l’industrie du tabac (Banque mondiale, 2000). Une telle conduite est particulièrement ignoble compte tenu que toute société responsable cherche à protéger le plus possible ses jeunes parce qu’ils n’ont pas encore atteint la maturité pour prendre des décisions éclairées. Le lien entre publicité et initiation tabagique chez les jeunes est bien documenté. Par exemple, selon le rapport du Surgeon General des États- François Damphousse Directeur, bureau du Québec Association pour les droits des nonfumeurs Montréal, Canada Email : [email protected] Unis sur la prévention de l’usage du tabac parmi les jeunes publié en 1994, les campagnes publicitaires des compagnies de tabac s’attirent depuis de nombreuses années de sévères critiques de la part d’experts en communication. Ainsi, le président de la National Association of Broadcasters (États-Unis) a dénoncé dès 1963 une campagne pour les cigarettes Lucky Strike ciblant les garçons (U.S. Department of Health and Human Services, 1994). Il existe également de nombreux travaux de recherche démontrant l’influence de la publicité des produits du tabac sur les jeunes. Par exemple, une étude phare publiée en 1991 dans le Journal of the American Medical Association a démontré que le taux de reconnaissance du logo publicitaire Joe Camel, le personnage de bande dessinée faisant la promotion des cigarettes Camel, se situait à 91 % parmi des jeunes de six ans (Fischer et al., 1991), Ce taux était comparable à celui obtenu pour la célèbre souris Mickey du créateur Walt Disney. Une autre étude publiée en 1994 dans la même revue a révélé que la forte augmentation de l’usage du tabac chez les adolescentes à la fin des années 1960 correspondait au lancement de campagnes publicitaires ciblant plus spécifiquement les femmes (Pierce et al., 1994). Dans son livre intitulé Smokescreen, Philip Hilts, le célèbre correspondant du journal The New York Times, écrit que la plus importante preuve démontrant l’intérêt de l’industrie du tabac pour les jeunes provient des documents confidentiels de marketing des compagnies canadiennes du tabac (Hilts, 1996). Ces documents ont été obtenus durant le procès pour déterminer la légitimité constitutionnelle de la Loi réglementant les produits du tabac. Leur Mots clés •jeunes •stratégies marketing •tabac contenu ne laissait aucun doute en ce qui concerne les véritables intentions des compagnies de tabac. La Cour suprême du Canada a même écrit : « Bien que les appelantes [les fabricants] affirment résolument que leurs efforts de commercialisation sont orientés seulement vers la préservation et le renforcement de la fidélité des fumeurs adultes à des marques, ces documents témoignent du contraire. …les compagnies comprennent que, pour maintenir la taille de l’ensemble du marché, elles doivent rassurer les fumeurs actuels et rendre leurs produits attirants pour les jeunes et les non-fumeurs… » (RJRMacdonald Inc. c. Canada (Procureur Général, 1995) Références Attorneys General Settlement Agreement with Liggett, 1997. Banque mondiale. Maîtriser l’épidémie : L’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme. Washington, D.C., 2000. Fischer, P.M., Schwartz, M.P. Richards, J.W., Goldstein, A.O. and Rojas, T.H. Brand Logo Recognition by children Aged 3 to 6 Years. Mickey Mouse and Old Joe the Camel. Journal of the American Medical Association, 1991 ; 266(22) : 3145-8. Hilts, Philip J. Smokescreen: The Truth Behind the Tobacco Industry Cover-up. Reading: Addison-Wesley Publishing Company, Inc., 1996. Pierce, J.P., Lee, L. and Gilpin, E.A. Smoking Initiation by Adolescent Girls, 1944 Through 1988. An Association With Targeted Advertising. Journal of the American Medical Association, 1994 ; 271(8) : 608-11. RJR-Macdonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1995] U.S. Department of Health and Human Services. Preventing Tobacco Use Among Young People: A Report of the Surgeon General. Atlanta, Georgia : U.S. Department of Health and Human Services, Public Health Service, centers for Disease Control and Prevention, National Center for Chronic Disease Prevention and Health Promotion, Office on Smoking and Health, 1994. Ce jugement, d’autres encore, plus 30 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Pratiques manipulatrices récents, et de nombreux rapports font désormais état de la tendance vers un durcissement des mesures à l’égard de la publicité des produits du tabac. Sur le plan international, la Convention-cadre pour la lutte antitabac incitera également davantage de pays à introduire une interdiction globale de la publicité et de la commandite (sponsorship) du tabac. À notre avis, il s’agit de la seule voie que peut emprunter la communauté internationale si elle veut éventuellement éliminer toute possibilité à l’industrie du tabac d’atteindre les jeunes avec ces campagnes publicitaires attrayantes. Louis Gauvin La contrebande de cigarettes : un phénomène d’une ampleur considérable dont la seule raison d’être est de servir les intérêts des grands fabricants de tabac « Là où un gouvernement refuse d’intervenir ou lorsque ses efforts ne sont pas couronnés de succès, nous faisons en sorte que, à l’intérieur du cadre de la loi, nos marques (de cigarettes) soient accessibles aux côtés de celles de nos compétiteurs par voie de contrebande aussi bien que sur le marché légal. » (traduction libre) (nos soulignés) Kenneth Clarke, vice-président BAT, ex-ministre britannique de la Santé (Clarke, 2000). Cette déclaration surprenante faite par l’un des plus hauts dirigeants de British American Tobacco (BAT) confirme, une fois de plus, que son entreprise alimente le marché mondial de cigarettes, tout en sachant qu’une très forte proportion va se retrouver au marché noir. Ce cas n’est pas unique, bien au contraire. De nombreux rapports, se fondant sur le témoignage de dénonciateurs, la revue de documents secrets et les poursuites intentées contre des fabricants de tabac, révèlent que des compagnies auraient même méticuleusement supervisé les gestes d’intermédiaires depuis l’usine de fabrication et le choix des routes Louis Gauvin Coordonnateur Coalition québécoise pour le contrôle du tabac 4126, St-Denis, bureau 200 Montréal QC H2W 2M5 Tél. : (514) 598-5533 Fax : (514) 598-5283 Email : [email protected] Site Internet : www.cqct.qc.ca clandestines jusqu’à l’entrée illégale dans les pays visés (Campaign for Tobacco Free Kids ; Marsden, 1999). Ampleur de la contrebande, complicité de l’industrie du tabac L’ampleur du phénomène témoigne d’un problème très sérieux. La contrebande de tabac se déroule à l’échelle planétaire et elle ne repose ni sur de petits contrebandiers, ni sur des fumeurs qui cherchent à éviter de payer des taxes élevées. Ce sont environ 30 % de toutes les exportations – 355 milliards de cigarettes – qui disparaissent au profit du marché noir, en s’appuyant sur des organisations criminelles, des réseaux complexes de distribution et l’absence de contrôle des mouvements mondiaux de produits du tabac (Banque Mondiale, 2000). Ce pourcentage est beaucoup plus élevé que celui du marché illégal de la plupart des autres biens de consommation vendus sur les marchés internationaux. Les grands cigarettiers prétendent que la contrebande est le résultat des forces du marché – différences de prix entre pays limitrophes, prix trop élevé pour les consommateurs – et partout, ils prônent comme solution unique la baisse des taxes (Joossens & Raw, 2000). Tous les experts indépendants réfutent cette position. Ils affirment qu’il est impossible qu’une entreprise perde ainsi, et depuis des années, la trace du tiers de sa production sans la complicité de ses plus hauts dirigeants ! (Joossens, 2002). « Les compagnies canadiennes de tabac ont toujours prétendu qu’elles ne faisaient que vendre leurs cigarettes à des grossistes ou des courtiers autorisés pour honorer des IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 commandes qui leur étaient adressées. Quant à ce qui arrivait par la suite, elles le déploraient, mais (...) n’y pouvaient rien. TOUT CELA EST FAUX. En réalité, pendant des années, les trois grandes compagnies (canadiennes de tabac) ont mis sur pied des compagnies de façade ou signé des ententes secrètes avec des contrebandiers. (...) La contrebande n’était pas un à-côté à leurs affaires – C’EST FINALEMENT DEVENU LEUR PRINCIPALE AFFAIRE ! » Leslie Thompson, ex-responsable du commerce transfrontalier Canada/Etats-Unis pour RJR Macdonald (aujourd’hui JTI Macdonald) et condamné à sept années de réclusion pour activités de contrebande (Marsden, 1999). Conséquences dévastatrices Les conséquences de cette activité illégale sont proprement dévastatrices, principalement parce qu’il s’agit d’un produit hautement toxique qui cause le décès d’un fumeur sur deux et dont on devient dépendant à cause de la nicotine, dès l’âge de 8-9 ans dans de nombreux pays. Des cigarettes rendues ainsi moins chères augmentent le nombre de fumeurs et la quantité de cigarettes qu’ils fument, particulièrement chez les jeunes et les défavorisés.2 Trop souvent aussi, les cigarettes du marché noir minent les efforts des Mots clés •contrebande •prix du tabac •santé publique 31 gouvernements pour élaborer des politiques publiques de réduction du tabagisme, sans compter les baisses drastiques d’entrées fiscales qui devraient compenser, en partie, les coûts de santé attribuables au tabac. En somme, des pertes nettes pour les sociétés, mais des gains faramineux pour quelques privilégiés complices d’activités criminelles. Chercher à endiguer la contrebande concerne non seulement la lutte contre une activité criminelle, mais c’est aussi une question de santé publique. Lutter contre le commerce illégal des cigarettes Des pays comme le Canada, la Suède, l’Espagne et Andorre (Joossens & Raw, 2000) servis soit par une forte volonté politique, soit par des pressions internationales coordonnées, soit encore par la constitution de dossiers d’accusation produits devant des cours de justice, en sont venus à réduire, voire endiguer grandement le phénomène. Mais, le principal outil sur lequel comptent les gouvernements, organismes de santé et groupes opposés au tabagisme est, sans contredit, la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT). Adoptée à l’unanimité par tous les membres constituant l’Assemblée mondiale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le 21 mai 2003, il s’agit du premier traité international juridique et de santé publique destiné à réduire le tabagisme dans le monde. Les mesures vont de l’apposition de marques de reconnaissance sur les paquets de cigarettes et de mécanismes de contrôle pour suivre chaque expédition du fabricant au consommateur, à la surveillance accrue des frontières, l’imposition de sanctions appropriées et l’octroi de licences. En vertu de cette convention, chaque pays s’engage également à mettre en place des mesures d’élimination de toutes les formes de commerce illicites et encourage, pour ce faire, la coopération entre organisations internationales (OMS). Références Banque Mondiale Maîtriser l’épidémie : l’État et les aspects économiques de la lutte contre le tabagisme. Washington DC, USA, 2000. Campaign for Tobacco-Free Kids Illegal Pathways to Illegal Profits: The Big Cigarette Companies and International Smuggling. Washington DC, USA. Joossens, L. & Raw, M. “How can cigarette smuggling be reduced?”, British Medical Journal, Vol 321, 14 octobre 2000. Joossens, L. La contrebande internationale de tabac : face cachée des stratégies de marketing de l’industrie du tabac. Communication à la 1ère Conférence internationale francophone sur le contrôle du tabac (CIFCOT-1), Montréal, 16 septembre 2002. Marsden, W. “Tobacco insider talks major firms were deeply involved in cross-border smuggling, former executive says”. The Gazette, 18 décembre 1999, Montréal, Canada. OMS www.who.int/tobacco/fctc/text/en/fctc_fr.pdf. Francis Thompson La fraude du siècle : les cigarettes « légères » Les escroqueries les plus réussies misent généralement sur la complicité inconsciente des victimes. Le fraudeur avisé offre un moyen simple — trop simple — de réaliser les rêves des victimes, qui acceptent avec enthousiasme. Par la suite, ne voulant ni abandonner leurs rêves, ni s’avouer qu’on les a trompées, les victimes deviennent les alliés objectifs de l’escroc, fermant les yeux sur les petites irrégularités qui en cachent de plus grandes, acceptant les explications les plus farfelues qu’un observateur impartial rejetterait du revers de la main. Francis Thompson Analyste des politiques Association pour les droits des nonfumeurs Ottawa, Canada Email : [email protected] 32 C’est le mécanisme psychologique qui sous-tend la fraude des cigarettes dites « légères », « light » ou « douces », qui constitue sans doute une des escroqueries les plus réussies et les plus meurtrières des 30 dernières années. Du milieu des années 1970 jusqu’à tout récemment — un petit nombre de pays (Brésil, Union européenne) ayant maintenant interdit les appellations trompeuses — des centaines de millions de fumeurs ont délaissé leur marque habituelle et opté pour une « légère », en pensant réduire ainsi leurs risques de maladies. De ce nombre, il y a sans doute plusieurs millions qui auraient arrêté de fumer si on ne leur avait pas offert une solution mitoyenne qui leur paraissait crédible. avaient induits en erreur, les pouvoirs publics sont devenus eux aussi les complices objectifs d’une industrie manipulatrice. Car les récentes études sont formelles : il n’y aucun avantage mesurable à opter pour les lights.1 Les études épidémiologiques n’indiquent aucune diminution des risques suite à la migration massive vers les marques légères, qui représentent plus de 50 % du marché dans plusieurs pays riches. Les études biologiques n’indiquent aucune corrélation entre la marque fumée et la quantité de produits toxiques inhalée. Mots clés Séduits par la perspective de pouvoir réduire les risques encourus par les fumeurs invétérés, et incapables par la suite de s’avouer que les cigarettiers les • cigarettes légères • duperies • désinformation IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Pratiques manipulatrices Pourtant, il y a bien une différence de goût entre les cigarettes traditionnelles et les « légères ». Celles-ci ont un goût moins fort et font moins tousser, ce qui semble confirmer la validité des taux de goudrons, systématiquement moins élevés dans le cas des « légères ». Malheureusement, il s’agit d’un effet de dilution qui ne diminue en rien l’exposition aux toxiques. C’est comme si, au lieu de boire 50 ml de vodka pure, on buvait 100 ml de vodka diluée à 50 % : le goût de l’alcool est moins fort, mais on n’a rien fait pour diminuer sa consommation d’alcool. Dans le cas des cigarettes « légères », on a tout simplement rajouté une série de petits trous autour du filtre. À moins de bloquer ces trous avec ses doigts, le fumeur se retrouve à inhaler non seulement de la fumée, mais aussi de l’air frais qui rentre par les côtés du filtre. Les appareils utilisés pour mesurer les taux de goudrons tirent des bouffées d’un volume standard de 35 ml, dont on analyse ensuite le contenu. Avec un facteur de dilution de 50 % (certaines marques vont jusqu’à 80 %), on diminue de 50 % le taux de goudrons. Si le but était de réduire les risques de maladies chez les machines de laboratoire, on pourrait clamer : « Mission accomplie ! ». Mais le fumeur dépendant ne serait pas en mesure de reproduire exactement des bouffées de volume standard, même si on lui expliquait le principe de dilution, ce que les fabricants ont toujours omis de faire. Il fume pour satisfaire ses besoins en nicotine et ajuste le volume des bouffées en conséquence. Ainsi, on sait depuis longtemps que la première cigarette de la journée est fumée de manière plus intense que celles qu’on fume après avoir atteint son plateau de confort nicotinique. Tant que le ratio nicotine/goudron reste constant, la dilution qu’offrent les cigarettes « légères » ne présente donc aucun avantage pour le fumeur. Dans leurs laboratoires internes, les cigarettiers avaient déjà fait ce constat avant même de lancer leurs marques « légères » au milieu des années 1970. Ils ont choisi de ne pas divulguer les résultats de leurs études à la communauté scientifique et aux gouvernements. Poussant le cynisme à l’extrême, ils ont négocié des ententes avec les autorités sur la réduction graduelle des taux de goudrons, alors qu’ils étaient les seuls à l’époque qui pouvaient savoir qu’il s’agissait d’une mesure parfaitement inefficace. Plus tard, à mesure que les scientifiques à l’extérieur de l’industrie ont commencé à publier des études sur le peu de rapport entre les taux de goudrons affichés sur les paquets et les quantités réellement inhalées, les autorités ont mis beaucoup de temps pour avouer leur erreur et surtout pour mettre fin à la fraude. Dès 1996, l’Institut national du cancer aux États-Unis publiait un rapport volumineux exposant les problèmes entourant la méthode utilisée pour mesurer les taux de goudrons. L’agence réglementaire responsable, la Federal Trade Commission, a accepté le bienfondé de l’analyse mais n’a toujours rien fait pour corriger la situation. Au Canada, le ministère fédéral de la Santé a émis un communiqué en janvier 1999 indiquant aux consommateurs que « les produits du tabac dits « légers » et « doux» présentent les mêmes risques de maladies débilitantes et mortelles que les autres types de produits du tabac. » Six ans et de nombreuses études plus tard, on n’a toujours rien fait pour interdire ces termes. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Dans le cas de l’Union européenne, l’interdiction des appellations « légères » et « douces » est entrée en vigueur en septembre 2003. Cependant, on continue d’imposer des taux maximaux de goudrons et de nicotine — une mesure qui ne réduit en rien la nocivité des cigarettes européennes mais qui renforce la légitimité du taux de goudrons comme indicateur du degré de nocivité. Il ne faut donc pas s’étonner que les autorités sanitaires dans les pays en voie de développement, ne disposant pas des ressources scientifiques des pays riches, se fassent encore piéger par l’industrie. Celle-ci continue de présenter la commercialisation des cigarettes à plus faibles taux de goudron comme une mesure viable de réduction des risques et comme solution de rechange à des mesures réellement efficaces, comme l’interdiction de la publicité. La Convention-cadre pour la lutte antitabac prévoit l’interdiction de tout étiquetage donnant « directement ou indirectement l’impression erronée qu’un produit du tabac particulier est moins nocif que d’autres, comme par exemple des termes tels que « à faible teneur en goudrons », « légère », « ultra-légère » ou « douce » » (article 11.1.a). On peut donc espérer que dans les pays où les fumeurs sont encore peu sensibilisés aux risques du tabac (Chine, beaucoup de pays africains etc.), les cigarettiers auront de la difficulté à répéter la fraude des cigarettes « légères » lorsque la connaissance des risques commencera à se généraliser. Ceci dit, il ne faudra pas sous-estimer la capacité des cigarettiers à concocter de nouveaux mythes sur des cigarettes prétendument moins nocives — ni sousestimer la tendance des fumeurs et des pouvoirs publics à accepter ces mythes. 33 Etilé Aimah Le sponsoring du tabac n’est pas une fatalité « On peut se passer d’eux ! » En Côte d’Ivoire, des organisateurs de manifestations destinées au jeune public refusent désormais d’être sponsorisés par des marques de cigarettes. Coup dur pour les fabricants de cigarettes en Côte d’Ivoire. Depuis le début de la crise, en septembre 2002, l’industrie et le commerce du tabac sont au point mort. A Bouaké, la Société Ivoirienne des Tabacs (Sitab), qui distribue toutes les marques de cigarettes vendues dans le pays, a mis presque tous ses agents (300) au chômage technique. « Nous assurons seulement une permanence pour que les machines ne s’abîment pas et s’arrêtent définitivement, confiait Berthe Adou, responsable de communication de la Sitab. Nous étions en pleine caravane de la mode avec le styliste ivoirien Gilles Touré qui devait sillonner tous les quartiers d’Abidjan et des villes de l’intérieur du pays, quand la crise est survenue. Evidemment, nous avons arrêté toute activité de sponsoring et de partenariat. » Mais, ajoute-t-elle, une série de manifestations est prévue dès le retour au calme. Malgré cette défection des firmes du tabac, souvent présentées comme incontournables dans le sponsoring culturel ou sportif, les manifestations destinées aux jeunes n’en continuent pas moins dans les dix communes d’Abidjan et dans le pays sauf dans les zones assiégées. Certaines communes n’avaient d’ailleurs pas attendu la crise pour se passer de ce soutien empoisonné. Celle de Koumassi, par exemple, organise chaque vendredi, depuis deux ans, une émission-spectacle grand public gratuite qui attire des milliers de jeunes. Etilé Aimah Syfia International 20, rue du Carré-du-Roi 34000 Montpellier - France www.syfia.com 34 D’autres partenaires Des artistes de renommée internationale comme Aïcha Koné ou Gadji Celi ont déjà participé à cette émission diffusée par Radio N’Gowa. Elle est financée par des partenaires très divers : entreprises de décoration, fabricants de cosmétiques, maisons de disques, de distribution de cassettes et de CD qui font ainsi la promotion de leurs artistes. Par principe, explique M. Wayoro GuyCharles, directeur du service socio-culturel de Koumassi, le maire et son équipe, depuis leur prise de fonction en 2000, demandent d’éviter d’associer les firmes du tabac et des boissons alcoolisées à ces manifestations. De tels spectacles qui drainent au moins 2000 jeunes sont pourtant convoités par les firmes du tabac, intéressées par toute activité qui rassemble au moins 500 jeunes. Toutefois, Koumassi n’a jamais refusé de céder son stade de plein air à Marlboro pour sa caravane dite « La route de l’aventure » qui a lieu chaque année pendant les vacances scolaires. Pourquoi deux poids deux mesures ? « C’est la ville d’Abidjan qui gère les panneaux publicitaires et ce genre d’activités. Puisque Marlboro sillonne toute la Côte d’Ivoire, c’est la firme qui organise son activité et nous ne faisons qu’accepter que ça se passe aussi dans notre commune, une animation de plus, surtout pour ne pas pénaliser ceux de chez nous qui y participent ». Une voiture 4X4 est offerte comme gros lot. Les participants qui doivent avoir plus de 18 ans selon le règlement trouvent les formulaires d’inscription dans les paquets de cigarettes. À Marcory, une autre commune d’Abidjan, le président d’une association de jeunes, M. Atéa Ladji Bruno, se flatte en cinq ans d’activité de n’avoir jamais sollicité l’aide d’une marque de cigarettes pour organiser les tournois de football inter-quartiers, les concours de beauté et autres spectacles quelque fois retransmis à la télévision. Même refus de la part du responsable de la section Jeunesse Etudiante Catholique (Jet) de la Paroisse Notre Dame de Prodromo, dans le diocèse de Grand Bassam. « Avant on sollicitait, auprès des entreprises de cigarettes, des gadgets pour récompenser les gagnants des jeux qu’on organisait. Mais nous avons décidé de ne plus faire leur publicité. Personnellement, je refuse de porter tout ce qui vient du tabac. » C’est d’ailleurs sans leur soutien que la section a célébré ses 25 ans d’existence. Les 3 millions de Fcfa nécessaires à l’organisation de cette semaine de fête qui a réuni des milliers de personnes ont été obtenus auprès de divers donateurs, de la municipalité et de la première dame de Côte d’Ivoire. Des activités saines « Nous sommes généralement sponsorisés par Coca-cola et autres, jamais par une marque de cigarettes. Nous avons compris que la cigarette fait plus de mal que de bien et venant d’Abidjan nous voulons organiser des activités saines pour les populations rurales », soutient lui-aussi Koffi William, membre d’une association qui organise un tournoi de football très populaire à Ebilassokro, à l’est de la Côte d’Ivoire. La même politique a été adoptée par les responsables du Palais de la culture d’Abidjan où toute affiche et activité impliquant le tabac et/ou l’alcool comme partenaires sont interdites. Même isolées, les réactions de ces organisateurs de manifestations témoignent d’une certaine prise de conscience des dangers de la cigarette et surtout de la contradiction qu’il y a à faire financer les distractions des jeunes par des entreprises dont la production nuit gravement à leur santé. Mots clés • sponsoring • tabac • Côte d’Ivoire IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Pratiques manipulatrices Mamadou Bineta Guinée : la petite allumeuse de cigarettes Mademoiselle C. ne fume pas. La cigarette ne la tuera pas. Elle l’a fait vivre. Cette jolie Guinéenne a été recrutée pour convaincre les jeunes que « fumer c’est branché ». Écoutons-la ! Beau sourire, verbe facile, gestes amples, démarche étudiée, « Mademoiselle C. », qui tait son nom pour ne pas perdre son job, est l’une de ces jeunes Guinéennes chargées de la promotion de la cigarette à Conakry. Elle ne fume pas mais, convaincue ou non, elle défend son gagne-pain. Elle débite en toutes circonstances le même discours : « Celui qui ne fume pas n’est pas éveillé. Il est donc relégué au dernier plan. Ne pas fumer suppose être dépassé, abruti ». Et elle assène sans la moindre hésitation : « Fumer est un acte civique civilisé, de haute portée sociale. Fumer est l’acte d’un homme branché, moderne et à la page. » Comme elle, l’opinion guinéenne a-t-elle été intoxiquée par ces arguments ? Toujours est-il que la Guinée Conakry est, selon une étude de l’American Cancer Society, le pays d’Afrique où la prévalence du tabagisme est la plus forte. En 1998, 59,5 % des hommes entre 11 et 72 ans fumaient et, chiffre plus étonnant, 43,8 % des femmes. Les jeunes qui représentent 60 % de la population sont les plus touchés. A partir de 45 ans, la plupart des Guinéens cherchent à décrocher car la société tolère mal les fumeurs âgés, contraints de recourir aux marabouts et à leurs potions pour les y aider. Miss gadgets A Conakry, la cigarette est partout. La publicité omniprésente. Aucun lieu public n’y échappe. Devant les marchés, les boîtes de nuit, les stades… s’alignent des pick-up 4x4 avec à leur bord de ravissantes hôtesses en uniforme (tee- Mamadou Bineta Syfia International 20, rue du Carré-du-Roi 34000 Montpellier - France www.syfia.com shirt, jupe courte, casquettes) et parfois chaussures aux couleurs et griffe de telle ou telle marque. Equipées de groupes électrogènes et de puissantes chaînes stéréo, ces gros véhicules diffusent de la musique entrecoupée de spots publicitaires. De temps à autre, les demoiselles chargées de la promotion débarquent du véhicule, les bras chargés de gadgets : briquets, tee-shirts, parapluies, bics, casquettes, sacs, cendriers, calendriers, agendas, bols en plastiques et bien sûr cigarettes qu’elles distribuent généreusement au public. Il leur arrive de donner des cartouches entières pour faire connaître des nouvelles marques. Le recrutement de ces hôtesses n’obéit à aucun critère spécifique si ce n’est les deux « b » : beauté et baratin. Peu importe leur niveau d’étude. « La plupart d’entre nous sont déscolarisées, confie Mlle C. Toutefois nous devons pouvoir baragouiner en français et parler les trois principales langues du pays (poular, sousous, malinké). Lors du recrutement, il est demandé aux filles de savoir “convaincre et non contraindre”, de se faire apprécier en se faisant désirer”. La courtoisie, l’honnêteté nous sont vivement recommandées. » « Nous ne sommes jamais à court d’idées ou d’arguments pour inciter les jeunes à fumer et surtout à épouser notre marque », poursuit la jeune femme qui défend bec et ongles son produit : « La concurrence dans le milieu du tabac est impitoyable. Le marché revient à celui qui fait le plus de promotion. L’art de convaincre est un atout : nous n’hésitons pas à allumer la cigarette pour le jeune quand c’est nécessaire. » Et elle lui susurre en prime ce conseil aguicheur : « Si vous voulez séduire, convaincre, attirer la convoitise et susciter des soupirs chez les ravissantes demoiselles, ayez une cigarette à la bouche ! ». Un job payant Au moins une douzaine de marques connues se partagent le marché guinéen. Certaines emploieraient une IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 cinquantaine de personnes. « Dans ce boulot, poursuit notre représentante, nous sillonnons le pays dans des 4x4 avec un perdiem de 17 francs guinéens (5000 Fcfa – 7,6 euros) par jour et un salaire mensuel de 75 000 Fcfa (115 euros). La promotion du tabac me permet de nourrir ma famille, de faire des économies et surtout des relations profitables ». Comme elle fait de fréquentes missions à l’intérieur du pays, ses perdiems couvrent pratiquement ses dépenses mensuelles. « Nous avons, ajoute-t-elle, d’autres avantages quand on place des cartons chez les distributeurs et détaillants. La prime d’encouragement se monte à 5000 Fcfa par carton placé. » Son rêve : construire une maison et « fonder un foyer pour arriver au top des tops ». Son sort est enviable dans un pays où 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Toutefois quelque chose la tracasse. Elle n’apprécie guère la concurrence. Elle se demande « si la Guinée n’est pas le dépotoir de toutes les marques de cigarettes. Le pays n’en fabrique plus. Vous ne voyez pas que tous les milliardaires guinéens le sont devenus grâce à la cigarette. Elle arrive de partout : du port, de l’aéroport et surtout par les frontières terrestres. Leur porosité favorise la contrebande ». Et là, Mademoiselle C. s’indigne franchement. Mots clés • tabac • promotion • Guinée 35 Pauline Ouesso RD-Congo : mobiliser contre le tabac pour mieux le vendre La publicité sur le tabac est désormais interdite dans les médias du Congo/Kinshasa et de nouvelles règles sur l’étiquetage des cigarettes ont été édictées. Une occasion pour le seul fabricant du pays d’éliminer la concurrence en finançant la promotion du nouvel arrêté dans les journaux. À Kinshasa, le fabricant et les importateurs de cigarettes ont obtenu un sursis pour l’application de la réglementation de la publicité sur le tabac. Ces dispositions interdisent toute publicité sur le tabac dans les médias. Banderoles et panneaux routiers vantant les produits du tabac sont également interdits. Sur les paquets et cartons de cigarettes vendues en Rdc devra figurer l’avertissement sanitaire « Fumer est préjudiciable à la santé ». Cette mention est pratiquement la même que celle qui figurait déjà sur une marque bien connue produite par Tabacongo, mais elle devra désormais être plus visible sur les paquets et articles promotionnels. Un gros fumeur avoue n’avoir « jamais fait attention à cet avertissement sanitaire ». Pas évident non plus qu’il comprenne les mentions sur la teneur en goudron et en nicotine rendues dorénavant obligatoires sur chaque paquet. Ces avertissements risquent, comme dans la plupart des pays africains, de passer totalement inaperçus, car la majorité des fumeurs achètent les cigarettes à l’unité (à la « tige ») et voient rarement la couleur d’un paquet de cigarettes. Les importateurs sur les charbons ardents Si les fumeurs, inconscients du risque, se préoccupent peu de tels détails, les importateurs eux sont sur les charbons Pauline Ouesso Syfia International 20, rue du Carré-du-Roi 34000 Montpellier - France www.syfia.com 36 ardents. Ils vont se trouver dans l’incapacité de faire figurer la mise en garde sur les paquets de cigarettes qu’ils commercialisent, celles-ci étant fabriquées dans des pays où la législation est différente de celle de la Rdc. Ils sont d’autant plus coincés que les mentions en question devront être faites en français. Un quotidien de Kinshasa écrit à ce sujet : « On ne pourra plus importer n’importe quoi et de n’importe où », à moins d’aller à l’encontre des nouvelles dispositions et d’en payer le prix. Outre la saisie et la destruction des produits, il est prévu des amendes pouvant atteindre 50 000 dollars et le double en cas de récidive contre tout contrevenant aux dispositions. Il est clair qu’à moins de se cantonner à la contrebande, les importateurs sont contraints à disparaître, laissant ainsi le champ libre à Tabacongo, déjà unique entreprise produisant des cigarettes en Rdc. Tabacongo, filiale de Rothmans (Canada), et BAT-Congo, filiale de British American Tobaco (Royaume Uni), ont fusionné pour donner naissance à Tabacongo, qui est restée dans le giron de la multinationale BAT. On se retrouve donc en Rdc avec un fabricant, plus ou moins assuré de garder ses parts du marché, et des importateurs étranglés par l’arrêté du ministre de la Communication et Presse. À Kinshasa, des observateurs s’interrogent sur la publication, à plusieurs reprises, de textes, signés ou non, commentant l’arrêté. Ces articles, visiblement rédigés de la même plume, avec tous le même style de titre et accompagnés de croquis identiques, ont été publiés en décembre 2002 puis en mars 2003 par quatre quotidiens privés de Kinshasa. « C’est de l’espace payé », reconnaît-on dans l’un des quotidiens engagés dans cette campagne sans toutefois dévoiler le nom du payeur. Compte tenu de l’avertissement adressé aux importateurs qui seraient en infraction avec le nouvel arrêté, cette opération de communication semble faire partie d’une stratégie commerciale destinée à préserver voire à accroître les parts de marché de Tabacongo. La publication de ces communiqués déguisés en articles serait donc l’un des épisodes de la rude bataille que se livreraient les opérateurs du secteur. Dans les milieux intéressés, on dénonce les importateurs accusés d’agir au noir pour échapper au paiement des taxes. Résultat : une tige de la cigarette importée de marque Yes coûte moitié moins cher (10 francs congolais) qu’une tige de production locale (Ambassade). Surprenante contre-propagande Dans le sillage des firmes internationales qui assurent ne viser que les adultes, Tabacongo a mené une campagne de « prévention du tabagisme chez les mineurs ». Largement couverte par la presse, la campagne s’était déroulée dans des écoles de Kinshasa et de Lubumbashi, la deuxième ville du pays. Un concours de dissertation sur le sujet avait été organisé pour l’occasion. Selon le directeur général de Tabacongo, c’est l’ampleur du phénomène du tabagisme infantile qui a conduit l’entreprise « à rechercher avec d’autres composantes de la société des solutions vraies, des solutions justes à ce problème de société ». Au Congo, comme ailleurs, beaucoup s’interrogent sur cette stratégie commerciale de contre-propagande susceptible de priver les cigarettiers de leurs futurs clients. Et certains d’ironiser : s’en remettre aux firmes pour lutter contre le tabagisme, c’est un peu comme confier ses économies à Al Capone. Mots clés •RD-Congo •tabac •mesures de santé publique IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Pratiques manipulatrices Dohoué Tongbaza Bénin : signature de la CCLAT, premier espoir pour la lutte anti-tabac au Bénin ? Le Bénin a signé le 18 juin 2004 le premier traité international de santé publique, la Convention cadre de lutte anti-tabac. Cet acte témoigne d’une volonté politique récente mais beaucoup reste à faire. Les distributeurs de cigarettes y jouissent de la plus totale liberté. L’Etat affirme ne pouvoir se passer ni des emplois du secteur ni des impôts qu’il génère. Casquette et chemise jaunes griffées «Yes » sur pantalon marron, Elisée est promoteur à Tmc, une société privée de commercialisation de cigarettes. Il enfourche chaque matin son beau scooter, peint aux couleurs vives de la marque et entame sa tournée de distribution aux détaillants de Cotonou, la métropole béninoise. Avec un tel « look », le jeune homme ne passe pas inaperçu. C’est le but. Il doit donner de la visibilité à son produit car Tmc doit faire face, entre autres, à trois sérieux concurrents : la Cobexim (qui assure la distribution de Bond Street, Marlboro, Visa), la Cbnd (Fine, Gitanes, Gauloises, Legend), et British American Tobacco Benin (Rothmans King Size, London, Royals, Concorde, Craven A…). « J’aime bien ce travail, confie-t-il. Il me permet de rencontrer plein de gens et d’assurer mon gagne-pain. C’est une chance ! ». Les 112 salariés de la British American Tobacco Benin pensent la même chose. Don Dussey, chargé de la communication et des affaires juridiques, appuie : « Notre société nourrit en fait plus de monde car c’est l’ensemble des distributeurs et revendeurs de nos produits qui en vivent ». Et ils sont nombreux, ces revendeurs de cigarettes qu’on trouve à chaque coin de rue à Cotonou et dans les autres localités du Bénin. Dans un pays aussi pauvre, classé 158e sur les 173 états recensés dans le Rapport mondial sur le développement humain 2002, le maintien de tous ces petits emplois informels est un enjeu social important. Cela explique en partie les réticences des pouvoirs publics à réglementer le commerce sur le tabac. Dohoué Tongbaza Syfia International 20, rue du Carré-du-Roi 34000 Montpellier - France www.syfia.com Liberté totale Le tour de la législation anti-tabac est vite fait : le Bénin ne dispose que d’un arrêté ministériel pris... en octobre 1991 : il porte sur l’interdiction de fumer dans les hôpitaux et services sanitaires. Quant à la fabrication et à la commercialisation des cigarettes, « liberté totale est laissée aux entreprises privées depuis la fin des années 80 », résume un agent de la Direction du commerce intérieur. L’État béninois a, semble-t-il, tout à gagner de cette absence de mesures restrictives sur le commerce du tabac. Début 90, le groupe britannique Rothmans (absorbé en 1999 par l’américain BAT British American Tobacco) a racheté Manucia, l’entreprise publique de fabrication de cigarettes. De 2000 à 2002, le montant des droits perçus par la douane béninoise sur les importations de tabac et cigarettes a presque doublé, passant de 610 millions de Fcfa à plus de 1,1 milliard. L’État qui n’a que des ressources limitées n’est, par ailleurs, guère enclin à mettre un frein au sponsoring d’événements culturels (notamment les concerts de musique) par les firmes. Les actions de promotion de ces dernières se tiennent dans les lieux publics avec, à la clé, la distribution gratuite de cigarettes à des foules de spectateurs, massées autour de gigantesques podiums balayés par des projecteurs. « L’occupation des espaces publics est payante. Nous en donnons l’autorisation contre le versement d’une somme de 25 000 Fcfa et le paiement d’un droit journalier de 1000 Fcfa », révèle un employé du service marchand de la mairie de Cotonou. Des sommes dérisoires en regard des bénéfices générés par la promotion des cigarettes. La municipalité perçoit également des redevances annuelles payées par les sociétés de communication, propriétaires des panneaux publicitaires qui vantent régulièrement les produits des firmes. Plantés le long des rues, ces immenses panneaux aux slogans accrocheurs et montrant de sympathiques jeunes gens en train de fumer sollicitent jour et nuit le regard des consommateurs potentiels qui, à la longue, n’y prêtent même plus attention. Les buvettes et boîtes de nuit, peintes aux couleurs des marques de IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 cigarettes, jouent également ce rôle, ainsi que les imposants véhicules des firmes qui sillonnent les boulevards des grands centres urbains jusqu’aux pistes de desserte rurale. Le tabagisme en hausse rapide « Les Béninois ne sont peut-être pas de gros fumeurs, mais tout l’environnement conduit à ce que la consommation du tabac progresse », analysait l’ancien ministre français de la santé Claude Evin, lors d’une rencontre réunissant professionnels des médias et professionnels de santé sur le tabagisme tenue en novembre 2002 à Cotonou. Les chiffres de l’Institut national de statistique et d’analyse économique semblent lui donner raison : en 2002, le Bénin a importé pour plus de 2,2 milliards de Fcfa de tabac et dérivés contre 1,3 milliard deux ans auparavant soit une hausse de 40 %. Comme dans le même temps, la réexportation a accusé une très légère baisse, ces chiffres traduisent une augmentation rapide et importante du tabagisme béninois. Du côté des autorités, même si encore fragiles, des progrès récents doivent être soulignés et salués. Le Bénin a signé la Convention cadre pour la lutte anti tabac (OMS) le 18 juin 2004. Une réflexion est en cours pour l’élaboration d’une loi et d’un programme national de lutte contre le tabac. Il semblerait qu’une volonté politique soit désormais affichée. Cependant il faudra que cette bataille avec les cigarettiers, qui ne fait que commencer, soit gagnée. British American Tobacco au lendemain de la Journée Mondiale sans Tabac 2004 inaugurait une extension à ses installations lui permettant d’accroître sa production à 4 000 000 000 de cigarettes par an soit 34 paquets de 20 cigarettes pour chacun des 6 millions de béninois. BAT se vante d’avoir payé en 2003 deux milliards d’impôts, comme si cela l’excusait de vendre un produit qui tue. Mots clés • Bénin • tabac • CCLAT 37 Hélèna Razafiarisoa Madagascar : le tabac à chiquer, goudron du pauvre Un Malgache sur trois, au moins, chiquerait. Par tradition, par pauvreté. Et sans savoir qu’il s’expose au cancer de la bouche. Dans la Grande Île, aucune étude n’a été menée à ce jour sur l’impact de cette habitude sur la santé de la population. Quand on dit tabagisme, on pense généralement au tabac à fumer. Mais à Madagascar, cette équivalence est fausse car il y persiste une forte tradition de la chique surtout dans les campagnes. Une thèse en médecine de 1995 estime que près d’un Malgache sur trois (31 % de la population) mâche du tabac, tout en soulignant que ce chiffre est sous-estimé car il ne tient pas compte de la production artisanale qui, elle, échappe à tout contrôle. Mesurer l’impact de cette habitude sur la santé des Malgaches est tout aussi malaisé. « Aucune donnée épidémiologique n’est disponible sur place », se borne à constater une étude. Les statistiques sur les cancers des voies respiratoires comme de la bouche ne sont pas significatives dans ce pays où l’accès aux soins est particulièrement faible. Seule une étude restreinte menée sur le tabagisme chez des femmes enceintes de Tananarive a montré que la majorité de celles qui chiquent ont un faible niveau d’éducation. Trop pauvres pour s’acheter des cigarettes, elles se rabattent sur le tabac à chiquer 20 fois moins cher. Une même dépendance à la nicotine Pourtant, « plusieurs études de même que la pratique médicale à travers le monde ont établi un lien concluant entre le tabac à chiquer et le cancer de la cavité buccale, peut-on lire sur le site de la Société canadienne du cancer. Qu’on mâche le tabac ou qu’on le fume, la dépendance à la nicotine est la même, sauf que dans le cas du tabac à chiquer, la nicotine est absorbée par les muqueuses de la bouche. » Ravony a 65 ans. Elle chique depuis l’âge de 12 ans. Elle n’a jamais pensé que cela pouvait nuire à sa santé. « Il ne m’est jamais arrivé à penser au sevrage », ditelle. Elle est au contraire convaincue que « c’est un remède contre plusieurs maux dont ceux d’estomac et les rages de dent ». De nombreux Malgaches croient la même chose et mettent en avant les propriétés anti-douleurs de l’herbe à Nicot. Les chiqueurs se divisent toutefois en deux écoles : ceux qui ne jurent que par les préparations artisanales parce que plus fortes et ceux qui, comme Ravony, ne mâchent que le tabac fabriqué industriellement bien que le paquet de 15 grammes leur revienne plus cher (250 fmg au lieu de 100 fmg soit 3,7 centimes d’euro au lieu de 1,4). Elle se méfie du tabac à l’ancienne : « Je ne sais pas ce qu’on met dedans ». Cela lui donne des nausées et des étourdissements. À Madagascar, on ne quémande pas une cigarette, on tend la main pour demander quelques brins. « Moi sans le tabac à chiquer et le café ? Impensable, ils me donnent des forces. Je préfère ne pas manger », lance une vendeuse de brèdes (ndlr : légumesfeuilles). de tels retards de paiement que ceux-ci sont quasiment poussés à en soustraire une partie pour préparer leur mixture et la vendre. Ce commerce illicite se fait au grand jour. Sur les marchés, en ville comme en brousse, s’alignent de petits tas de tabac moulu marron foncé, vendu soit dans un paquet rudimentaire soit à la cuillère. Toutefois, les Malgaches qui ont le privilège de savoir lire peuvent voir cet avertissement insolite dans les taxisbrousse : « Interdit de transporter du tabac artisanal ». Hormis cet avis platonique, les autorités n’ont jusqu’à présent pris aucune mesure pour réprimer ce trafic, pas plus que le tabagisme lié à la cigarette. Le service de lutte contre la toxicomanie ne dispose même pas d’un bureau ce qui est assez révélateur de la place de la lutte anti-tabac dans la Grande Ile. « C’est nouvellement créé », nous a-t-on répondu en guise d’excuse. « Peut-on rencontrer le responsable ? » Réponse : « Euh ! Vous pouvez laisser un message ». Etonnant lorsqu’on sait que le gouvernement malgache a signé la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte anti-tabac. Un responsable local de l’OMS interrogé estime que dans la lutte contre le tabagisme il n’y a pas lieu de distinguer cigarettes et tabac à chiquer. Il appelle à contrôler les publicités. Mais les pubs sur le tabac à chiquer industriel sont rares. Quant au tabac artisanal, il n’en a nul besoin. La tradition suffit à sa promotion. Commerce illicite au grand jour Hélèna Razafiarisoa Syfia International 20, rue du Carré-du-Roi 34000 Montpellier - France www.syfia.com 38 En théorie, la vente de tabac hors du circuit officiel est prohibée : toute la production nationale doit passer par l’Office malgache du tabac (Ofmata). Celui-ci achète leur récolte aux producteurs mais à des prix si bas et avec Mots clés •tabac •Madagascar •CCLAT •chique IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Quel espoir pour l’Afrique ? www.syfia.info Syfia International – L’ Afrique au quotidien De l’agence de presse à l’agence école…. • Syfia international est une agence de presse indépendante regroupant 10 agences de presse (6 agences africaines et 4 agences en Europe et au Canada). Elle est forte d’une équipe de 60 journalistes couvrant 35 pays d’Afrique francophone, d’Asie et d’Europe. • Depuis plus de 15 ans, Syfia est à la fois une agence de presse reconnue par de nombreux médias francophones et une agence-école appréciée des journalistes d’Afrique. • En 2004, Syfia a créé Syfia Grands Lacs, une agence régionale centrée sur la RD Congo, le Rwanda et le Burundi. Syfia international : l’agence de presse Un autre regard sur les pays d’Afrique • La marque distinctive de Syfia est la priorité donnée au terrain et au recueil de témoignages vivants. Les articles sont rédigés pour la plupart par les correspondants africains, journalistes issus des pays qu’ils couvrent. Ils donnent la parole aux hommes et aux femmes qui font vivre ce continent. • Échanges économiques, dynamiques agricoles, évolution de la vie politique, évolution des modes de vie, migrations, conflits et crises, aide humanitaire, santé ou sida : les articles de Syfia, proches de l’actualité, montrent comment les sociétés africaines réagissent, s’adaptent et innovent. Une large diffusion dans la presse francophone • Syfia produit 5 à 8 articles et reportages par semaine, soit plus de 300 articles chaque année. Les articles sont envoyés à 200 journaux de la presse francophone, majoritairement en Afrique. Chaque article est publié en moyenne par 8 à 10 journaux. Il est ainsi lu par 150 000 à 400 000 personnes. • Syfia participe ainsi aux échanges d’information Sud-Sud. En diffusant également sa production en Europe, l’agence contribue à assurer une meilleure connaissance des enjeux Nord-Sud, à l’heure de la mondialisation. • Syfia répond à des commandes directes de journaux européens ou canadiens souhaitant des articles originaux spécifiquement conçus pour eux. www.syfia.info : 4000 articles et 1000 photos • Le site web de Syfia, www.syfia.info, donne l’accès à plus de 4000 articles, dans leur texte intégral soit 15 ans de production de l’agence. Un puissant moteur facilite la recherche. • Le site propose plus de 1000 photos sur la vie quotidienne en Afrique et une quarantaine de reportages radio. Syfia Grands lacs : informer pour réconcilier • Lancée en avril 2004, Syfia Grands Lacs, la petite sœur de Syfia international, a pour devise «Mieux informer pour mieux réconcilier». L’objectif est de favoriser la réconciliation entre les peuples de cette région où les conflits se sont succédés depuis 10 ans et de renforcer les processus de paix actuellement en cours. • Syfia Grands Lacs s’efforce ainsi de faire connaître les réalités et les populations des différents pays et zones de cette région pour lutter contre la stigmatisation, la généralisation, les rumeurs et la désinformation. • La production d’articles, leur large diffusion dans les trois pays de la région prioritairement mais aussi en Afrique et en Europe et la formation des journalistes pour renforcer leurs compétences professionnelles et déontologiques sont les trois activités de l’agence. • Fin 2004, déjà forte d’une équipe d’une vingtaine de correspondants répartis dans les trois pays, Syfia Grands Lacs a produit près d’une centaine d’articles largement diffusés dans les radios et les journaux de la région. Formation continue des correspondants • Syfia forme en continu, par mail et téléphone, les journalistes de l’équipe. La pratique de leur métier au quotidien et le partenariat avec les journalistes européens, leur permet d’améliorer leurs compétences professionnelles et de répondre aux standards journalistiques. • À ce jour, plus de 200 journalistes africains ont déjà travaillé avec Syfia et ont souvent trouvé des emplois grâce aux compétences acquises au sein de l’agence. Le tutorat • Depuis trois ans, les bureaux africains de Syfia transmettent leur expérience aux jeunes journalistes des rédactions locales. • Ceux-ci travaillent avec des journalistes de Syfia à la réalisation d’enquêtes et de reportages pour leur journal apprenant ainsi leur métier, sur le terrain. FormAction : le site de formation à distance de Syfia • En 2004, Syfia a mis sur pied un site de formation «rapprochée à distance» destiné aux journalistes africains particulièrement ceux qui, éloignés des capitales, bénéficient rarement de formations et de stages. • FormAction est accessible depuis n’importe quel cybercafé. Il permet aux journalistes de suivre des modules de formation conçus spécialement pour eux, tout en étant suivis individuellement par un tuteur. • FormAction, c’est aussi un espace d’échanges entre journalistes et un espace de rédaction individuel facilitant le travail de ceux qui manquent d’équipement. • Ce site offre la possibilité aux rédactions ou aux réseaux de journalistes de former leurs rédacteurs en appliquant en même temps directement les connaissances acquises. Syfia : l’agence école • Pour Syfia, la formation se fait sur le terrain ; elle est donc indissociable de la production. Ses différents programmes partent de ce principe et privilégient les apprentissages pratiques de longue durée plutôt que les stages de formation théoriques ponctuels. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Contact : SYFIA International 20, rue du Carré du Roi 34 000 Montpellier - France Tél : +33 (0)4 67 52 79 34 Fax : +33 (0)4 67 52 70 31 E-mail : [email protected] www.syfia.info 39 Laurent Huber, Francis Thompson et Sylviane Ratte La Convention-cadre pour la lutte anti-tabac : espoir pour l’Afrique ? Fait plutôt rare dans le système onusien, l’idée d’un traité international pour contrer le tabagisme est passé du rêve à la réalité en quelques années. Entre 2000 et 2003, la grande majorité des pays membres de l’Organisation Mondiale de la Santé se sont mis d’accord sur le texte d’une Conventioncadre de lutte anti-tabac (CCLAT) pour freiner l’épidémie tabagique, notamment dans les pays en voie de développement. Dans l’année qui a suivi l’adoption de la CCLAT, 168 États l’ont signée et ayant obtenu bien plus que le nombre minimum de ratifications nécessaires, la CCLAT est entrée en vigueur le 25 février 2005. Les principales mesures contenues dans la Convention : • Interdiction de la publicité du tabac, et en particulier de la publicité transfrontalière, sauf dans les rares pays où une telle interdiction serait contraire aux principes constitutionnels ; • Mises en garde sanitaires sur les paquets de cigarettes, si possible au moins sur le modèle canadien, c’est-àdire sur 50 % des faces principales du paquet et avec des images ; • Interdiction des appellations trompeuses (« légères », « light », etc.) ; Laurent Huber Coordinateur Alliance pour la Convention Cadre Etats-Unis Email : [email protected] Francis Thompson Analyste des politiques Association pour les droits des non fumeurs Canada Sylviane Ratte Responsable programme tabac Service Prévention – information dépistage Institut national du cancer (INCa) France 40 • Contrôle coordonné de la contrebande, éventuellement par l’élaboration ultérieure d’un protocole ; • Protection contre le tabagisme passif dans les lieux de travail, les transports et les lieux publics ; • Programmes de surveillance nationale, régionale et mondiale du tabagisme ; • Aide aux pays en développement pour la mise en place de programmes nationaux efficaces, bien que les modalités de cette aide restent à déterminer. Au cours des pourparlers menant à l’adoption de la CCLAT, les pays africains ont surpris bien des observateurs en constituant le bloc régional le mieux coordonné et le plus résolu à dépasser les simples déclarations de principe pour en arriver à des mesures concrètes. Dès la première réunion régionale africaine, en 2001, les délégués des pays francophones ont opté pour la solidarité pan-africaine en déclarant d’emblée : « La langue nous sépare, mais ne permettons pas qu’elle nous divise ». Ce front commun a tenu jusqu’à la fin, malgré la présence au sein du groupe africain de plusieurs pays fortement dépendants de la culture du tabac. D’ailleurs, par la force des choses, les états francophones ont souvent dû faire confiance à leurs collègues anglophones pour veiller à leurs intérêts : en dépit du fait que le françait avait statut de langue officielle lors des négociations formelles, les discussions informelles se déroulaient généralement en anglais. L’anglais était aussi la langue de travail principale des ONG internationales et une bonne partie de leur documentation n’était disponible que dans la langue de Shakespeare. La coopération entre délégués africains s’imposait pour une autre raison pratique : par moments, les négociateurs se répartissaient en plusieurs séances parallèles, alors que bien des États africains n’avaient pu envoyer qu’un seul délégué à Genève. Les réunions du groupe africain — qu’on a choisi d’ouvrir aussi aux représentants des ONG africaines — sont donc devenues une source essentielle d’informations pour de nombreux pays. Difficultés sur le terrain Signer un traité international implique généralement une décision gouvernementale au plus haut niveau et des discussions entre plusieurs ministères. Au delà de son contenu concret, la CCLAT a déjà eu un impact positif dans de nombreux pays, puisqu’elle a forcé des ministères au Bénin ou au Tchad par exemple qui ne s’étaient jamais intéressés auparavant au dossier du tabac à se pencher sur les conséquences sanitaires des activités des cigarettiers. La CCLAT peut servir en quelque sorte de modèle pour l’élaboration d’une véritable politique nationale de contrôle du tabagisme, tout en laissant une flexibilité non négligeable à chaque état de choisir les moyens et les outils qui lui conviennent. Cependant, avant qu’elle n’ait force de loi dans un pays donné, la Convention doit aussi être ratifiée. Les considérations économiques à court terme, comme la peur de perdre des usines ou des revenus provenant des taxes sur le tabac, prennent alors souvent le dessus. Il faut donc convaincre les ministères à vocation économique que le contrôle du tabagisme est non seulement bénéfique pour la santé de la population, mais aussi rentable pour le trésor public, ceci dans un contexte où l’industrie du tabac active particulièrement sa machine de désinformation systématique auprès des décideurs sur les retombées économiques des politiques anti-tabac. Mots clés • CCLAT • tabac • Afrique IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Quel espoir pour l’Afrique ? Que ce soit parce qu’on a fini par prendre l’appui des gouvernements africains pour acquis ou parce qu’une bonne partie de la littérature sur l’impact économique du tabagisme est introuvable en langue française, les ratifications se font pour le moment très rares en Afrique francophone : en juillet 2005, seuls quatre États sur 30 avaient ratifié la Convention. Un obstacle supplémentaire à la ratification est sans doute le manque de ressources financières pour la mise en place de programmes nationaux de lutte anti-tabac, telle que préconisée par la CCLAT. Les agences de coopération internationale ont finalement compris l’importance d’investir dans la prévention et le traitement du SIDA, mais le contrôle du tabagisme est encore perçu par la grande majorité des agences comme un luxe que seuls les pays industrialisés peuvent s’offrir. Il faudra sans doute encore plusieurs années de négociations et de travail de sensibilisation avant d’en arriver à des mécanismes de financement permettant aux pays africains de mettre en œuvre tous les éléments de la Convention. Malheureusement, le fait qu’aucun système de financement ne soit encore en place risque d’avoir un effet pervers. La Conférence des Parties, qui aura à décider des formes que devra prendre la « coopération technique », ne sera composée que des pays ayant déjà ratifié la Convention. Si les pays pauvres hésitent à la ratifier en l’absence de financement, la Conférence des Parties sera forcément dominée par les pays riches, pour lesquels l’aide technique aux pays en développement n’est pas toujours une priorité. Le rôle-clé de la société civile La question financière est importante, mais la suite des événements en Afrique francophone dépend sans doute plus de la capacité des intervenants à continuer de mobiliser la société civile en faveur du contrôle du tabagisme. Dans plusieurs pays, un nombre limité de personnes au sein des ONG, disposant de très peu de ressources, a réussi en peu de temps à transformer la donne politique en matière de tabac. Il y a quelques années, par exemple, qui aurait pensé que les médias au Niger se mettraient à publier de longs dossiers sur le problème du tabagisme ou encore qu’une action en justice permettrait de faire stopper une campagne de publicité pour les cigarettes ? Le rôle de l’Alliance pour la Convention Cadre (FCA) Il s’agit désormais de continuer à œuvrer sans relâche et de faire en sorte que l’énergie de la campagne de mobilisation internationale autour des sessions de négociations qui a permis d’aboutir à ce premier traité international de santé publique, soit aujourd’hui déployée à l’échelon national dans tous les pays pour sa ratification. La négociation de la CCLAT a servi de point de ralliement des ONG africaines et a également permis d’établir ou raffermir des liens avec la société civile dans d’autres régions du monde. Rassemblées par l’Alliance pour la Convention Cadre (FCA) les ONGs ont pu bénéficier du soutien des membres et des organisateurs de cette structure qui a pour mission de promouvoir et de soutenir un réseau mondial pour la coordination internationale des campagnes de lutte anti-tabac, le développement des capacités et des compétences en matière de contrôle du tabac en particulier dans les pays en développement et d’être une sorte de « chien de garde » de la CCLAT. L’Alliance pour la Convention Cadre a pu et a su développer avec le soutien technique du réseau Globalink de l’Union Internationale Contre le Cancer, une véritable communauté activiste internationale autour de la CCLAT. L’atout majeur est que des individus auparavant IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 isolés dans leur pays bénéficient désormais des connaissances, des alertes et du soutien de centaines de personnes dispersées dans toutes les régions du monde ainsi que d’outils qui permettent une mobilisation rapide par voie de pétitions lorsque les pouvoirs publics sont hésitants ou ont besoin d’être encouragés, voire remis sur la bonne voie. D’autre part les réunions physiques de l’Alliance pour la Convention Cadre et les différents ateliers organisés par celle-ci ont permis à de nombreux individus de faire connaissance et de se faire confiance. Il est donc plus facile aujourd’hui de se tourner vers des individus ou organisations membres de cette Alliance pour trouver l’expertise ou l’expérience pertinente dans un des domaines du contrôle du tabac et de la CCLAT. De tous les continents, c’est l’Afrique qui a certainement le plus à gagner d’une CCLAT qui fonctionne bien, notamment l’Afrique francophone relativement en retard dans le contrôle du tabac. Une des difficultés réside dans la capacité du réseau mondial à soutenir plus particulièrement un groupe de pays francophones un peu isolés du mouvement général qui communique en anglais. La langue est un obstacle. Les personnes qui manient les deux langues peuvent et doivent servir de passerelles. Elles sont aujourd’hui trop peu nombreuses ou n’ont pas le temps de s’impliquer davantage dans des exercices de traduction. Des moyens doivent être mis en place pour faciliter l’accès aux données en langue anglaise et pour permettre de diffuser les expériences des pays francophones. Dans un monde qui communique de plus en plus vite, cet obstacle linguistique doit être levé afin de ne retarder ni la ratification de la CCLAT ni la mise en place de programmes efficaces de contrôle du tabac dans les pays d’Afrique francophone. 41 La Convention Cadre pour la Lutte Antitabac de l’OMS, le premier traité international de santé au monde, est entrée en vigueur Le 27 février 2005 est une date historique dans l’Histoire de la Santé mondiale : l’entrée en force de la Convention Cadre pour la Lutte Anti-Tabac de l’Organisation Mondiale de la Santé (CCLAT). L’Union internationale de Promotion de la Santé et d’Éducation pour la Santé, UIPES, félicite les plus de 70 pays qui ont ratifié ce traité jusqu’ici, en participant ainsi à la lutte mondiale contre la maladie et la mort évitables causées par l’épidémie du tabac. La CCLAT représente un outil de base pour les pays dans la mise en œuvre d’une législation efficace pour le contrôle du tabac et pour diminuer l’expansion de la puissante industrie du tabac, ses mensonges et sa publicité sournoise dirigée vers les jeunes. La Cinquante-sixième Assemblée mondiale de la Santé a adopté à l’unanimité, en mai 2003, la CCLAT de l’OMS. La CCLAT était ouverte aux signatures jusqu’au 29 juin 2004. A cette date, on comptait 168 signataires (dont la Commission Européenne). Les quarante premières Parties du traité sont : l’Arménie, l’Australie, le Bangladesh, le Bhoutan, le Brunéi Darussalam, le Canada, Fidji, la France, le Ghana, la Hongrie, les Îles Cook, les Îles Salomon, l’Islande, l’Inde, le Japon, la Jordanie, le Kenya, Madagascar, les Maldives, Malte, Maurice, le Mexique, la Mongolie, le Myanmar, Nauru, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, le Pakistan, Palaos, Panama, le Qatar,la République arabe syrienne, SaintMarin, les Seychelles, Singapour, la Slovaquie, le Sri Lanka, la Thaïlande, Trinité-et-Tobago et l’Uruguay. Depuis le 30 novembre 2004, d’autres pays ont déposé leur instrument de ratification ou son équivalent. Cette loi comprend, entre autres, deux mesures principales qui ont fait leurs preuves dans la réduction du tabagisme et diminuer ainsi le taux de souffrance et de morts prématurées qu’il entraîne : une interdiction totale de toute forme de publicité directe et indirecte pour le tabac et des avertissements sur la santé (surtout sous forme d’images représentant des maladies liées au tabac) qui doivent couvrir au moins 30 % des surfaces Préambule à la Déclaration de Montréal principales des paquets de cigarettes. Ce traité fournit aussi aux pays des indications claires pour des politiques de protection de la fumée de tabac, le système de taxation, la régulation des produits de tabac et des mesures pour combattre la contrebande de cigarettes. L’Organisation Mondiale de la Santé estime que l’usage du tabac tue 5 millions de personnes chaque année. À ce rythme, ce chiffre atteindra 10 millions par an en 2030, dont 70 % de ces morts concerneront les pays en développement. Pour enrayer une telle épidémie, les pays sont encouragés à aller au-delà des mesures minimales préconisées par la CCLAT. Ces mesures réduiront la souffrance humaine aussi bien que les coûts des soins de santé des pays. Nous félicitons les pays qui ont ratifié la CCLAT, démontrant ainsi leur engagement envers la santé publique. Nous enjoignons les autres pays à se joindre à nous. Pour plus d’information : www.fctc.org DÉCLARATION DE MONTRÉAL SUR LE CONTRÔLE DU TABAC 18 septembre 2002 La Déclaration de Montréal a été conçue comme une charte de la lutte contre le tabac dont l’ensemble des pays francophones pourraient s’inspirer dans leurs activités visant la réduction du tabagisme au cours des prochaines années. Elle a été rendue publique le dernier jour de la 1ère Conférence internationale francophone pour le contrôle du tabac (18 septembre 2002), tant auprès des quelques 400 participants que des médias. Le moment le plus étonnant et le plus émouvant a sans aucun doute été la salve d’applaudissements aussi nourris qu’inattendus qui a suivi la lecture de la Déclaration de Montréal, faite par le docteur Marcel Boulanger, président du Comité scientifique international, responsable de la rédaction de la déclaration. Au terme de cette longue ovation, le docteur Boulanger, l’un des pionniers de la lutte antitabac au Québec, encore sous le coup de l’émotion, confia à l’assistance qu’il n’aurait jamais pensé, même dans ses rêves les plus fous, être témoin d’un tel événement. Il se sentait comme le vieillard Siméon qui s’était exclamé alors qu’il prenait l’enfant Jésus dans ses bras : « Maintenant Seigneur, ta promesse s’est réalisée ; tu peux laisser mourir ton serviteur en paix. » Il conclut, cependant, avec humour qu’il était certes le témoin privilégié d’un moment unique, mais pas prêt immédiatement pour autant pour une destinée plus... céleste. Louis Gauvin, Coordonnateur Coalition québécoise pour le contrôle du tabac E-mail : [email protected] 42 Nous, spécialistes du contrôle du tabagisme du monde francophone, réunis à Montréal, avons conclu que la lutte contre le tabagisme passe obligatoirement par une solution politique. L’industrie du tabac, en propageant la dépendance au tabac à travers le Monde, constitue le vecteur de cette épidémie qui tue 4 millions de personnes par année. Nous réclamons la mise en place d’une politique globale qui inclut un encadrement rigoureux de l’industrie du tabac. L’État a la responsabilité de modifier les éléments de l’environnement social, créés en grande partie par l’industrie du tabac, qui rendent nos concitoyens vulnérables à l’épidémie tabagique. Les gouvernements doivent de toute urgence mettre en place un ensemble efficace de mesures, notamment règlementaires et fiscales, soutenu par un financement public permettant de contrôler l’épidémie et ses effets. Il faut avant tout : • Mettre fin à toute forme de promotion directe et indirecte de ce produit mortel, y compris le parrainage. • Rendre le tabac moins accessible en augmentant les taxes et en maîtrisant la contrebande. • Protéger les non-fumeurs de toute exposition à la fumée du tabac. • Favoriser l’arrêt du tabagisme et rendre accessibles les aides au sevrage. • Informer le public du contenu et des effets des produits du tabac. Le tabagisme étant la source de l’enrichissement mondial des fabricants de cigarettes, leur opposition à ces mesures est avérée et en fait l’adversaire principal à combattre. La solidarité des pays de la francophonie est d’autant plus importante que les pays en voie de développement sont les nouvelles cibles des multinationales du tabac. Le Comité scientifique 1ère Conférence internationale francophone sur le contrôle du tabac Montréal - Québec - Canada IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Quel espoir pour l’Afrique ? David Houéto et Charles Kassa Vers une nouvelle stratégie de lutte contre le tabagisme en Afrique Le tabac est source de nombreuses affections mortelles et d’appauvrissement des populations qui en font usage (Vanoti et al., 2002 ; Dautzenberg et al., 2001 ; Van Audenhaege, 2000). Comme l’affirme si bien la Directrice Générale de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), le Dr Gro Harlem Bruntland (Mackay et Eriksen, 2002) « le tabac est le plus grand tueur, plus grand que n’importe quelle autre forme de pollution ». L’industrie du tabac innove tous les jours en stratégies nouvelles pour faire avancer sa domination et par conséquent son intention délibérée d’exterminer le monde (Piette, 2002 ; Landman et al., 2002). De nos jours, la question n’est pas seulement au niveau de ceux qui fument mais également de ceux qui se trouvent dans l’environnement immédiat des fumeurs ; nous voulons nommer le tabagisme passif (Coalition nationale contre le tabac, 2001 ; Van Audenhaege, 2002). Ceci dit, la lutte contre le tabac doit être menée par tous ceux qui souhaitent vivre dans un environnement sain et durable. Il est important de reconnaître les innombrables efforts entrepris par les instances internationales et nationales se préoccupant de la question (IUHPE, 1999 ; WHO, 2000) à savoir : l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’Union Internationale de Promotion de la Santé et d’Education pour la Santé (UIPES), le Réseau Francophone International pour la Promotion de la Santé (REFIPS), l’Observatoire du Tabagisme en Afrique (OTAF), les Centers for Disease Control des États-Unis (CDC), Santé Canada, etc. C’est dans ce cadre que l’UIPES, soutenue par ses différents partenaires, a entrepris David Houéto Médecin, Nutritionniste et Promoteur de la santé ONG Santé Bénin 07 BP 1411 Cotonou Bénin. Email : [email protected] Charles Kassa Sociologue Anthropologue ONG Santé Bénin Email : [email protected] une analyse de la question du tabac afin de trouver les méthodes justes, à même d’aider à faire reculer ce fléau qu’est le tabagisme. L’Union Internationale de Promotion de la Santé et d’Education pour la Santé (UIPES) en choisissant l’Afrique comme la cible de ses actions, marque ainsi son accord avec le constat actuel des chercheurs et experts de la question du tabagisme selon lequel l’industrie du tabac a choisi comme nouvelle cible l’Afrique pour faire avancer sa stratégie destructrice de l’humanité (Lachance, 2002). L’UIPES dans cette optique a organisé à Ouidah (Bénin) les 3, 4 et 5 novembre 2002, un séminaire de réflexion qui a regroupé des professionnels des médias et de la santé des pays francophones d’Afrique. Suite à cet important événement et grâce au succès qu’il a connu, de jeunes professionnels en promotion de la santé ont choisi de poursuivre les acquis afin de faire avancer au Bénin la stratégie de lutte contre le tabac. Le tabagisme dans le monde Le tabagisme a gagné le monde entier, bien entendu de façon variable selon les régions (Mackay et Eriksen, 2002). Au moment où dans la population des personnes âgées on peut observer des abandons du tabagisme, c’est un mouvement inverse que l’on observe au niveau des jeunes et des adolescents dont le taux va croissant (Martinet, 2002 ; Homl et al., 2003). Par ailleurs, les femmes sont de plus en plus identifiées comme de grandes consommatrices du tabac. En effet, Mackay et Eriksen (2002) mentionnent que les femmes dans les pays développés consomment le tabac dans une proportion de 20 % et au delà. Dans tous les cas, les jeunes filles et les femmes constituent une cible privilégiée de l’industrie du tabac. La plupart des messages de promotion du tabac sont orientés, souvent à grands frais, vers ce public. Cette publicité est d’autant plus efficace qu’elle touche des valeurs sensibles de ces sujets en termes de liberté, émancipation, minceur, prestige et richesse (Mackay et Eriksen, 2002 ; Schiaffino et al., 2003). Pendant que les pays développés engagent une lutte sans précédent contre l’industrie IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 du tabac (Lachance, 2002 ; Rathjen et Gauvin ; Pettiaux, 2001 ; Baudier, 2001), les pays en voie de développement – en particulier l’Afrique – restent sans réaction. L’industrie du tabac s’est alors tournée vers l’Afrique avec des méthodes dramatiques de propagande profitant énormément de la situation de précarité de ce continent (UIPES, 2002). Pour plusieurs raisons, l’Afrique surtout celle francophone connaît une situation jusque là des moins avancées dans le domaine du tabagisme. Mais force est de constater de nos jours que suite à cette intensification des stratégies mercatiques de l’industrie du tabac (Déclaration de Montréal sur le contrôle du tabac, 2002 ; Lachance, 2002), on observe une augmentation significative de la consommation du tabac dans la population générale et en particulier au sein des jeunes (Lachance, 2002). Mais au même moment aucune disposition n’est prise dans les pays africains francophones pour contrer ce fléau qui se positionne sur leurs territoires (UIPES, 2002 ; Lachance, 2002). Les autorités politiques ferment les yeux sur les pratiques malsaines de l’industrie du tabac allant du parrainage, du sponsoring à la distribution de cigarettes à travers les rues des villes et campagnes des pays africains comme l’ont rapporté les participants du séminaire de l’UIPES sur « la crise croissante du tabagisme en Afrique francophone » (UIPES, 2002). Il est heureux de constater que la communauté internationale n’est pas restée inactive face à cette avancée de l’industrie du tabac. Plusieurs actions sont menées Plusieurs actions sont menées par différents acteurs dans le but de freiner l’allure de ce mal mondial. Nous mentionnons entre autres la création par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) du département « Initiative sans Tabac – Mots clés •tabac •stratégie de lutte contre le tabagisme •Afrique 43 Tobacco Free Initiative ») qui développe depuis sa création plusieurs initiatives dans le but de contribuer à libérer les populations de l’emprise du tabac. Une série d’action ayant des effets durables sur le tabagisme a été identifiée par l’OMS en collaboration avec la Banque Mondiale et des experts en la matière (Mackay et Eriksen, 2002) et qui est libellée comme suit : 1. accroissement des taxes sur le tabac ; 2. interdiction de la publicité du tabac, le parrainage et la mercatique ; 3. l’interdiction de fumer sur les lieux publics et lieux de travail ; 4. large accès aux moyens d’abandon du tabagisme ; 5. solide contre-propagande et 6. un contrôle étroit de la contrebande. C’est dire que la destination de notre action est connue et le chemin pour y arriver est également connu. Il faut noter que pour ces différentes dispositions le rôle et l’engagement des Etats constituent la pierre angulaire de l’efficacité de la lutte contre le tabagisme. Il est aussi évident qu’il reste beaucoup à faire et les gouvernements en Afrique n’ont pas encore toutes les ressources pour engager cette lutte même si la volonté politique y est par endroits. Si l’on veut une efficacité dans la lutte contre le tabagisme surtout au sein des jeunes, il faudra élaborer de nouvelles stratégies pour accompagner les campagnes de sensibilisation traditionnelles a souligné le Dr Stanton Glantz cité par H. Rathjen et L. Gauvin. Comme dans beaucoup d’autres situations, nous croyons au rôle prépondérant que pourraient jouer les Organisations Non Gouvernementales _ ONG dans la lutte contre le tabagisme en Afrique en général et au Bénin en particulier. C’est la raison qui sous-tend l’initiative de quelques professionnels béninois de la promotion de la santé regroupés au sein de l’ONG « Santé Bénin » dans l’élaboration d’un programme de lutte anti-tabagique dont nous dévoilons ciaprès les principales rubriques. Programme de lutte antitabagique de l’ONG « Santé Bénin » Notre lutte n’est pas dirigée contre les personnes mais contre le tabac et toutes les formes de sa promotion dans les populations béninoises incitant à l’adoption de comportements nuisibles à la santé des utilisateurs ainsi que de ceux de l’environnement immédiat surtout à domicile et sur le lieu de travail. De façon bien planifiée avec une chronologie bien étudiée suivant les principes de la promotion de la santé, nous allons aborder les différentes rubriques ci-après : – Recherche-Action au démarrage de l’action et tenue d’un fichier actualisé de façon périodique permettant la mise à disposition de données statistiques pour évaluer effectivement l’ampleur de la situation ; – Élaboration de propositions de lois et réglementations de lutte anti-tabagiques à soumettre aux autorités compétentes (Ministères Santé, Finance, Agriculture et Education ; Parlement, Communes, etc.) ; – Constitution d’un groupe de lobbying (plaidoyer) pour soutenir l’adoption des différentes lois et réglementations ; – Actions intensives de contre-propagande contre le tabagisme ; – Actions intensives de communications sociales utilisant les canaux les plus pertinents selon les résultats de la recherche formative dans chaque région du pays ; – Initiation de recherches épidémiologiques et de promotion de la santé relatives au tabagisme en milieu africain béninois ; – Suivi-évaluation des actions et recadrage des actions. L’impact de la promotion de comportements sains face au tabagisme dans le contexte béninois où les autorités sont déterminées à soutenir des actions concrètes est chose possible (UIPES, 2002). Références Baudier F. La prévention du tabagisme en France au cours des années 1997/1999. Santé Publique, décembre 2001 ; 13(4) :403-10. Coalition nationale contre le tabac (Belgique).Tabagisme passif ou passivité face au tabac ? Éducation Santé n°161, juillet-août 2001 : 5-6. Landman A, Ling PM, Glantz SA. Tobacco industry youth smoking prevention programs : protecting the industry and hurting tobacco control. American Journal of Public Health, June 2002, vol 92, N°86, 917-930. Mackay J et Eriksen M. The Tobacco Atlas. World Health Organization, 2002 :128. Dautzenberg B, Lagrue G. Tabagisme. Epidémiologie et pathologie liée au tabac. Revue du Praticien, 30 avril 2001 ; 51(8) :877-82. Martinet Y. Le défit du tabagisme des adolescents. Revue des maladies respiratoires, juin 2002 ; 19(3) : 285-7. Déclaration de Montréal sur le contrôle du tabac. Première Conférence Internationale Francophone sur le Contrôle du Tabac. Montréal, 18 septembre 2002. Pettiaux M. Tabac : mensonges, dénonciations, complots, manipulations… Éducation Santé n°151, septembre 2001 :10-12. Homl K, Kremers SP, de Vries H. Why do Danish adolescents take up smoking ? European Journal of Public Health, March 2003 ; 13(1) :67-74. International Union for Health Promotion and Education (IUHPE). IUHPE Guidelines for collaboration, partnership and sponsorship. Bye-Laws, annex D, 1999. Lachance A. L’Afrique, cendrier de l’occident ? Éducation Santé 175, décembre 2002 :6. 44 Piette D. Pourquoi ? Parce que Philip Morris…. Éducation Santé n°170, juin 2002 :12-13. Union Internationale de Promotion de la Santé et d’Éducation pour la Santé (UIPES). La crise croissante du tabagisme en Afrique francophone : un séminaire pour les professionnels des médias et de la promotion de la santé. Réponses aux questions des Professionnels de la Santé. Ouidah, 3-5 novembre 2002. Van Audenhaege M. Les décès en communauté française. Tiré de : Tafforeau J et al. Statistiques des décès en Communauté française 1992-1994, CROSP et DG Santé, 1999, 214p. Éducation Santé n°154, décembre 2000 : 14-15. Van Audenhaege M. Tabagisme passif ? Toxicité, danger ! Éducation Santé n° 167, mars 2002 : 14. Rathjen H et Gauvin L. Les adolescents pourraient bien se rebeller contre l’industrie du tabac et ses produits. Info-tabac, www.arrete.qc.ca Vannoti M, Piez F, Jeanrenaud C, Zellweger JP. Coûts humains de la dépendance au tabac. Revue Médicale Suisse Romande, février 2002 ; 122(2) :101-4. Schiaffino A et al. Gender and educational differences in smoking initiation rates in Spain from 1948 to 1992. European Journal of Public Health. March 2003 ; 13(1): 56-60. World Health Organization. Guidelines on working with the private sector to achieve health outcomes. November, 30th 2000 (Executive Board 107th Session, EB107/20). IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Quel espoir pour l’Afrique ? Conclusion Le tabagisme gagne du terrain, en particulier en Afrique où les conditions économiques et législatives sont favorables à la promotion du tabac. Plusieurs actions sont menées, mais elles ne sont pas toutes efficaces. Quand bien même elles le seraient, il faudra aller plus loin. Nous devons regarder ce qui reste à faire plutôt que de nous complaire dans ce qui a été fait. (Marie Curie). Dans tous les cas, en Afrique et au Bénin en particulier, il est urgent de prendre le contrôle de ce fléau. La volonté clairement affichée des autorités politiques est dans ce cas un bon indice si on se réfère aux différents Remerciements Nous tenons à remercier particulièrement Madame MarieClaude Lamarre et son équipe, le Professeur Albert Hirsch et Madame Sylvianne Ratte pour la confiance qu’ils nous ont faite et qui a été à la base du succès du séminaire de Ouidah. Mokhtar Hamdi Cherif Problématique du tabac en Afrique francophone et perspectives régionales de l’OTAF Le problème du tabac est mondial et politique. L’épidémie et la crise croissante du tabagisme en Afrique sont une menace pour la santé dans notre continent, avec des répercussions socioéconomiques importantes dans les prochaines années. Environ 1,1 milliard de personnes fument dans le monde et, d’ici à 2025, ce nombre devrait dépasser 1,6 milliard. D’ici 2030, 10 millions de décès survenant dans le monde seront associés au tabagisme, pour la plupart dans les pays en développement. « L’industrie du tabac apparaît clairement au cœur du développement de la pandémie tabagique au XXe siècle. Les cigarettiers ont, en particulier, fait du tabac un produit de consommation de masse, ouvrant à chaque fois de nouveaux marchés : avant-hier les hommes, hier les femmes et les jeunes, aujourd’hui les pays en développement. La stratégie est identique : accroître les ventes, au prix d’un lourd fardeau pour la santé des populations. » Mokhtar Hamdi Cherif Professeur en médecine préventive et épidémiologie Chef de service au CHU de Sétif, Algérie Président de l’Observatoire du Tabac en Afrique Francophone (OTAF) Email: [email protected] Les industries se tournent vers les pays en développement et notamment en Afrique pour compenser leurs pertes de marché au Nord, au moment où la demande recule dans ces pays. La stratégie cynique de l’industrie cible l’Afrique comme son plus fort potentiel de développement, avec une croissance de la consommation escomptée de 16 % pour la prochaine décennie, selon l’Atlas du tabac dans le monde de l’OMS. Les importations frauduleuses de cigarettes se développent de plus en plus dans les pays africains, avec une contrebande bien structurée en Afrique. Les cigarettes de contrebande sont encore plus toxiques avec des taux de nicotine et de goudron très élevés. Le parrainage et la publicité directe et indirecte se développent sous toutes leurs formes,avec une prolifération de messages publicitaires agressifs ciblant les populations africaines avec cynisme, manipulation, complicité dans la contrebande, non respect des lois, en exploitant tous les thèmes pour promouvoir le tabac auprès des populations cibles (jeunes, femmes, les plus pauvres). L’industrie du tabac recrute chaque jour de nouveaux fumeurs en Afrique pour remplacer ceux qui meurent. Ce sont environ ces 8 fumeurs sur 10 qui ont commencé avant 18 ans qui représentent l’avenir de l’industrie. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Il était impératif de mettre en place un Observatoire du Tabac en Afrique Francophone (OTAF) pour resituer la problématique africaine du tabac, contribuer au développement de la francophonie en Afrique, faire connaître partout dans le monde ses besoins, ses initiatives, ses actions et lutter efficacement contre le tabac et les pratiques de l’industrie. Une année après la mise en place de l’OTAF à Bamako grâce à l’effort de tous ses membres et le soutien de la Ligue nationale contre le cancer de France et l’Union Internationale Contre le Cancer, l’Observatoire du tabac en Afrique Francophone a été enfin lancé officiellement à Niamey en décembre 2002. Rôle et mission L’OTAF est un organe indépendant qui a pour mission de recueillir, traiter et diffuser des informations sur tous les aspects du tabac afin de susciter et de soutenir des actions de santé publique. Mots clés •OTAF •tabac •Afrique 45 C’est un centre de référence pour l’Afrique Francophone. Il sert de conseil technique pour les pouvoirs publics sur les différentes thématiques du tabac. Les travaux de l’OTAF sont attendus pour renseigner les pouvoirs publics sur les mesures les plus efficaces pour lutter contre le tabac. L’OTAF se doit de promouvoir les actions de protection de la santé des jeunes et des non-fumeurs, d’information sur les méfaits du tabac et des pratiques de l’industrie du tabac. Il est l’espoir d’organiser une lutte fondée sur des données solides et scientifiques et de qualité. L’OTAF est le seul organe d’Afrique Francophone de surveillance de l’épidémie du tabac et des pratiques et des agissements de l’industrie du tabac. Nos engagements et nos actions de Ouidah 2002 à Sétif 2004 • Reconnaissance juridique de l’OTAF au Niger • Recueil des données sur la santé, l’économie, la législation et la réglementation dans les pays d’Afrique francophone • Diffusion de l’information par le bulletin de l’OTAF • Vigilance pour le respect des législations en vigueur et actions en justice Deux procès gagnés par SOS tabagisme Mali en janvier 2000 et SOS tabagisme Niger à Niamey en décembre 2002 • Actions individuelles contre les cigarettiers, dans le cadre de la prévention jeunes, par les associations : Visa Ile Maurice, MNCC Cameroun, MAT Sénégal, ACONTA Burkina, ATLAT Togo, ADC Tchad. • Réalisation du site Internet de l’OTAF en collaboration avec Globalink http://otaf.globalink.org. Il existe très peu d’informations en français. L’objectif est d’une part de traduire les informations existantes en anglais, et d’autre part d’aller aux sources d’informations dans les pays d’Afrique francophone pour un recueil fiable des données sur l’impact sur la santé, les comportements tabagiques, les données sur l’économie, l’industrie, l’agriculture, la législation, la fiscalité, la publicité, la contrebande et les actions de lutte contre le tabac. • Action en faveur de la Convention cadre pour la lutte anti-tabac de l’OMS. L’OTAF à travers certains de ses membres a participé activement au processus de 46 négociations de la CCLAT. Après l’adoption de cette convention, les têtes de réseaux dans tous les pays membres ont engagé des actions pour la signature et la ratification de cette convention. Une sensibilisation des parlementaires et ministres est en cours. • Participation avec les ONG aux négociations de la CCLAT à Genève • Organisation de manifestations scientifiques Organisation à Sétif du premier forum international algérien sur le cancer qui a reçu la délégation française et africaine composée de membres du comité francophone, de l’UICC, d’experts de la lutte contre le tabagisme (OTAF et Ligue nationale française contre le cancer) et de la chargée de mission de l’Alliance Mondiale Contre le Cancer. • Formation des professionnels de la santé Un atelier de formation a été organisé durant le forum de Sétif pour le personnel paramédical algérien • Diffusion de témoignages des victimes du tabac Réalisation d’un film à partir de témoignages de victimes du tabac diffusé en milieu du travail et universitaire en Algérie • Actions d’aide à l’arrêt du tabac L’expérience de Sétif devenue nationale s’est élargie à la Tunisie • Publications Les membres de l’OTAF ont publié des articles dans différentes revues, notamment dans la revue Sevrage Tabagique Pratique No 4 décembre 2003 ; article sur le sevrage tabagique dans la revue d’Éducation pour la Santé « La Santé de l’homme » ; un article, sur tabac et pauvreté au Niger dans la même revue. Succès enregistrés L’OTAF est aujourd’hui le centre de référence en matière de lutte contre le tabac en Afrique Francophone, partenaire dans plusieurs projets avec la Ligue nationale contre le cancer (France), l’UICC, l’UIPES et la FCA. Ce succès a été couronné par un trophée décerné par l’Organisation Mondiale de la Santé et un diplôme de reconnaissance signé par la directrice générale de l’OMS en 2003. Mobilisation internationale Les membres de l’OTAF ont participé activement à la mobilisation francophone et internationale sur le contrôle du tabac notamment dans l’organisation des Conférences internationales francophones sur le contrôle du tabac (CIFCOT 1 et CIFCOT 2) et dans sa participation à la Conférence Mondiale sur le Tabac ou la Santé, à Helsinki, en août 2003. Nos actions en cours et à venir • Réalisation d’une monographie des pays de l’OTAF, avec un inventaire des données sur le tabac en Afrique francophone • Réalisation d’études et d’investigations sur le déploiement en Afrique de l’industrie du tabac, de ses agissements (contrebande, recrutement des jeunes…) • Sensibilisation de l’opinion publique internationale, régionale et nationale aux agissements de l’industrie du tabac avec une synergie médiatique • Développement de modèles de législations tabac pour l’Afrique francophone et de plaidoyers pour l’adoption de ces cadres réglementaires (CCLAT) • Développement d’un programme de soutien et de conseil auprès des pouvoirs publics • Traductions de documents importants • Élaboration de supports de diffusion (rapports, vidéo, galerie photo) • Développement et maintenance du site Internet de l’OTAF. • Promotion du renforcement des compétences entre le Maghreb et l’Afrique sub-Saharienne. Dans une perspective à long terme Mettre en place une stratégie complète de lutte contre le tabagisme en mobilisant les associations et les médias pour une véritable dé-normalisation du tabac dans les sociétés africaines. Conclusion La connaissance des dangers du tabac et de son coût social nous amène aujourd’hui à proclamer qu’il est inadmissible que l’industrie du tabac, sans scrupule, réplique aujourd’hui dans les pays pauvres ce qu’elle ne peut plus faire dans les pays riches. L’industrie du tabac a une longueur d’avance sur les défenseurs de la santé publique. Les solutions sont certes politiques, mais la prise de conscience et l’engagement de IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Quel espoir pour l’Afrique ? tous les représentants de la société civile peuvent changer l’acceptabilité sociale du tabac et inverser l’image positive de celui-ci. L’OTAF représente l’espoir de commencer à organiser une lutte antitabac en se fondant sur des preuves scientifiques et de qualité. L’OTAF est désormais présent en Afrique francophone, et mobilisé pour resserrer l’étau sur l’industrie du tabac, en utilisant efficacement l’outil juridique fourni par la CCLAT. Rym Ben Zid Tunisie : projet pilote de reconversion d’exploitations agricoles cultivant du tabac en cultures diversifiées La culture de tabac est une culture faiblement répandue en Tunisie puisque la superficie totale consacrée, au niveau national, à cette culture est de 3640 hectares. Le tableau 1 présente les superficies consacrées à la culture de tabac par Gouvernorat 1. La culture de tabac est surtout présente dans les zones marginales du Nord Ouest du pays. Depuis le début du XIX siècle, cette culture est présente dans ces zones et a permis aux tribus Khmirs2 de se procurer des disponibilités financières par la vente du tabac. De plus, du fait de la proximité de l’Algérie, le tabac, dans la région des Mogods-Khroumirie3, a été l’objet d’échanges transfrontaliers, entre les tribus algériennes et les tribus khmirs. Actuellement, 83 % de la superficie consacrée au tabac est localisée dans le massif montagneux et forestier des Mogods-Khroumirie (Gouvernorats de Béja, de Bizerte et de Jendouba). Cette culture est pratiquée généralement dans de petites exploitations aux ressources naturelles et aux moyens financiers limités, disposant d’une pléthore de main-d’œuvre familiale. La culture du tabac est pratiquée sous contrat avec la Régie Nationale des Tabacs. Cette dernière détient un monopole sur l’achat du tabac. Des Rym Ben Zid Ingénieur agronome Association tunisienne contre le cancer Immeuble SNIT - Boulevard 9 avril BP 173 1006 Tunis Tél. : 216 98 638 640 Email : [email protected] contrats sont établis au début de chaque campagne agricole entre les agriculteurs et la Régie des tabacs : les agriculteurs communiquent à la Régie la superficie qu’ils prévoient de planter en tabac. La Régie leur fournit sous forme d’avance en nature les engrais et des machines agricoles pour le travail du sol. Cette avance en nature est déduite du montant de la vente de la production de tabac livrée au début de la campagne agricole suivante par les producteurs à la Régie. Les variétés cultivées sont des variétés dont les feuilles sont riches en goudron. Il existe deux marques de cigarettes principales : – la marque 20 mars : les cigarettes de cette marque sont composées de tabac local à proportion de 5 %, – la marque Halouzi : les cigarettes de cette marque sont composées de tabac local à proportion de 25 %. Il ressort donc que la proportion du tabac produit localement dans la composition des cigarettes tunisiennes est peu élevée. Dans la composition de ces cigarettes, la part du tabac importé est beaucoup plus importante que la part du tabac produit localement. Le tabac à priser ou Nafa est à base du tabac produit localement. Les conditions édaphiques et climatiques tunisiennes sont peu favorables à la culture de tabac : pour avoir du tabac de bonne qualité, il faut avoir un temps chaud et humide ce qui n’est pas le cas en Tunisie. La chaleur et le manque d’humidité entraînent une augmentation de la transpiration au niveau des feuilles et un développement des nervures. Ce dernier phénomène a un effet négatif sur la qualité du tabac. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Tableau 1 Superficie consacrée à la culture de tabac par Gouvernorat Gouvernorat Nabeul Bizerte Béja Jendouba Kairouan Sidi Bou Zid Gafsa Gabès Total Superficie en hectares 270 1530 530 950 70 120 30 140 3640 Du fait de la faible part de la superficie agricole consacrée à cette culture, du bas niveau de production et du nombre réduit d’agriculteurs s’adonnant à cette activité, la culture de tabac ne constitue pas un enjeu économique important en Tunisie. Méthode et étapes de travail L’idée de ce projet a émergé dans le cadre de discussions des responsables de la Ligue tunisienne contre le cancer. L’étude de sa faisabilité puis sa réalisation ont été confiées à un ingénieur agricole. Un groupe de pilotage comprenant des épidémiologistes, cancérologues et d’autres acteurs de la Mots clés • reconversion • culture du tabac • Tunisie 47 lutte contre le tabagisme tunisien et français a aidé, soutenu et évalué le déroulement du projet. Cette première étape a abouti à la rédaction d’un protocole de travail comprenant : l’analyse du contexte le choix des exploitants l’aménagement des exploitations le suivi des réalisations. Les bénéficiaires du projet ont participé à toutes les étapes d’identification et de réalisation du projet, y compris au processus de décision et au financement de certains aspects de sa réalisation. 1. Analyse du contexte agro-socio-économique des exploitations 1.1 – Contexte géographique Les exploitations bénéficiaires du projet de reconversion sont localisées dans une zone frontalière algéro-tunisienne (zone de Ain Sdira, Ouled Sdira, secteur de Babouch, Délégation de Ain Draham, Gouvernorat de Jendouba). Cette zone est située au centre du massif forestier et montagneux des Mogods-Khroumirie. La principale activité, dans la zone est l’agriculture : il existe peu d’opportunités d’emploi en dehors de l’agriculture à l’exception du secteur touristique sur la zone côtière située au Nord de l’exploitation (Tabarka). Il y a, dans la zone du projet, une forte pression sur les ressources naturelles (et notamment sur le foncier) : la densité de population dans la Délégation de Ain Draham est élevée, de l’ordre de 120 à 125 habitants par km2. 1. 2 - Les systèmes de production présents dans les exploitations bénéficiaires se caractérisent par : – le fait que les superficies exploitées sont très limitées de l’ordre de 5 à 6 hectares par exploitation et que le foncier est très morcelé : ainsi, chaque exploitant exploite au minimum 4 à 5 parcelles qui sont éloignées les unes des autres, – la présence d’une association entre élevage et agriculture. Les principaux élevages ont des élevages d’ovins et de caprins. La culture principale dans la zone est celle du tabac mais il existe des superficies limitées consacrées aux cultures vivrières (pomme de terre, oignon, tomate, piment…), – Un capital d’exploitation limité : certaines de ces exploitations pratiquent la culture attelée, rares sont celles qui ont des moyens de transport rapides et 48 donc une intégration au marché limitée du fait que ces exploitations sont situées dans une zone enclavée. – Le fait qu’une bonne partie des travaux agricoles se fait manuellement : semis de l’orge ou du blé, fauche du foin, désherbage, et que c’est la force de travail familiale qui est utilisée pour réaliser les différentes opérations sur ces exploitations…… – Enfin, que les Chefs d’exploitation sont obligés d’aller chercher des opportunités d’emploi à l’extérieur de leur exploitation car les ressources disponibles sur l’exploitation ne permettent pas d’améliorer le niveau de vie de la famille. 1. 3 - Les contraintes Sur la base des discussions menées avec les exploitants bénéficiaires, il a été possible d’identifier les contraintes principales au développement de la zone. – La première contrainte est la prolifération des sangliers dans la zone périphérique forestière des exploitations. Les sangliers prolifèrent d’autant plus dans cette zone qu’il est interdit de chasser dans les zones frontalières. Le sanglier provoque des dégâts importants sur toutes les cultures sauf sur la culture de tabac4. – Les exploitants pensaient être contraints de cultiver du tabac afin de protéger leurs autres cultures. – la deuxième contrainte est l’absence d’un moyen efficace pour contenir les assauts des sangliers. En effet, les parcelles proches des habitations sur les exploitations sont clôturées. Cependant, ces clôtures sont sommaires puisqu’elles sont constituées de branchages. Les exploitants5 sont obligés de refaire cette clôture chaque année, ce qui est très coûteux en temps de travail. – la troisième contrainte est l’absence de moyens financiers pour l’approfondissement des puits présents sur les exploitations, la remontée de l’eau pour développer des cultures irriguées à forte valeur ajoutée et pour la construction de clôtures autour des parcelles exploitées6. 2. Le choix des exploitants bénéficiaires du projet Le premier exploitant s’est porté volontaire. Le premier bénéficiaire a sélectionné les 2e, 3e et 4e agriculteurs bénéficiaires sur la base des critères identifiés conjointement à savoir : le bénéficiaire devait avoir une source de revenu autre que l’agriculture, le bénéficiaire devait être travailleur et sérieux. Le 1er agriculteur bénéficiaire est âgé de près de 60 ans et semble être respecté dans la zone. De plus, il a une bonne connaissance des habitants de la zone. Les 3 autres agriculteurs choisis ont des liens familiaux avec le 1er agriculteur bénéficiaire. Pour chacun des quatre projets identifiés, une enquête a été réalisée, dans la zone, auprès de l’agriculteur bénéficiaire. Lors de cette enquête, il y a eu visualisation des parcelles de l’exploitant. Puis, un entretien semi-directif a été réalisé auprès de l’exploitant concerné. Au cours de cet entretien, différents thèmes ont été abordés pour l’établissement du diagnostic de la situation agricole de l’exploitation, l’identification des contraintes entravant le développement de l’exploitation, la formulation de propositions concrètes pour lever ces contraintes au développement et pour permettre la reconversion de l’exploitation productrice de tabac. Un rapport de cette première phase comprend le diagnostic de la situation agricole de l’exploitation, les contraintes au développement, les différentes actions de développement préconisées et leur dimensionnement et le coût total du projet. 3. Aménagement des exploitations Trois aménagements principaux ont été réalisés : clôture, puits, plants. La réalisation des différents projets à été progressive, le premier projet de reconversion démarré en juin 2001. C’est l’action d’installation de la clôture qui a pris le plus de temps. La gestion de la réalisation du premier projet a été assez souple dans le sens où la responsable du projet a essayé d’impliquer l’agriculteur et de le responsabiliser. Par exemple, le responsable du projet et l’agriculteur ont contacté conjointement les fournisseurs (notamment pour les achats coûteux comme le grillage et la motopompe) et se sont mis d’accord sur le type de matériaux ou matériels à acheter : le projet a été notamment retardé de quelques semaines car le fournisseur contacté ne pouvait fournir que du grillage d’une hauteur de 1,5 m alors que l’agriculteur désirait un grillage d’une IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Quel espoir pour l’Afrique ? hauteur de 2 m. L’agriculteur devait prendre l’initiative d’acheter lui-même les matériaux dont il avait besoin et dont les coûts n’étaient pas très élevés (ciment, gravier, fer, piquets, ruches….) sachant que ces dépenses seraient remboursées sur présentation de factures. La participation financière de l’agriculteur au projet s’est faite sous forme de journées de travail. Pour l’installation de la clôture et l’action de plantation des oliviers, l’agriculteur a eu recours à de la main d’œuvre extérieure non remboursée en totalité. L’approvisionnement en matériaux de construction (gravier, ciment, fer..) a été réalisé localement dans la localité de Tabarka, en piquets, grillage, motopompe et tuyaux dans la ville de Béja. Le suivi du projet Le deuxième projet de reconversion a démarré en juin 2002 et s’est achevé en juin 2003. La réalisation et le suivi du projet ont été conduits de la même façon que dans le cas du premier projet. Cependant, le 1er agriculteur a été impliqué dans la réalisation du 2e projet de reconversion, notamment en ce qui concerne la construction de la clôture7. Le 1er agriculteur a prêté de l’argent au 2e agriculteur notamment pour qu’il puisse acheter les matériaux (ciment, gravier, fer…) nécessaires à la construction de la clôture. Il a loué au 2e exploitant son moyen de transport pour qu’il puisse aller acheter des plants d’oliviers dans une localité éloignée d’une centaine de kilomètres de la zone. Les 3e et 4e projets de reconversion ont été réalisés et suivis de la même manière que les deux projets précédents. Cependant, il apparaît que le 1er agriculteur s’est impliqué encore plus dans le processus notamment en finançant l’achat de piquets pour le compte du 4e exploitant bénéficiaire. Le 3e agriculteur bénéficiaire qui a une source de revenu alternative et régulière a lui-même prêté de l’argent au 4e agriculteur bénéficiaire et un contrôle social s’est opéré : en effet, les 1er et 3e agriculteurs ont très fortement encouragé le 4e bénéficiaire pour l’inciter à avancer les travaux. Compte tenu du fait qu’il a des moyens limités, le 4e essayait de régler ses problèmes de survie quotidiens plutôt que de se concentrer sur l’organisation des travaux pour la construction des clôtures. 1. Les aménagements La première année, un seul agriculteur a bénéficié du projet de reconversion d’exploitations productrices de tabac. Les principales actions réalisées dans le cadre de ce premier projet achevées en mai 2002 sont : • l’installation d’une clôture autour de la parcelle exploitée pour prévenir les assauts et les dégâts occasionnés par les sangliers, • le développement de la culture d’olivier en remplacement de la culture de tabac, • le développement des cultures maraîchères irriguées • le développement de l’apiculture. La deuxième année a été réalisées l’installation d’une clôture autour de deux parcelles exploitées, la parcelle située près du lieu d’habitation de l’exploitant et une parcelle un peu plus éloignée : • le développement de la culture de l’olivier en remplacement de la culture du tabac • le développement de cultures spéciales telles que la culture de pois chiches et la culture d’arachide. La poursuite du projet sur deux autres exploitations s’est déroulée en 2003 et 2004 par l’installation de la clôture de la 3e et 4e exploitation. 2. Les effets immédiats du projet 2.1. Sur les systèmes de production A la suite de la réalisation des projets de reconversion d’exploitations productrices de tabac, nous constatons un changement au niveau des systèmes de production : diversification des systèmes de production, installation sur les parcelles clôturées de cultures d’oliviers et adoption de cultures fourragères telles que l’avoine. Ainsi, l’avoine foin, culture qu’il n’était pas possible de pratiquer dans la situation avant projet, a été intégrée dans les systèmes de production. Le produit de cette culture, l’avoine foin, permet de couvrir une partie des besoins alimentaires des animaux présents sur l’exploitation et de ce fait, limite les dépenses occasionnées par l’achat de IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 fourrages secs à l’extérieur des exploitations. Nous constatons également un début d’intensification des systèmes de production pour les exploitations bénéficiaires du projet. En effet, sur certaines parcelles, certains exploitants ont prévu d’effectuer deux cycles de cultures par an : une culture d’avoine8 sur la parcelle proche du lieu d’habitation après l’installation de la clôture et, au printemps, après la récolte de l’avoine foin, de l’arachide pour tester le comportement de cette culture dans 49 les conditions édaphiques et climatiques présentes. On constate de plus en plus en développement des cultures maraîchères destinées à l’autoconsommation telles que le piment et la tomate. Les agriculteurs ont abandonné la culture de tabac. Cette culture étant très exigeante en travail il y a eu par conséquent un changement dans le calendrier de travail des exploitants et de leur famille avec un allègement de leur charge de travail notamment durant la période estivale. Dans la situation avant projet la rémunération de la force de travail, en ce qui concerne la culture de tabac, était de 0,300 dinars tunisiens par jour de travail et par travailleur. A titre de comparaison, la rémunération de la force de travail dans le cas de la culture de l’avoine foin est de 59 dinars tunisiens par jour de travail et par travailleur soit 15 fois plus que dans le cas de la culture du tabac. Dans la situation avant projet, les parcelles proches des habitations étaient clôturées de manière sommaire avec des branchages. Il revenait à la femme d’aller chercher du bois mort dans la forêt et de construire ces clôtures pendant la saison estivale. Le projet a permis un allègement de la charge de travail des femmes notamment durant la saison estivale. Ce temps pourra désormais être alloué à d’autres activités. 2.2. Sur la production de tabac de la zone La production de tabac au niveau de la zone a baissé. Lorsque les 3e et 4e projets de reconversion seront achevés, la production de tabac dans la zone aura diminué de 6.6 tonnes10. 2.3. Sur la structuration de la communauté de la zone Il semble que la réalisation du projet de reconversion d’exploitations productrices de tabac ait eu un effet sur 50 la structuration communautaire parmi les agriculteurs bénéficiaires. Il est nécessaire de savoir que tous les agriculteurs bénéficiaires ont un lien de parenté. D’autre part, le projet a permis de développer une forme d’entraide : le premier agriculteur bénéficiaire a fait bénéficier les autres de son expérience quant à la réalisation du projet. D’autre part, les agriculteurs qui avaient des sources de revenus régulières autres que l’agriculture ont aidé les deux autres agriculteurs en leur prêtant de l’argent notamment au moment où il fallait acheter certains matériaux de construction pour l’installation de la clôture. Discussion L’identification et la formulation des actions Le diagnostic de la situation des exploitations agricoles a pris en considération la réalité du terrain et les contraintes réelles au développement agricole existantes au niveau des exploitations agricoles bénéficiaires. Les actions identifiées et formulées devaient servir à lever ces contraintes et répondaient à des besoins concrets des exploitants. Le dimensionnement des actions a été également essentiel dans le sens où ce dimensionnement correspond exactement aux capacités financières des exploitants et à leur capacité en jours de travail. Les perspectives du projet Les agriculteurs de la zone, non bénéficiaires du projet, sont très curieux de ce qui est en train de se passer sur les exploitations bénéficiaires et posent des questions sur l’organisme, maître d’œuvre de ce projet. Compte tenu de ces éléments, différents dossiers de demande de financement ont été déposés par l’Association Tunisienne de Lutte contre le Cancer, auprès d’organismes11 étrangers pour obtenir des financements pour la réalisation de 20 projets de reconversion supplémentaires. Actuellement, les agriculteurs ont repris à leur compte la réalisation des actions restantes et ils devraient collaborer directement avec l’Association Tunisienne de Lutte contre le Cancer. En effet, le 3e bénéficiaire, qui lit et écrit le français, a une fiche de suivi pour la réalisation des dernières actions. Cette manière de procéder est une manière d’impliquer d’avantage les agriculteurs dans le suivi de la réalisation du projet et sa gestion. D’autre part, les quatre agriculteurs bénéficiaires ont été chargés de choisir deux autres agriculteurs qui pourraient bénéficier du projet en 200412. 1. Le Gouvernorat est une subdivision administrative. Un Gouvernorat correspond à un Département (France). 2. Les tribus khmirs sont les tribus présentes dans la région des Mogods-Khroumirie. Jusqu’à l’instauration du Protectorat Français en Tunisie (1881), ces tribus étaient des tribus dissidentes qui ne reconnaissaient pas le pouvoir central beylical. 3. Ce massif est situé à l’extrême Nord Ouest du pays. 4. Les feuilles de tabac sont amères et ne sont donc pas consommées par les sangliers. 5. En réalité ce sont les femmes qui sont chargées, durant la saison estivale, d’aller ramasser le bois mort dans la forêt et de reconstruire la clôture. 6. Il apparaît que les capacités d’investissement des exploitants de la zone sont très limitées. 7. Le 1er agriculteur a décelé des faiblesses dans la construction de la clôture autour de sa parcelle. Il a, donc, conseillé au 2e agriculteur de consolider d’avantage le grillage en l’enfouissant plus profondément et en le fixant en profondeur avec des barres de fer en fer à cheval. 8. L’avoine est une culture d’hiver. 9. La production de l’avoine foin a été valorisée au prix du marché soit 3.5 dinars tunisiens par balle de 20 kg. Ce prix est celui pratiqué à la fin du printemps, après la récolte de l’avoine-foin. 10. Cette quantité de tabac correspond à la quantité de tabac produite sur les exploitations bénéficiaires du projet dans la situation avant projet. 11. Parmi ces organismes, le Fonds Mondial pour l’Environnement. 12. La subvention de la Ligue Nationale contre le Cancer pourrait être reconduite et pourrait servir à financer deux exploitations supplémentaires, c’est à dire une 5e et une 6e. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 51 preface Albert Hirsch The fight against tobacco in Africa Daily consumption of tobacco products over a long period constitutes the first cause of premature death. One out of two regular smokers dies of a tobacco related illness and one in four dies between the ages of 35 and 69. Tobacco consumption is responsible for 30% of cancer deaths, 25% of deaths due to cardiovascular disease, 75% of deaths caused by chronic respiratory disease and it worsens chronic disorders, in particular, tuberculosis. According to the World Health Organization (WHO) in 2005, tobacco consumption killed nearly 5 million people around the globe, half of them in developing countries, and the estimate for 2025-2030 raises this number to 10 million of which 7 million will be from developing countries. WHO estimates that during the 20th Century about 100 million people have died of tobacco use, and tobacco could kill one billion people during the 21st Century. The International Agency for Research on Cancer (IARC) indicates that passive smoking increases lung cancer and cardiovascular diseases by 30%. The development of this industrial epidemic follows male prevalence which reaches its peak and then decreases over the next 50 years. For women, the pattern is the same, but there is a time lag of around fifty years starting from smoking initiation. The epidemic is responsible first for male mortality and then female by a twenty year difference. Thus tobacco related deaths are observed after twenty to fifty years of consumption, and the peak of the epidemic is reached approximately in one century. Additionally, the number of deaths stabilises or decreases in industrial countries due to the decrease in prevalence observed in these countries after several decades. On the contrary, the number of deaths increases in poor countries, which constitute the market reserve for the tobacco industry. Health and social effects, which hinder development, contribute to environmental degradation (drying tobacco is one of the primary causes of 52 deforestation) and increase poverty, are serious threats for developing countries, especially, African countries. To reach the objective of zero-exposure to tobacco smoke, reducing tobacco products’ supply and demand are two complementary approaches. Regulating demand implies a total ban on promotion and advertising; one annual but significant increase of the retail price, based on tobacco weight and via tax increases on all tobacco products; printing visible, rotating and appropriate health warnings on the packs of cigarettes; banning smoking in all enclosed public places, especially workplaces; and clear and meaningful, labelling of tobacco smoke components, ingredients and additives. Finally, we can reach different populations with precise information through mass media campaigns and communication strategies on the effects of tobacco consumption, on tobacco products’ ingredients and on the industry’s strategies, which are regularly condemned for their lies and manipulative actions targeting vulnerable populations, notably, in developing countries. Only very few countries in the world have developed a comprehensive tobacco control programme. This is especially true in Africa where a great number of countries lack legislation, face corruption, poverty and an increasing number of threats to individual and community health, leave the door open for all private and particular interests to take over the collective interest. The tobacco industry knows how to take advantage of this situation. Reducing demand includes large mass media campaigns, once again, a measure in most cases not really affordable for African countries, and cessation treatments accessible to the population. Indeed quitting smoking is beneficial at any time and regardless of the duration of smoking and the amount smoked. These health gains are very rapidly observed in respiratory infections in children exposed to passive smoking from people close to them, and are noticeable after several months for cardiovascular diseases and several years for cancer. On an individual basis, techniques to quit smoking include medication (nicotine replacement therapies and catecholamine reuptake inhibitors) costly and in practice unaffordable for developing countries. However, the advice of a health professional (midwife, nurse etc.) is efficient and, if the practice is widespread, can have an impact on different groups. In reality, “denormalising” tobacco use, the result of reducing demand by developing a society that downgrades and limits tobacco use, strongly impacts on quitting intents and is the most effective method to reduce the number of new smokers and tobacco consumption. May 31st, WHO’s World No Tobacco Day, cannot sum up the efforts that have to be made, but it is the perfect occasion to mobilise public opinion and raise awareness and it should not be neglected. Sustaining programmes which work on supply and demand on a long term basis, evaluating the results and tackling the weaknesses are necessary in order to obtain significant public health gains. The tobacco trade does not know borders and the tobacco industry organises smuggling. A third of the world’s cigarette production is distributed illegally and eludes taxes. African states represent a large pool of potential markets for the industry. This is the general framework for the fight against tobacco. In view of this threat, African countries have organised themselves to obtain and implement the Framework Convention for Tobacco Control (FCTC), adopted by the World Health Assembly on May 23rd, 2003. This treaty came into force on February 27, 2005, for those countries that ratified it. The on-going negotiations Albert Hirsch Vice-President French League against Cancer Paris, France Email: [email protected] IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 for additional protocols in the treaty, especially regarding illicit trade, should hinder the development of tobacco consumption and the expansion of the tobacco industry in developing countries. This special issue on the growing tobacco crisis in Francophone Africa, brings together experience, evidence and the contribution of organisations working on the ground. It represents an essential stage in the development of the IUHPE’s and CDC’s five-year cooperative agreement. Preventing the announced catastrophe for Africa, this is the challenge to which we must respond. editorial Marie-Claude Lamarre and Sylviane Ratte The growing tobacco crisis of tobacco consumption in francophone Africa This supplemental issue of Promotion & Education has received financial support from the United States Centers for Disease Control and Prevention, an Agency of the Department of Health and Human Services, and the French League Against Cancer. In 2002 the IUHPE signed a Cooperative Agreement with the United States Centers for Disease Control and Prevention (CDC), an Agency of the Department of Health and Human Services, after identifying a number of areas of common interest to develop health promotion research and initiatives, and disseminate expertise and information both at global and regional levels. Since the agreement became effective in August 2002, the IUHPE has functioned as a facilitating and often coordinating agency for a comprehensive global health promotion and health education programme for developing public health policies, disseminating evidence-based knowledge and practical experience, and building capacity in different areas, one of them being, tobacco control. As part of the 5 year Cooperative Agreement, the CDC entrusted the IUHPE with the coordination of a project on global tobacco control including a focus on Francophone Africa. This multi-partnership project is coordinated by the IUHPE and includes the participation of international, national and local organisations, such as, the World Health Organization (WHO/HQ, and WHO/AFRO), the US Centers for Disease Control and Prevention (CDC), the Coalition against Tobacco of Quebec, SOS Tabagisme from Mali, the International Union Against Cancer (UICC), the European Network for Smoking Prevention (ENSP), the French National League Against Cancer (LNCC), the International Francophone Network of Health Promotion (REFIPS), the Observatory of Tobacco in Francophone Africa (OTAF), the International Union Against Tuberculosis and Lung Disease (IUATLD), The Campaign for Tobacco Free Kids, the Canadian Public Health Association (CPHA), and the Ministry of Health and Social Services from Quebec. Actions carried out in the context of the project aim to address the tobacco situation in Francophone Africa. Tobacco consumption in Africa is lower than in other parts of the world; however, research shows that consumption is rising rapidly throughout the continent. The tobacco industry has developed solid marketing and promotion campaigns. If tobacco is not regulated and controlled, an epidemic of chronic diseases and incapacities will soon materialise. Africa is thus at a challenging, yet possible, turning point of slowing, even preventing this epidemic IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 and protecting its future population’s health. Public health counter campaigns and regulation can contribute to reducing the tobacco industry’s impact. In order to do this, it is essential to inform and raise awareness among the African population on the tactics and strategies used by the tobacco industry to create new generations of smokers. This will serve to complement decision makers’ efforts to protect the public’s health both through national and international legislation, the latter as drafted in the Framework Convention on Tobacco Control. The importance and necessity to increase media communications and collaboration in Africa are evident. Decision makers will need to have a solid support base when adopting and implementing tobacco control strategies, as outlined in the Framework Convention. It is equally important, that the public’s awareness is raised on the health risks of smoking in order to make the new and reinforced strategies against tobacco work. Marie-Claude Lamarre Executive Director IUHPE Email: [email protected] Sylviane Ratte Tobacco Programme French Cancer Institute Email: [email protected] 53 C. Audera-Lopez, p. 7 This special publication on the growing tobacco crisis in Francophone Africa contributes to this effort and will serve as an important resource for the tobacco control community, including public health experts. It will also contribute to raising public awareness and sensitising opinion leaders, as well as providing a reference for local activists, media professionals, policy makers and the public at large. The publication provides a snapshot of existing knowledge on the tobacco situation in French-speaking Africa and the emerging responses to control the growing epidemic. Articles will present current data on prevalence, an assessment of the health and economic impact of tobacco in the region, the tobacco industry’s market expansion forecasts and their strategies to deflect public health measures. Specific topics particularly relevant to the region such as smuggling, poverty and advertising are covered by short articles commissioned from Francophone African journalists. Finally, an analysis of current initiatives and developments in health promotion and tobacco control illustrates how the region is organising itself both locally and internationally to best respond and impede the growing epidemic. The different testimonies in this special issue well reflect the tobacco industry’s strategy to target Africa as their development epicentre with a rise in consumption estimated at 16% in ten years according to the WHO Tobacco Atlas (Mackay and Eriksen, 2002.) Nevertheless, as Corne van Walbeek writes in her article’s conclusion, the fight against tobacco can be won and the number one ingredient for this achievement is a strong political will as a result of partnerships at all levels (international, national and local) and effective measures which have already proven to be successful. The development, signing and ratification of the Framework Convention represent a first victory and tremendous hope for those who have been fighting tobacco for decades. Health consequences of the tobacco epidemic in West African Francophone countries and current tobacco control The burden of disease due to tobacco for each country will depend on the prevalence of tobacco use and the duration of the epidemic. Given that the tobacco epidemic in West African Francophone countries is relatively recent, the burden of disease due to tobacco use is currently low. However, tobacco related burden of disease in Francophone West African countries is increasing as the number of smokers continues to increase and the population has been smoking for a longer period of time. If the current trends continue, West African countries will be suffering the massive consequences of tobacco use in two or three decades. Apart from the classical health consequences of tobacco consumption such as certain types of cancer and cardiovascular diseases, there are some conditions of special importance in low income African countries such as the increased risk of tuberculosis infection and mortality amongst smokers, low birth weight for babies of smoking mothers, and tobacco consumption associated malnutrition especially amongst women. Furthermore, developing countries, with inadequate resources and other important health issues, cannot afford the costs of the chronic degenerating conditions caused by tobacco use, as these are very expensive to treat. Tobacco control in Francophone African countries is still deficient. Human and financial resources which are often scarce in West African countries are dedicated to other health issues since tobacco is normally not amongst the public health priorities. Legislation in Francophone African countries is limited and not adequately enforced. A major reason for governments’ inaction on tobacco is their fear of creating unemployment and loss of revenue from tobacco taxes. This fear is derived mainly from the arguments of the tobacco industry. Apart from lobbying governments, the tobacco industry uses all kinds of strategies to market their products in these countries and faces practically no barriers to their business in these countries. It is essential that Francophone African countries take immediate action and develop and implement comprehensive multisectoral tobacco control programmes. These programmes must be integrated into the existing public health programmes and make use of existing infrastructure and resources in order to stop the tobacco epidemic from expanding. In February 2005, the WHO Framework Convention for Tobacco Control (WHO FCTC) entered into force. Most Francophone African countries have signed the treaty thus expressing their intention to become Parties in the future. WHO urges these countries to become Parties as soon as possible and to implement the WHO FCTC provisions in order to control the tobacco epidemic. WHO in turn will provide guidelines and assistance for the process of becoming Parties to the treaty and implementing tobacco control measures outlined therein. Reference Mackay, J. & Eriksen, M. (2002). The Tobacco Atlas. World Health Organization, Geneva. 54 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Abstracts J. de Beyer, p. 12 The economic impact of tobacco consumption in Africa The economic contributions from tobacco cultivation and sales of products are often noted – jobs and incomes for farmers and employees, tax revenues for governments and enormous profits for cigarette companies, and for some countries, foreign exchange from net exports and foreign investment. These are of course important. But set against these economic gains, there are also large economic losses that are less visible and less talked about, but also need to be counted. Many of these economic losses arise from the adverse health effects of tobacco use, but there are others too that affect a much wider group of citizens, and in particular, may exacerbate poverty among smokers and their families. This paper looks at the economic impact of tobacco use from the perspective of families, and at national level, for developing countries, providing a framework for considering the specific situations in Francophone African countries. Set against the economic benefits from tobacco, there are substantial economic costs. Annual health care costs are higher for smokers, and the burden of these costs falls on families, the public purse and employers/insurers. Earnings and productivity losses because of tobacco-related illness and premature death can be huge, and are borne by employers and employees. Illness is a major precipitating cause of poverty. Lit cigarettes cause thousands of fires and lost lives. Environmental damage to the soil from tobacco growing, pesticides and fertilizer, and deforestation resulting from firewood use to cure tobacco, can impose high economic losses. And there is the insidious, often overlooked cost of harm to the well-being of poor families whose scarce resources are used for cigarettes and other tobacco products instead of food and other necessities. We conclude that reducing tobacco use is good for health, good economics, and good for development. S. Ratte and K. Slama, p. 17 The state of research in Francophone Africa Given the mortality and morbidity attributed to tobacco worldwide, global funding for tobacco control research, is greatly insufficient. If compared with the fight against other diseases, tobacco control remains grossly under-funded. Data necessary to monitor the tobacco epidemic is inadequate even in the richer countries. It is therefore hardly surprising that studies on the state of data in developing countries and especially in francophone Africa conclude that standardised and comparable data are missing in all fields of tobacco control. Data available is often old, incomplete and hardly representative. This can be explained by both the lack of adequate capacity to conduct research and the low priority given to tobacco control as a health problem. In poor countries and regions where other diseases such as malaria and AIDS seem more pressing, the tobacco industry has almost no difficulty in using unfounded arguments about its contribution to the economy. Public authorities are thus intimidated by the threats of economic loss or attracted by immediate economic gains. This too often weakens the political will to act on issues of tobacco control. The little data available for the region, however, is alarming. Tobacco consumption has rapidly increased in recent years. This trend is confirmed by tobacco industry projected expansion in the region. Consequently, research programmes for Francophone African countries need to take into account the emergency of the situation, the context of Francophone Africa and, as well as, the limited resources available. Recently global research programmes such as the “Global Youth Tobacco Survey” have begun helping low-income countries in addressing the need for comparable and standardised data. The subject of an appropriate research agenda for tobacco control for low income countries has been discussed by international, national agencies, as well as, the NGO community in the context of the development of the Framework Convention on Tobacco Control. Given that the most important factors as regards changing tobacco use in a population include changing its IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 social acceptability, as well as, providing a legal framework for tobacco control, recommendations for appropriate research for low-income countries have highlighted the need to define research programmes able to support actions which will produce the largest impact on the population, will serve to accelerate the ratification of the FCTC, will hasten the adoption of low-cost evidence-based measures such as tax increases, complete bans on advertising, smoke-free legislation, and will stop the tobacco industry’s offensive in these countries. Large international initiatives to support the development of tobacco control research in low-income countries and particularly Africa have been launched. However, because of the language barriers, African Francophone countries may not have the same access to them than their Anglophone counterparts. Special attention should, therefore, be given to strengthen recent initiatives in this field which take into consideration the important dimension of language for Francophone Africa. 55 I. Saouna, p. 22 Poor countries: the new “Eldorado” of smoking addiction In Niger, the cost of one pack of cigarettes is equal to that of one day’s nourishment. In Bangladesh, 10 million people would be freed from malnutrition if the money that they spent on tobacco was used instead to purchase food. Tobacco impoverishes entire nations, just as it does individual families. The tobacco industry and cigarette producers halted their expansion in rich countries, and they have now launched a full attack on developing countries. Urgent action is imminently needed in order to put a stop to the foreseen health and social catastrophes linked to tobacco consumption. Tobacco industry tactics This abstract is a combined summary of the articles written by N. Collishaw, F. Damphousse, L. Gauvin and F. Thompson (p. 28-33). In the late 1990’s legal action against tobacco manufacturers around the world led to the release of millions of pages of the tobacco industry’s own internal documents. These documents revealed the strategies and tactics to recruit new and young smokers, deny the health consequences of smoking, delay and defeat public health measures and legislation, as well as criminal activities which include scientific fraud, participating in organised smuggling, setting up of front organisations, and corruption. Examples of the tobacco industry’s condamnable behaviour are presented through four Canadian experiences. These tactics are deployed worldwide by the tobacco manufacturers and are increasingly relevant in the context of Francophone Africa. “Cigarette smuggling: a wide scope phenomenon only there to serve the interests of big tobacco manuafacturers” uses industry officials’ quotes and documents to describe how tobacco manufacturers are involved in the organisation of smuggling and how manufacturers use smuggling in two ways: on one hand, to flood markets with cheap cigarettes and defeat governements’ efforts to reduce tobacco consumption by adopting one of the most efficient public health measures (ie: high taxation of tobacco products) and on the other hand, by using the false threat of increased contraband to scare politicians and prevent them from 56 adopting strong fiscal policies. The Framework Convention on Tobacco Control (FCTC) with a protocol on smuggling and the collaboration between international agencies is a means to counter and defeat the tobacco industry attemps at sabotaging efficient public health measures. “The conquest for non-smoking zones confronted with industry tactics: scientific misinformation and front groups. The Canadian experience” highlights that the tobacco industry saw as early as 1978 the problem of passive smoking as the most threatening issue in terms of its future economic viability. This resutled in a very sophisiticated strategy from the cigarette makers including asking communication consultants and public relations firms to create a false opposition to smoking bans using front groups completely financed and orchestrated by the tobacco industry. This explains why banning smoking, an apparently easy measure to adopt given the knowledge of its considerable health and economic benefits and given public opinion in favour of it, became so difficult to obtain and implement. Revelation of these strategies has contributed to the tobacco industry slowly loosing ground on the issue. A lot still needs to be done to protect people from passive smoking but there is progress in Canada. “Tobacco industry strategies: marketing cigarettes to young people” describres how tobacco manufacturers through their internal documents and litigation have been forced to admit or found to deliberately target young people in their marketing strategies to recruit new smokers, despite having denied it publicly for years. Given that most smokers start and get hooked on tobacco in their ealy years and that the link between advertising, promotion and tobacco initiation is well documented, countries should adopt a complete ban on advertising and promotion. The FCTC is the best avenue for a global ban. “The biggest fraud of the century: ‘light’ cigarettes” exposes one of the largest scams companies have exerted on their consummers. Exploiting the dreams of smokers to find cigarettes which would not harm them as much, tobacco manufacturers duped and lurred millions of people by making them believe such a product existed and encouraged them to take up “light” cigarettes, while they knew internally that these products were by no means less dangerous. Tobacco manufacturers also lurred public authorities by neglecting to share vital information on the way smokers do not behave like measuring machines and would compensate by drawing on their cigarettes according to their nicotine intake needs. Thus smoking machines utilised to measure tar and nicotine intake could never reflect the reality and would render the content information printed on packs of cigarette meaningless. Very few countries have banned the misleading descriptors such as “light”. It is hoped that the FCTC which includes a provision on the use of descriptors will prevent the fraud being repeated in the rest of the world and especially in the countries of Africa. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Abstracts C. Van Walbeek, p. 25 Tobacco control in South Africa The aim of this paper is to briefly describe South Africa’s experience in tobacco control, and to highlight some of the lessons that are applicable to other developing countries. South Africa’s tobacco control strategy is based on two main pillars: (1) rapidly increasing excise taxes on tobacco, and (2) comprehensive legislation, of which the most important features are banning all tobacco advertising and sponsorship, and prohibition of smoking in public and work places. As a result of the increases in the excise tax, the real (inflationadjusted) price of cigarettes has increased by 115% between 1993 and 2003. Aggregate cigarette consumption has decreased by about a third and per capita consumption has decreased by about 40% since 1993. Despite the decrease in cigarette consumption, real government revenue from tobacco excise taxes has increased by nearly 150% between 1993 and 2003. Some important lessons can be drawn from South Africa’s experience in tobacco control. Firstly, strong and consistent lobbying was required to persuade the government to implement an effective tobacco control strategy. Country-specific research, drawn from a variety of disciplines, was used to back up and give credibility to the lobbyists’ appeals. Secondly, rapid increases in the excise tax on cigarettes are particularly effective in reducing tobacco consumption. An increase in the excise tax increases the price of cigarettes, which in turn reduces cigarette consumption. In South Africa a 10% increase in the real price of cigarettes decreases cigarette consumption by between 6 and 8%. Similar results have been found for many other developing countries. Thirdly, while an increase in the excise tax is generally regarded as the most effective tobacco control measure, tobacco control legislation also plays an important role in a comprehensive tobacco control strategy. Bans on tobacco advertising and bans on smoking in public and work places de- normalise and deglamorise smoking, and are likely to make other tobacco control interventions more effective. Fourthly, the industry would typically claim that they want to be constructive partners in drafting “reasonable and sensible” tobacco control legislation. In South Africa’s experience, when they were involved in the drafting process in 1993, the role of the industry was to delay and water down the legislation. In drafting an amendment to the original legislation in 1998, the industry’s views were largely ignored, and the result was a more comprehensive and effective piece of legislation. Fifthly, tobacco control legislation, particularly laws banning smoking in indoor public places, is largely self-enforcing. It does not require heavy-handed police intervention, as is typically claimed by the industry. The legislation clarifies and explains that the rights of non-smokers to clean air supersede the right of smokers to smoke. Smokers typically refrain from smoking where smoking is not allowed. Africa: is the cigarette the product of the future? This abstract is a combined summary of the six articles written by Francophone African journalists and submitted by Syfia International (p. 34-38). For the tobacco industry, the best way to sell its products is to ensure their promotion and marketing and to avoid any constraining regulations. In Africa, all of these conditions are met impeccably which make this continent the market of the future, with complete disregard for the health of the consumers. Cigarettes will not kill Miss C. She does not smoke, and cigarettes even provide her with her livelihood. This beautiful Guinean girl was recruited to convince young people that “smoking is cool”. Her name is not revealed in order to protect her from losing her job, but she repeatedly goes over her speech by heart: “A non-smoker isn’t with the ‘in’ crowd. He’s reduced in the level of importance to the very last. Not smoking is considered out of style, old-fashioned.” And she continues without hesitation, “Smoking is a civilized civic act, one of the highest social standing; it is the habit of a trendy, modern and state-of-the-art man.” “We are never short of ideas or arguments to encourage young people to smoke and above all to be a loyal consumer of our brand,” she explains, “because the competition in the tobacco industry is merciless. The tobacco market is becoming that which does the most advertising. The art of convincing is a major asset. We don’t hesitate to light the cigarette for the young person when necessary.” Cigarette girls In Conakry, these cigarette girls are everywhere. There is no public place left IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 uncovered. They are in front of the markets, the nightclubs, and the stadiums. They have even been known to give away entire cartons for free in order to introduce their brand of cigarettes to potential new customers. There are not strict specific criteria which are obeyed in the recruiting of these cigarettes hostesses other than the two “s”: sexy and smooth-talking. Twelve well-known brands share the Guinean tobacco market. Some of them employ up to one hundred people. “In this line of work”, explains the representative, “we crisscross the entire country in 4x4 vehicles with a per diem of 5,000 Fcfa (7.60 Euros) per day and a monthly salary of 75,000 Fcfa (115 Euros). Tobacco advertising and marketing allows me to feed my family, put money away into savings and above all establish fruitful and profitable relationships.” This type of professional situation is extremely envied 57 in a country where 40% of the population lives under the threshold of poverty. But in countries which are so poor, where public health is considered important, the maintenance of all of these small informal tobacco jobs is an equally important social concern at stake. This explains in part the reluctance of the public authorities to regulate cigarettes sales and advertising. Guinea is not the only African country where the cigarette venders have all of the rights. Benin, for example, which is ranked 158th out of the 178 states inventoried in the 2002 World Human Development Report, signed the Framework Convention on Tobacco Control, the first international public health treaty, on June 18, 2004. While this demonstrates a certain political will, nevertheless, on the economic front, the state claims to not have the power to give up neither the sector’s jobs nor the taxes that they generate. This is the reason why the cigarette distributors work and play with total freedom. In Benin, a visit of anti-tobacco legislation is quickly done: there has been only one ministerial action taken in October 1991. It has to do with a law that forbade smoking in hospitals and health care services. As for the production and commercialisation of cigarettes, “total liberty is given to private businesses since the end of the 1980’s”, states an agent of the Department of Interior Commerce. The health of the economy above all The state of Benin has, it appears, a lot to gain from the absence of restrictive measures on tobacco commerce. In the beginning of 1990s the British group Rothmans (taken over in 1999 by the American company BAT British American Tobacco) bought Manucia, the public enterprise which produces cigarettes. From 2000 to 2002, the amount of taxes collected by customs officers in Benin on the importation of tobacco and cigarettes almost doubled, passing from 610 million Fcfa to more than 1.1 billion. Above and beyond the direct revenue collected, the state moreover is not at all inclined to put a stop to the sponsoring of cultural events (namely music concerts) by these firms. “One must pay to occupy a public space. We give the authorisation permit against a transfer of the sum of 25,000 Fcfa as well as the payment of a daily rate of 1,000 Ffca”, reveals a trade service employee from the city hall in Cotonou. The municipality also collects 58 annual licensing fees paid by communication firms, owners of the advertising billboards which regularly promote the firm’s products. Indeed, these are ridiculously small amounts of money in comparison to the damage caused to health by tobacco and cigarettes. The Democratic Republic of Congo, ahead of Benin, has had a law to reduce the promotion of tobacco consumption since 2002. Advertising is not allowed in the media or on roadside billboards. The health advertisement “Smoking is harmful to health” appears on cigarette packs and cartons, as well as the terms tar and nicotine. Nevertheless, as in most African countries, these warnings risk going completely unnoticed, since the majority of smokers buy their cigarettes individually and rarely see the colour of a single pack of cigarettes. While there is no advertising, there are numerous articles in the press when certain tobacco companies justify and position themselves in the fight against tobacco. For example, in Kinshasa, Tabacongo sponsored and led “youth smoking prevention” campaigns with recognition in the media. According to the Director General of Tabacongo, it is the extent of the youth tobacco smoking phenomenon which drove the company, “to research real solutions with other components of society, fair solutions to this societal problem.” Put forth as a surprisingly susceptible counterpropaganda to deprive their future clients of cigarettes, it is, however, rather a new commercial strategy to gain publicity and get their name spoken more frequently in a public fora. Saying “no!” to tobacco sponsorship Conscious of the ambiguity between public health and economic health, the communes apply themselves in making due without the poisoned support of the cigarette producers. For example, the commune of Koumassi in Cote d’Ivoire has organised every Friday for the past two years a free public television show which attracts thousands of young people. Internationally renowned artists such as Aicha Kone and Gadji Celi have already participated in this show broadcast by Radio N’Gowa. The show is financed by a wide range of partners: decorative art companies, cosmetics manufacturers, music labels, CD and cassette distributors. M. Wayoro Guy-Charles, Director of the Socio-cultural Department of Koumassi, explains that since their election in 2000, out of principle, the Mayor and his team have demanded that the show avoid any association with tobacco or alcohol firms. “We recognise that cigarettes do more harm than good, and we want to organise healthy activities for the rural population”, confirms Koffi William, a member of an association which organises football tournaments that are very popular in Ebilassokro, in eastern Côte d’Ivoire. The same policy was adopted by the officials of the Cultural Centre in Abidjan where any poster or activity which involves tobacco and/or alcohol as partners is strictly forbidden. Smoking kills Still very isolated, the reactions of the organisers of these events testify to the growing awareness of the danger of cigarettes and more importantly of the contradiction that exists in financing these types of activities for youth with money from a business which produces a product which is harmful to their health. In the poorest regions where there is no market for cigarettes, the question does not arise: there is no sponsoring where there is no market! Unfortunately, where there is no significant prospect for selling cigarettes there is indeed one for chewing tobacco. For example, in Madagascar a medical thesis written in 1995 reported that nearly one in three people (31% of the population) chewed industrial tobacco. Nevertheless, 75% of the population lives under the poverty level. Chewing tobacco is therefore a luxury even if chewing tobacco is 20 times more expensive than cigarettes. An expensive luxury in terms of life expectancy, since “several studies done across the world have established a strong link between chewing tobacco and cancer of the mouth and throat”, as conveyed by the Canadian Cancer Society’s website. Meanwhile, the firms which produce cigarettes are not suffering at all and remain successful. British American Tobacco, the day after the World TobaccoFree Day in 2004, inaugurated in Benin an extension of their facilities which allow them to reach a production of 4 billion cigarettes per year… that’s enough to make 6 million people in Benin smoke 34 packs of 20 cigarettes. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Abstracts www.syfia.info Syfia International – Africa on a daily basis From a press agency to a training agency… • Syfia International is an independent press agency which regroups 10 press agencies (6 African agencies, and 4 in Europe and Canada). The agency is strong and solid, consisting of a team of 60 journalists covering 35 Francophone countries in Africa, Asia and Europe. • Over the past 15 years, Syfia has grown to be, on the one hand, a well-renowned press agency recognised by numerous Francophone media professionals and organisations and, on the other, a training agency utilised and appreciated by African journalists. • In 2004, Syfia created Syfia Grands Lacs, a regional agency focusing on the Democratic Republic of Congo, Rwanda and Burundi. Syfia International : press agency Another perspective on African countries • The distinctive characteristic of Syfia is the priority which it gives to field work and to the collection of data from live interviews and personal witnesses. The articles are for the most part drafted and written by African correspondents. A widespread dissemination to the Francophone press • Syfia produces 5 to 8 articles and investigative reports per week, which translates into more than 300 articles per year. The articles are sent to 200 Francophone newspapers, primarily in Africa. Each article is published on average by 8 to 10 newspapers. www.syfia.info: 4000 articles and 1000 photographs • The Syfia website (www.syfia.info) provides links and access to the full text format of more than 4000 articles. The material indexed in the website covers 15 years of production and includes 1000 photographs. A strong and reliable search engine facilitates researching the website. Syfia Grands Lacs: information that heals • Launched in April 2004, Syfia Grands Lacs aims to make the realities of the different populations of the various regions better known in order to fight against stigmatisation and the spreading of rumours. • The agency has three main axes of activity: the production of articles, their widespread dissemination within the three countries of the region and the training of journalists to reinforce and strengthen their professional competencies and investigative skills. Syfia : training agency • For Syfia training takes places on the ground, in the field; it is therefore inseparable from the production side of the agency’s work. Syfia’s different IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 programmes favour practical apprenticing and hands-on, long-term internships. Continuing education for correspondants • Syfia provides continuing education programmes for the journalists of its team, either by mail or telephone: 200 journalists have received training through this system. Tutorials and internships • For the past three years, Syfia’s African offices transmit their experience to young journalists from local editorial teams. FormAction: Syfia’s distance learning website • In 2004, Syfia established and launched a distance learning training website targeted aimed at African journalists who can follow the training modules designed especially for theme, all the while being followed individually by a tutor. Contact : SYFIA International 20, rue du Carré du Roi 34 000 Montpellier - France Tel : +33 (0)4 67 52 79 34 Fax : +33 (0)4 67 52 70 31 Email : [email protected] www.syfia.info 59 L. Huber, F. Thompson and S. Ratte, p. 40 The Framework Convention on Tobacco Control: is there hope for Africa? African countries have a lot to gain from the first international public health treaty. The Framework Convention on Tobacco Control (FCTC) was adopted in May 2003 by 168 member countries at the World Health Assembly. The African delegation demonstrated and put forth a strong, united front throughout the series of sessions which comprised the negotiation process. There are a number of considerable obstacles and challenges particular to this region of the world which makes it difficult to put tobacco control on the African agenda. Only a solid civil society mobilisation movement could serve as a worthy adversary to take on such a challenge. NGOs, such as the Framework Convention Alliance, provide assistance and should continue to support the activities of some of the key players who are still working in isolation on the continent. These organisations can also play a vital role by continuing to favour the provision of access to the available data and information which only exists in English so that the language barrier no longer remains a hindrance to the protection of the health of citizens in Francophone African countries. Global tobacco control treaty takes effect On February 27, 2005, the WHO Framework Convention on Tobacco Control (FCTC), the international tobacco treaty negotiated under the auspices of the World Health Organization, became international law. The International Union for Health Promotion and Education (IUHPE) applauds the more than 55 countries that have taken a major step forward in the worldwide battle against the death and disease caused by the tobacco epidemic, the second major cause of death in the world by ratifying this important treaty. The treaty is a major step forward in the worldwide battle against the death and disease caused by tobacco. It provides the basic tools for countries to enact comprehensive tobacco control legislation and take on the powerful tobacco industry. The WHO FCTC was unanimously adopted by the 56th World Health Assembly in May 2003. The WHO FCTC closed for signature on 29 June 2004 with 168 signatories (including the European Community). The first 40 Contracting Parties to the WHO FCTC were Armenia, Australia, Bangladesh, Bhutan, Brunei Darussalam, Canada, Cook Islands, Fiji, France, Ghana, Hungary, Iceland, India, Japan, Jordan, Kenya, Madagascar, Maldives, Malta, Mauritius, Mexico, Mongolia, Myanmar, Nauru, New Zealand, Norway, Pakistan, Palau, Panama, Qatar, San Marino, Seychelles, Singapore, Slovakia, Solomon Islands, Sri Lanka, Syrian Arab Republic, Thailand, Trinidad and Tobago and Uruguay. Since 30 November 2004, the following have also deposited the instrument of ratification or equivalent: Botswana, Denmark, Finland, Germany, Honduras, Latvia, Lesotho, Lithuania, Marshall Islands, Netherlands, Peru, Senegal, Spain, Timor-Leste, Turkey, United Kingdom and Vietnam. The entry into force of the FCTC marks a historic moment for global public health. This groundbreaking, legally binding treaty provides countries basic tools to protect the health of their citizens from the tobacco industry’s deceptions and slick marketing. It requires ratifying nations to adopt policies proven to reduce smoking and save lives such as: a comprehensive ban on tobacco advertising, promotion and sponsorship, and large, graphic health warning labels that cover at least 30 percent of cigarette packs. The treaty also provides nations with a roadmap for enacting strong, science-based policies in other areas, including protection from secondhand smoke, increased tobacco taxation, and measures to combat cigarette smuggling. Globally, the World Health Organization estimates that approximately five million people die each year from tobacco use. If current trends continue, this figure will reach 10 million per year by 2030, with 70 percent of those deaths occurring in developing countries. While the measures in the FCTC represent a minimum set of tobacco control policies, the treaty explicitly encourages countries to go above and beyond these measures. Strong action on the part of countries will give them the opportunity to reduce the human suffering caused by tobacco and curb runaway costs of tobacco-related health care. For more information: www.fctc.org D. Houéto and C. Kassa, p. 42 Towards a new strategy in the fight against smoking in Africa Today, the fight against smoking is a vital concern as the epidemic continues to grow along with the heavy consequences, and given in particular that those who are exposed are not only the smokers. The entire world has become aware and recognised the harmfulness of tobacco, and a number of activities have been undertaken, among 60 which can be found those of the International Union for Health Promotion and Education (IUHPE), supported by a wide range of partners. This activity which is primarily aimed at Africa, allowed health professionals from Benin to organise themselves around the success of the 1st Francophone International Seminar on the growing tobacco crisis in order to build upon the foundation which was laid in Ouidah, Benin, in November 2002. They are counting on the world-wide knowledge and expertise in the domain of the fight against smoking and, more specifically, on the political will of their governmental authorities. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Abstracts M. H. Cherif, p. 45 The tobacco problem in Francophone Africa and regional perspectives of the Francophone African Tobacco Observatory The tobacco problem is one which is both global and political. The epidemic and the growing smoking crisis in Africa is a menace to the health of our continent, with significant socio-economic repercussions to follow in the coming years. The illegal importation of cigarettes is a practice which is growing more and more within African countries, with a well-structured African network for smuggling. Smuggled cigarettes are even more toxic with very elevated levels of nicotine and tar. Approximately 1.1 billion people around the world smoke, and between now and the year 2025, this number will most likely increase to 1.6 billion. By 2030, 10 million tobacco-related deaths will have occurred, and for the most part those deaths will be concentrated in developing countries. Sponsorship as well as direct and indirect advertising are rapidly developing in all kinds of formats, with a proliferation of aggressive advertising messages targeting African populations with cynicism, manipulation, the complicity of smuggling in broad daylight, and disrespect for the law, while exploiting all of the themes which promote tobacco use to the target audiences (youth, women, the poorest groups). Everyday the tobacco industry recruits new African smokers to replace those who die. The future of the industry is represented by about 8 out of 10 people who began smoking before the age of 18 years old. The tobacco industry clearly lies at the heart of the development of the tobacco pandemic in the 20th century. Specifically, cigarettes have made tobacco a massively consumed product, constantly expanding and opening up new markets; the day before yesterday it was men, yesterday it was women and youth, and today it is the developing world. The strategy is identical: increase sales, and do goat a price which puts a heavy burden on the population’s health. The industries turn themselves towards developing countries, and namely Africa, in order to compensate for their losses in the markets of the Northern Hemisphere at a time when the demand in these countries is decreasing. The industry’s cynical strategy targets Africa as its strongest potential market for development, counting on an estimated increase in consumption of 16% over the next decade, according to WHO’s recent World Tobacco Atlas. It was imperative to establish a Tobacco Observatory in Francophone Africa (OTAF) in order to resituate the African tobacco situation, contribute to the development of the French-speaking nations in Africa, and to make known and increase awareness of its needs, its initiatives, and its actions across the world, and finally to effectively fight against tobacco and the industry’s practices. One year after OTAF was established in Bamako thanks to the consolidated efforts of all its members and support of the French League against Cancer and the International Union against Cancer, OTAF IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 was finally structured in Niamey in December 2002. OTAF is an independent entity whose mission is to gather, analyse and disseminate information on all aspects of tobacco with the objective of soliciting and supporting public health activities and interventions. It is a reference centre for Francophone Africa and a technical advisory group for the public authorities on tobacco issues. OTAF’s work is counted upon to inform the public authorities on the most effective measures to use in the fight against tobacco. OTAF’s duty is to promote activities which protect the health of young people and non-smokers, and communicate on the harmful effects of tobacco and the tobacco industry’s practices. The goal is to organise a fight against tobacco based on solid, scientific data of the highest level of quality. OTAF is the only Francophone African surveillance organisation for monitoring the tobacco epidemic, and the practices, schemes and methods of the tobacco industry which are known to be dishonest. Today, OTAF is a unique reference centre as far as the fight against tobacco is concerned in Francophone Africa. It is a partner in a number of projects with the French League against Cancer, the International Union against Cancer, and the International Union for Health Promotion and Education, among others. The success of OTAF has been crowned by a trophee having been awarded by WHO and an honorary degree signed by WHO’s Director General. 61 R. Ben Zid, p. 47 Tunisia: a pilot project on the conversion of tobacco farm production to more diversified agricultural crops The objective of the project which is presented in this article was to reconvert tobacco farms into agricultural endeavours which produce crops which are non-harmful to health, simultaneously allowing for agricultural development within a forestry ecosystem. Preamble to the Montreal Declaration The Montreal Declaration was conceived as a tobacco control charter from which all of the Francophone countries could be inspired in carrying out their own activities aiming at the reduction of smoking over the coming years. The Declaration was publicly released on the last day of the 1st International Francophone Conference for Tobacco Control (September 18, 2002) in the presence of 400 participants and the media. The most surprising and touching moment was undoubtedly that of the round of unexpected and grateful applauds which followed the reading of the Montreal Declaration by Dr. Marcel Boulanger, President of the International Scientific Committee and the person responsible for drafting the Declaration. At the close of the long standing ovation, Dr. Boulanger, one of the pioneers of the fight against tobacco in Quebec, was extremely moved and overcome with a wave of emotion. He admitted to the crowd that, even in his wildest dreams, he never would have imagined it possible for him to witness such as event. He felt like the old man Simon who exclaimed, “Now Lord, your promise has come true; you can let your servant die in peace”, when he held the baby Jesus in his arms. He concluded with humour, however, that he was certainly a privileged witness to this unique moment, but not necessarily immediately ready for a final destiny quite so… heavenly! The team, therefore, proposed an experimental pilot project to replace tobacco farms with other crops, namely fodder, tree and market crops. Fodder crops allow farms to reduce the burden put on the natural resources by the various types of farming present in the area. Furthermore, this policy contributes to the increase in revenue from those farms benefiting from the project and established a community structure for managing the project, which could become an Agricultural Development Cooperative at the close of the project. MONTREAL DECLARATION ON TOBACCO CONTROL September 18, 2002 We, tobacco control specialists from the French-speaking world, united in Montreal, have concluded that the fight against tobacco use must necessarily pass through a political solution. The tobacco industry, by propagating tobacco addiction around the world, constitutes the vector of this epidemic that kills four million people a year. We call for the introduction of a global policy that includes rigorous control over the tobacco industry. The State has the responsibility to modify those social environment elements, created in large part by the tobacco industry, that make our fellow citizens vulnerable to the tobacco epidemic. Governments must with all urgency put in place a series of effective measures, notably statutory and fiscal, supported by public financing to allow for control over the epidemic and its effects. Above all, it is necessary to: • Put an end to all forms of direct and indirect promotion of this deadly product, including sponsorships; • Make tobacco less accessible by raising taxes and controlling contraband; • Protect non-smokers from all exposure to tobacco smoke; • Promote tobacco cessation and make tobacco weaning aids accessible; • Inform the public about the content and effects of tobacco products. Since tobacco use is the worldwide source of enrichment for tobacco manufacturers, their opposition to these measures is obvious, and they represent the principal opponent to overcome. The solidarity of French-speaking countries is all the more important considering the fact that developing countries are the new targets of tobacco multinationals. The Scientific Committee 1st International Francophone Conference on Tobacco Control Montreal – Quebec - Canada Louis Gauvin Coordinator Quebec Coalition for Tobacco Control Email: [email protected] 62 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Prefacio Albert Hirsch La lucha contra el tabaco en África El consumo cotidiano y durante un periodo prolongado de productos del tabaco constituye la primera causa de mortalidad prematura. Uno de cada dos fumadores regulares fallece por causa de una enfermedad relacionada con el tabaco y uno de cada cuatro muere entre los 35 y 69 años. El consumo de tabaco es responsable del 30% de la mortalidad por cáncer, del 25% de la mortalidad por enfermedades cardiovasculares, del 75% de la mortalidad por enfermedades respiratorias crónicas y complica la evolución de las enfermedades crónicas, especialmente la tuberculosis. Según una estimación en 2005 de la Organización Mundial de la Salud, OMS, el consumo de tabaco en el mundo mató a 5 millones de personas, la mitad de ellas en los países en vías de desarrollo. Para 2025-2030 las previsiones son de 10 millones de muertes, de las cuales 7 millones en los países en vías de desarrollo. La OMS estima que el tabaco ha matado a 100 millones de personas en el siglo XX y podría matar a 1000 millones en el siglo XXI. El Centro internacional de Investigación sobre el Cancer, CIRC/IARC, estima que el tabaquismo pasivo aumenta un 30% el riesgo de cáncer de pulmón y de enfermedades cardiovasculares. Esta epidemia industrial se desarrolla en función de la prevalencia en el hombre que llega a su pico y luego decrece en 50 años. La prevalencia en el caso de la mujer sigue la misma evolución, pero con un retraso de unos cincuenta años en el inicio del consumo. La epidemia es responsable de la mortalidad masculina, y luego femenina, separadas entre sí por unos veinte años de diferencia. Así pues, las muertes por tabaco están relacionadas con su consumo durante los 20 a 50 años anteriores a la observación y el auge de la epidemia se alcanza en un siglo aproximadamente. Por lo demás, el número de muertes se estanca o disminuye en los países Albert Hirsch Vicepresidente Liga Francesa contra el Cáncer París, Francia Email: [email protected] industrializados debido a la disminución de la prevalencia observada en dichos países desde hace varias décadas. Por el contrario, el número de muertes aumenta en los países pobres, auténtica reserva de mercado para la industria del tabaco. Las consecuencias sanitarias y sociales, obstáculo al desarrollo, la alteración del medio ambiente (el secado del tabaco es una de las primeras causas de la deforestación), el aumento de la pobreza, amenazan seriamente a los países en vías de desarrollo y especialmente a África. público, lo cual está fuera del alcance de los países africanos, y la puesta a disposición de la población de métodos de ayuda para interrumpir el consumo. La interrupción del consumo del tabaco es beneficiosa por temprana que haya sido la fecha de inicio o grande la cantidad de tabaco consumida. Este beneficio se observa rápidamente en los casos de las infecciones de vías respiratorias en los niños fumadores pasivos, al cabo de varios meses para las enfermedades cardiovasculares y de varios años en el caso del cáncer. Para conseguir el objetivo de una exposición nula al humo del tabaco, la reducción de la oferta y de la demanda de productos de tabaco constituyen dos enfoques complementarios. A escala individual, las técnicas de ayuda a la interrupción del consumo comprenden métodos medicamentosos (sustitutos de la nicotina e inhibidor de la recaptura de las catecolaminas) caros y en la práctica, fuera del alcance de los países en vías de desarrollo. Por el contrario, el consejo de dejar de fumar dado por un profesional de salud (comadrona, enfermera) es eficaz y, si se repite de manera general, es susceptible de obtener unos resultados que incidan en toda la población. En realidad, la “desnormalización” del consumo del tabaco, consecuencia de la reducción de la oferta, instaurando una sociedad que desvalorice el consumo del tabaco y lo limite, potencia enormemente la intención de dejar de fumar y constituye el método más eficaz para obtener una reducción del inicio y del consumo de tabaco. El 31 de Mayo, Día mundial sin tabaco de la OMS, no podría resumir el esfuerzo que hay que hacer, pero representa una ocasión de movilización y de sensibilización de la opinión pública que no conviene descuidar. La regulación de la demanda incluye la prohibición total de la promoción y de la publicidad, el aumento significativo anual y de una sola vez del precio de venta, en función del peso del tabaco y a través de los impuestos asociados a todos los productos del tabaco, la impresión en los paquetes de advertencias sanitarias pertinentes, claramente legibles y rotatorias, la prohibición total de fumar en los espacios públicos cerrados y especialmente en los lugares de trabajo, un etiquetado claro y legible de los componentes del humo del tabaco, de los ingredientes y de los aditivos. Y, por último, una información precisa mediante campañas masivas y una comunicación lo más cercana posible a la población sobre los efectos del consumo, sobre la composición de los productos del tabaco y sobre las maniobras de una industria regularmente condenada por su actividad engañosa y manipuladora frente a las poblaciones vulnerables, en especial las de los países en vías de desarrollo. Raro es el país que disponga de un dispositivo completo, especialmente en África donde la falta de legislación, la corrupción, la pobreza, la multiplicación de las amenazas que pesan sobre la salud de las personas y las poblaciones constituyen un terreno abonado en el que se precipitan todos los intereses particulares. La industria del tabaco sabe aprovecharse de todo ello. La disminución de la demanda comporta grandes campañas dirigidas al gran IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 La asociación y el mantenimiento durante un periodo largo de tiempo del conjunto de disposiciones en torno a la oferta y la demanda de los productos del tabaco, la evaluación de los resultados y la corrección de los puntos débiles del dispositivo serán necesarios para conseguir una mejora significativa de la salud pública. El comercio del tabaco no conoce fronteras y la industria misma organiza el contrabando. Un tercio de la producción mundial de cigarrillos circula ilegalmente y elude los impuestos. Los estados 63 africanos representan una enorme reserva de mercado para esta industria. Este es el panorama general de la lucha contra el tabaco. En vista de la amenaza, los países africanos han sabido organizarse para obtener la adopción del Convenio Marco para el Control del Tabaco (CMCT) aprobado por la Asamblea mundial de la salud el 21 de Mayo 2003. Este tratado es obligatorio a partir del 27 de Febrero de 2005 para los países que lo hayan ratificado. La negociación de los protocolos adicionales del tratado, que se refieren especialmente a la lucha contra el comercio ilegal de tabaco, debería permitir detener el desarrollo del tabaquismo en los países en vías de desarrollo. Este número especial dedicado al aumento del tabaquismo en el África francófona reúne experiencia, testimonios y aportaciones de las asociaciones que trabajan sobre el terreno. Representa una etapa esencial del Acuerdo de Cooperación quinquenal entre los Centros de Control y Prevención de Enfermedades de los EE.UU. y la Unión internacional de Promoción de la Salud y de Educación para la Salud, UIPES. Evitar una catástrofe anunciada para África, éste es el desafío al que debemos responder. editorial Marie-Claude Lamarre y Sylviane Ratte El aumento del tabaquismo en el África francófona Este número especial de Promotion & Education ha recibido el apoyo económico de los Centros de Control y Prevención de Enfermedades de los EE.UU. (CDC), una agencia del Departamento de Salud de los Estados Unidos de América, y de la Liga francesa contra el Cáncer. En 2002, la UIPES redactó y firmó un Acuerdo de Cooperación con los Centros de Control y Prevención de Enfermedades de los EE.UU. (CDC), una agencia del Departamento de Salud y Servicios Sociales, después de identificar una serie de áreas de interés común para desarrollar iniciativas y estudios de promoción de la salud y para divulgar experiencia e información, tanto a escala mundial como regional. Desde que entró en vigor el Acuerdo en Agosto de 2002, la UIPES ha funcionado como organismo facilitador y, a menudo, coordinador de un programa integral de promoción de la Marie-Claude Lamarre Directora Ejecutiva UIPES Email: [email protected] Sylviane Ratte Responsable del Programa Tabaco Instituto francés del Cáncer Email: [email protected] 64 salud y de educación para la salud de alcance mundial destinado a elaborar políticas de salud pública, a divulgar conocimientos demostrados y experiencias prácticas y a capacitar en diferentes áreas, como, por ejemplo, el control del consumo de tabaco. En el marco de este Acuerdo de Cooperación a cinco años, los CDC confiaron a la UIPES la coordinación de un proyecto de lucha contra el tabaco que contemplaba diversas actividades de alcance mundial y otras de especial interés para África y, concretamente, para el área francófona. Se trata de un proyecto en el que participan diversos socios con la colaboración de numerosos organismos internacionales, nacionales y locales, implicados activamente en la lucha contra el tabaco, en especial, la Organización Mundial de la Salud, la Unión Internacional contra el Cáncer, «The Campaign for Tobacco-Free Kids», la INGCAT (Coalición internacional de las ONG de lucha contra el tabaco), la Unión internacional contra la tuberculosis y las enfermedades respiratorias, la Asociación canadiense de Salud Pública, el Observatorio del Tabaco en África francófona, la Liga francesa contra el Cáncer, la Coalición de Québec contra el tabaco, SOS Tabagisme (Mali), SOS Tabagisme (Níger) y numerosos expertos de todas las regiones del mundo. El conjunto de acciones realizadas en el marco de este proyecto pretende dar una respuesta a la situación del África francófona. Si lo comparamos con otras regiones del mundo, el consumo de tabaco es inferior en África, pero los estudios demuestran que aumenta rápidamente en todo el continente. La industria del tabaco ha orquestado además sólidas campañas de marketing y de promoción en África. Si el consumo de tabaco no se regula y no se somete a control, se traducirá en el futuro en una epidemia sumamente grave de enfermedades crónicas y de incapacidades. Ahora los países de África tienen ante sí la posibilidad y el reto de prevenir esta epidemia y de proteger la salud futura de sus poblaciones. Se puede reducir el impacto de la ofensiva de la industria del tabaco mediante contracampañas y normativas de salud pública. Para ello, es necesario, ante todo, sensibilizar e informar al público sobre las estrategias y tácticas que utiliza la industria en África para generar en las nuevas generaciones la dependencia al tabaco. Así se completarán los esfuerzos IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 editorial concertados de los responsables de las decisiones políticas para proteger la salud pública tanto a través de la legislación nacional como a escala internacional mediante el Convenio Marco para el Control del Tabaco. Es evidente la importancia de la comunicación mediática y la necesidad de aumentarla, así como la colaboración de los medios de comunicación en África. Los responsables de las decisiones políticas también necesitarán un apoyo sólido en el momento de aprobar y aplicar las estrategias de lucha y de control del tabaco en virtud del Convenio Marco. También es esencial una mayor sensibilización de la población sobre los peligros del tabaco para que permitan la aceptación de nuevas medidas y el fortalecimiento de otras ya existentes para el control del tabaco. Este número especial sobre el aumento del tabaquismo en el África francófona forma parte de esta estrategia. Constituye un material importante para los actores de la lucha contra el tabaco, incluidos los expertos en salud pública. Su objetivo es sensibilizar a la opinión pública y a los líderes de opinión y proponer una obra de referencia a los activistas sobre el terreno, a los profesionales de los medios de comunicación, a los responsables de las decisiones y al gran público. Estructurado en una serie de varios artículos, este número especial ofrece una visión general de los conocimientos actuales sobre la situación del tabaco en el África francófona y las respuestas que pretenden poner freno a esta epidemia creciente. Los artículos presentan los datos actuales de la prevalencia del tabaquismo, la evaluación del impacto sanitario y económico del tabaco en la región, los nuevos mercados y las previsiones de expansión de la industria tabacalera y sus estrategias para oponerse a las medidas de salud pública. Los temas más propios de la región, como el contrabando, la pobreza y la publicidad se han cubierto mediante artículos breves encargados a periodistas africanos de habla francesa por Syfia International, una agencia de prensa francófona, socia del proyecto, que aporta eficazmente su punto de vista sobre el rol y el oficio del periodista. Por último, un análisis de las iniciativas actuales y de los avances en los ámbitos de la promoción de la salud y del control del tabaco ilustra cómo el África francófona se organiza a escala local e internacional para responder mejor y hacer frente a esta epidemia en expansión. Los múltiples testimonios que recoge este número traducen bien la estrategia de la industria que apunta a África como su máximo potencial de desarrollo con una previsión del crecimiento del consumo que se cifra en un 16% durante los próximos diez años, según el Atlas del Tabaco de la OMS (Mackay & Eriksen, 2002). No obstante, como concluye Corné van Walbeek en su artículo, la lucha contra el tabaco puede ser ganada, y el ingrediente número uno para ello es una firme voluntad política combinada con un partenariado a todos los niveles, internacional, nacional y local, y con la aplicación de medidas que hayan demostrado su eficacia. La elaboración, la firma y la ratificación del Convenio Marco representan en este momento un primer resultado y una enorme esperanza para todos los que luchan desde hace décadas. Referencia Mackay, J. & Eriksen (2002) M., The Tobacco Atlas. World Health Organization, Geneva. El Convenio Marco para el Control del Tabaco entra en Vigor El 27 de febrero de 2005, el Convenio Marco para el Control del Tabaco (CMCT), el tratado internacional del tabaco, auspiciado por la Organización Mundial de la Salud (OMS), se convirtió en una Ley Internacional. La Unión internacional de Promoción de la Salud y Educación para la Salud, UIPES, aplaude a los 55 países que lo han ratificado, por dar un gran paso adelante en la lucha mundial a favor de la salud pública contra el tabaco. El CMCT proporciona las herramientas básicas que los países necesitan para desarrollar una legislación sobre el control del tabaco cuyo objetivo es disminuir las muertes y enfermedades que causa la epidemia del tabaquismo. El convenio fue adoptado por la 56ª Asamblea de la OMS en Mayo de 2003. La acción del CMCT finalizo el 29 de junio de 2004 con la firma de168 países, incluyendo la Comunidad Europea. Los primeros 40 países comprometidos contractualmente al CMCT fueron: Armenia, Australia, Bangladesh, Bhután, Brunei Darussalam, Canadá, Islas Cook, Fiji, Francia, Ghana, Hungría, Islandia, India, Japón, Jordania, Kenya, Madagascar, Maldivas, Malta, Mauricio, México, Mongolia, Myanmar, Nauru, Nueva Zelanda, Noruega, Pakistán, Palau, Panamá, Qatar, San Marino, Seychelles, Singapur, Slovakia, Islas Salomón, Sri Lanka, Republica Arabe de Siria, Tailandia, Trinidad y Tobago y Uruguay. Desde el 30 de noviembre de 2004, los siguientes países también han depositado su ratificación o una acción semejante: Alemania, Botswana, Dinamarca, España, Finlandia, Honduras, Latvia, Lesotho, Lituania, Islas Marshall, Países Bajos, Perú, Reino Unido, Senegal, Timor-Leste, Turquía y Vietnam. La entrada en vigor del CMCT marca un momento histórico para la salud pública. Este convenio pionero proporciona a los países las herramientas básicas para proteger la salud de sus ciudadanos contra la engañosa publicidad de la industria tabacalera. Requiere que las naciones que han ratificado adopten políticas efectivas que disminuyan el consumo del tabaco y salven vidas, por ejemplo: una prohibición total de toda la forma de publicidad, patrocinio y promoción del tabaco; poner grandes advertencias sanitarias en el empaquetado y etiquetado de los paquetes de cigarrillos y otras medidas de protección de la salud pública. El tratado también provee a las naciones una guía para decretar sólidas políticas, basadas en pruebas científicas, para proteger a la salud pública que incluyen la protección contra la exposición al humo del tabaco, aumento de los impuestos de los productos del tabaco y medidas para combatir el contrabando de cigarrillos. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 La Organización Mundial de la Salud estima que en todo el mundo aproximadamente cinco millones de personas mueren cada año debido al uso del tabaco. Si la tendencia continúa, se proyecta que para el 2030, serán 10 millones por año y el 70% de estas muertes ocurrirán en los países en vía de desarrollo. Al mismo tiempo que el CMCT contiene las medidas básicas necesarias para enfrentar el problema del tabaco, también alienta explícitamente a los países a que apliquen medidas que vayan más allá de las estipuladas. Una acción fuerte por parte de los países les dará la oportunidad de reducir el enorme costo en salud de los cuidados, así como el costo intangible de dolor y sufrimiento humano. Felicitamos a los países que han ratificado el CMCT, demostrando un compromiso hacia la salud pública. También invitamos a los países que todavía no han ratificado el Convenio que se unan a los otros y que inmediatamente ratifique e implemente el CMCT. La ratificación e implementación del Convenio son vitales en la protección de todas las poblaciones contra el impacto de las devastadoras consecuencias del tabaco en la salud y la economía. Para más información: www.fctc.org 65 C. Audera-López, p 7. Consecuencias de la epidemia del tabaco en la salud de los países francófonos del África Occidental y estado actual del control del tabaco La carga de enfermedades derivadas del consumo del tabaco que deberá soportar cada país dependerá de la prevalencia de dicho consumo y de la duración de la epidemia. Puesto que la epidemia del tabaco es relativamente reciente en los países del África francófona, actualmente la carga de enfermedad provocada por el consumo del tabaco es todavía escasa. No obstante, está aumentando a medida que se incrementa el número de fumadores y a medida que los fumadores llevan más tiempo fumando. Si se mantienen las tendencias actuales, los países del África francófona padecerán las consecuencias masivas del consumo del tabaco dentro de veinte o treinta años. Aparte de las consecuencias clásicas del consumo del tabaco, como son determinados tipos de cáncer y enfermedades cardiovasculares, existen unas circunstancias de especial importancia en los países africanos de ingresos bajos, como son un aumento del riesgo de la infección por tuberculosis y de la mortalidad entre las personas fumadoras, bajo peso al nacer de los hijos de madres fumadores y la relación directa de consumo de tabaco con desnutrición, especialmente en la población femenina. Es más, los países en vías de desarrollo, que carecen de recursos y deben afrontar otros problemas de salud muy importantes, no pueden permitirse los costes de las enfermedades degenerativas causadas por el consumo de tabaco, puesto que los tratamientos son sumamente caros. gobiernos frente al tabaco es el miedo a generar desempleo y a la pérdida de los ingresos procedentes de los impuestos sobre el tabaco Este temor se deriva principalmente de los argumentos utilizados por la industria tabacalera. Aparte de presionar a los gobiernos, la industria tabacalera utiliza todo tipo de estrategias para comercializar sus productos en estos países y prácticamente no encuentra a su paso barrera alguna para hacer negocio en ellos. Es imprescindible que los países del África francófona tomen medidas inmediatas y elaboren programas integrales y multisectoriales para el control del tabaco y los apliquen. Estos programas deberán integrarse en los programas de salud pública ya existentes y utilizar la infraestructura y los recursos actuales para detener la expansión de la epidemia del tabaco. En Febrero de 2005, entró en vigor el Convenio Marco para el Control del Tabaco de la OMS (WHO FCTC en sus siglas en inglés). La mayoría de los países del África francófona han firmado el tratado manifestando así su voluntad de convertirse en Miembros en un futuro. La OMS urge a dichos países a hacerlo a la mayor brevedad posible y a aplicar las disposiciones del Convenio Marco de la OMS para poder controlar la epidemia del tabaco. A su vez, la OMS facilitará directrices y asistencia en el proceso de convertirse en Miembros del tratado y de aplicar las medidas de control del tabaco que en él se contemplan. I. Saouna, p. 22 Países pobres, el nuevo Eldorado del tabaquismo En Níger, un paquete de cigarrillos equivale al coste de la alimentación de un día. En Bangladesh, 10 millones de personas superarían la desnutrición si el dinero que gastan en tabaco lo invirtieran en alimentación. El tabaco empobrece a países y familias. Los fabricantes de tabaco cuya expansión ha sido frenada en los países ricos se lanzan actualmente al asalto de los países en vías de desarrollo. Es urgente actuar para atajar lo antes posible las catástrofes sanitarias y sociales asociadas al consumo del tabaco y que ya han sido anunciadas. El control del tabaco en los países del África francófona sigue siendo muy limitado. Con frecuencia, los recursos humanos y económicos son escasos en estos países y se dedican a otros problemas de salud, puesto que normalmente el tabaco no se halla entre las prioridades de la salud pública. La legislación en los países del África francófona es reducida y no se aplica debidamente. Una de las razones de más peso que explica la pasividad de los 66 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Resúmenes J. de Beyer, p. 12 Las repercusiones económicas del consumo del tabaco en África Se habla a menudo de los beneficios económicos que generan el cultivo del tabaco y la venta de sus productos: trabajo e ingresos para agricultores y empleados, ingresos fiscales para los gobiernos y enormes ganancias para las empresas tabacaleras, y, en el caso de algunos países, divisas derivadas de las exportaciones netas y de la inversión extranjera. Todo ello es, sin duda, importante. Sin embargo, en contraste con estas ganancias económicas, existen también enormes pérdidas que resultan menos visibles y de las que se habla menos, pero que también hay que tener en cuenta. Muchas de estas pérdidas económicas derivan de los efectos adversos del consumo del tabaco sobre la salud, pero existen otras que afectan a un grupo mucho más amplio de ciudadanos y que, concretamente, pueden exacerbar la pobreza de las personas fumadoras y de sus familias. El artículo contempla las repercusiones económicas del consumo del tabaco en las familias y a nivel nacional, en los países en vías de desarrollo, y aporta un marco para reflexionar sobre las situaciones concretas de los países del África francófona. En contraste con los beneficios económicos del tabaco, se producen costes económicos importantes. Los fumadores generan costes sanitarios anuales más elevados cuyo peso recae en las familias, en el erario público y en las empresas/compañías aseguradoras. Las pérdidas de beneficios y de productividad por causa de las enfermedades relacionadas con el tabaco y las muertes prematuras pueden ser inmensas, y las sufren tanto empleadores como empleados. La enfermedad es una de las principales causas que precipita la pobreza. Miles de incendios y de pérdidas de vidas son provocados por un simple cigarrillo encendido. Los daños medioambientales que sufre el terreno de cultivo del tabaco, por los pesticidas y fertilizantes, y la deforestación derivada de la utilización de leña para curar el tabaco, pueden provocar elevadas pérdidas económicas. Y están también los costes de los perjuicios que ocasiona al bienestar de las familias pobres cuyos escasos recursos se gastan en cigarrillos y otros productos derivados del tabaco en lugar de invertirlos en alimentos u otras necesidades. En resumen, concluimos que la reducción del consumo del tabaco beneficia a la salud, a la economía y al desarrollo. S. Ratte y K. Slama, p. 17 El estado de la investigación en el África francófona Teniendo en cuenta la mortalidad y la morbilidad directamente relacionadas con el consumo del tabaco en todo el mundo, la financiación de una investigación para el control de dicho consumo es totalmente insuficiente a nivel mundial. Si lo comparamos con la lucha contra otras enfermedades, el control del consumo del tabaco sigue estando financiado muy por debajo de las necesidades reales. Los datos necesarios para realizar un seguimiento de la epidemia del tabaco son inadecuados incluso en los países ricos. Por ello, no es de extrañar que los estudios realizados para averiguar la situación de los datos en los países en vías de de desarrollo y, especialmente en el África francófona, concluyan que no existen datos estandarizados y comparables en todos los campos relacionados con el control del tabaco. Con frecuencia, los datos disponibles son anticuados, incompletos y poco representativos. Ello podría explicarse tanto por la falta de capacidades adecuadas para llevar a cabo la labor de investigación como por la escasa prioridad que se otorga al control del tabaco en tanto que problema de salud. En los países pobres y en las regiones en donde existen otras enfermedades más acuciantes, como la malaria y el SIDA, la industria tabacalera no tiene ningún escrúpulo en utilizar argumentos infundados sobre su contribución a la economía del país. De esta forma, las autoridades se ven intimidadas por la amenaza de pérdidas económicas o encandiladas por la promesa de ingresos económicos inmediatos. Con demasiada frecuencia esto debilita la voluntad política de intervenir en el control del tabaco. No obstante, los pocos datos disponibles en la región son alarmantes. En los últimos años se ha incrementado rápidamente el consumo del tabaco. La expansión que proyecta la industria tabacalera en esta región confirma esta tendencia. En consecuencia, los programas de investigación de los países del África francófona tendrán que tener IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 en cuenta la urgencia de la situación, el contexto de esta región y lo limitado de los recursos disponibles. Recientemente, los programas de investigación de alcance mundial como el “Estudio Mundial sobre Tabaco y Jóvenes” han empezado a ayudar a los países de ingreso bajo a satisfacer la necesidad de contar con datos estandarizados y comparables. Organismos internacionales, nacionales y toda la comunidad de ONGs han discutido el tema de una agenda de investigación adecuada para el control del tabaco en los países de ingreso bajo, con motivo de la elaboración del Convenio Marco sobre el Control del Tabaco (CMTC). Teniendo en cuenta que los factores más importantes para conseguir cambios en el consumo del tabaco por parte de la población incluyen modificar su aceptabilidad social y ofrecer un marco legal para controlar el tabaco, las recomendaciones formuladas para la realización de una investigación adecuada en los países de 67 ingreso bajo han subrayado la necesidad de definir programas de investigación capaces de prestar apoyo a las acciones que tengan el mayor impacto posible en la población, que sirvan para acelerar la ratificación del FCTC, que aceleren la aprobación de medidas de bajo coste basadas en la evidencia, como por ejemplo, aumento de impuestos, que materialicen la prohibición de publicidad y la legislación contra el tabaco y que pongan freno a la ofensiva de la industria tabacalera en estos países. Se han iniciado importantes iniciativas internacionales para apoyar la investigación sobre el control del tabaco en los países de ingreso bajo y particularmente en el África francófona. No obstante, debido a las barreras idiomáticas, puede que los países del África francófona no tengan el mismo acceso a estas iniciativas que sus contrapartes de habla inglesa. Por lo tanto, habrá que prestar especial atención a fortalecer las iniciativas recientes en este campo que tengan en cuenta la importante dimensión del idioma para los países del África francófona. C. Van Walbeek, p. 25 El control del tabaco en Sudáfrica La finalidad de este artículo es describir brevemente la experiencia llevada a cabo en Sudáfrica en materia de control del tabaco y subrayar algunas de las lecciones que serían aplicables a otros países en vías de desarrollo. La estrategia de control del tabaco en Sudáfrica se basa en dos pilares principales: (1) aumento rápido de los impuestos sobre el tabaco y (2) una legislación integral, uno de cuyos rasgos más importantes es la prohibición de cualquier tipo de publicidad y de patrocinio del tabaco y la prohibición de fumar en los lugares públicos y de trabajo. Como resultado del aumento de los impuestos, el precio real de los cigarrillos (ajustado a la inflación) ha aumentado en un 115% entre 1993 y 2003. El consumo total de cigarrillos ha disminuido alrededor de un tercio y el consumo per capita ha disminuido un 40% desde 1993. A pesar de la disminución del consumo de cigarrillos, los ingresos del gobierno derivados de los impuestos sobre el tabaco han aumentado casi 150% entre 1993 y 2003. Podemos aprender varias lecciones importantes de la experiencia de Sudáfrica en materia de control del tabaco. En primer lugar, se necesitó 68 ejercer una presión fuerte y permanente para convencer al gobierno de que llevase a cabo una estrategia eficaz de control del tabaco. Para avalar las reclamaciones de los que ejercieron este lobbying y darles credibilidad se utilizaron estudios realizados en diferentes países, que abarcaban diferentes disciplinas. En segundo lugar, los aumentos rápidos de los impuestos sobre los cigarrillos son especialmente eficaces para reducir el consumo del tabaco. El aumento de los impuestos incrementa el precio de los cigarrillos lo que a su vez reduce su consumo. En Sudáfrica, un aumento del 10% del precio real de los cigarrillos reduce el consumo entre un 6% y 8%. En muchos otros países en vías de desarrollo se han obtenido resultados similares. En tercer lugar, si bien se considera por lo general que un aumento de los impuestos es la medida de control del tabaco más eficaz, la legislación desempeña también un papel importante dentro de una estrategia integral de control del tabaco. La prohibición de publicidad y de fumar en los lugares públicos y en los puestos de trabajo le quita carta de naturaleza al hecho de fumar y le despoja también de su atractivo social, y probablemente potenciarán la eficacia de otras iniciativas de control del tabaco. En cuarto lugar, la industria tabacalera normalmente pretende participar de forma constructiva en la redacción «razonable y sensata» de la legislación de control del tabaco. La experiencia de Sudáfrica muestra que cuando las empresas tabacaleras entraron en el proceso de redacción del borrador de la ley en 1993, su papel consistió en retrasar y diluir la legislación. En 1998, durante la redacción de una enmienda a la legislación original, se hizo caso omiso de sus opiniones y el resultado fue una ley mucho más integral y eficaz. En quinto lugar, la legislación de control del tabaco, especialmente las leyes que prohíben fumar en el interior de los locales públicos, es fácil de aplicar. No necesita la mano dura de una intervención policial, como suelen argumentar las tabacaleras. Lo que hace la legislación es dejar claro que el derecho de las personas a respirar aire limpio es superior al derecho de los fumadores a fumar. Como norma, los fumadores evitan fumar en los lugares donde no está permitido. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Resúmenes Tácticas de la industria del tabaco Este texto es un resumen de los artículos escritos por N. Collishaw, F. Damphousse, L. Gauvin y F. Thompson (p. 28-33). A finales de los años 90, gracias a las acciones legales emprendidas contra las tabacaleras de todo el mundo se desvelaron millones de páginas de los documentos internos de dichas industrias. En ellas se revelaban las estrategias y tácticas de la industria tabacalera para captar fumadores, jóvenes o no, para negar las consecuencias de fumar, para retrasar las medidas de salud pública y la legislación al respecto o anularlas, y se destapaban actividades delictivas como el fraude científico, la participación en el contrabando organizado, el montaje de organizaciones pantalla, la corrupción. Cuatro experiencias canadienses sirven para exponer ejemplos de la conducta punible de la industria tabacalera. Son tácticas utilizadas en todo el mundo por los fabricantes de cigarrillos y tienen cada vez más peso en el contexto del África francófona. “Contrabando de cigarrillos: un fenómeno de gran alcance al único servicio de los intereses de los grandes fabricantes”. Utilizando citas y documentos de los directivos de las tabacaleras, el artículo demuestra la implicación de los fabricantes de cigarrillos en la organización del contrabando y el doble uso que hacen del mismo: por un lado, para inundar los mercados con cigarrillos baratos y derrotar los esfuerzos de los gobiernos de reducir el consumo del tabaco mediante una de las medidas de salud pública más eficaces (es decir, impuestos elevados sobre los productos del tabaco) y, por otro lado, utilizando la amenaza falsa del aumento del contrabando para asustar a los políticos y evitar que aprueben políticas fiscales duras. El Convenio Marco para el Control del Tabaco (CMCT) con un protocolo sobre el contrabando y la colaboración entre los organismos internacionales es la única vía interpuesta para contrarrestar y vencer los intentos de la industria tabacalera de sabotear las medidas de salud pública. “La conquista de las zonas sin humo frente a las tácticas de las tabacaleras: información científica engañosa y grupos pantalla. La experiencia canadiense” destaca que la industria tabacalera descubrió, ya en 1978, que el problema de los fumadores pasivos era la cuestión que más amenazaba su viabilidad económica de futuro. De ahí surgió una estrategia muy sofisticada por la que los fabricantes de cigarrillos contrataron a consultorías de comunicación y a empresas de relaciones públicas para que generasen una falsa oposición a la prohibición de fumar empleando grupos pantalla completamente financiados y orquestados por la industria tabacalera. Esto explica por qué la prohibición de fumar, una medida aparentemente fácil de adoptar, fue tan difícil de aprobar y aplicar, a pesar del conocimiento general de los beneficios que conlleva para la salud y para la economía, y de contar con el favor de la opinión pública. Desvelar estas estrategias ha servido para que la industria tabacalera haya perdido terreno en esta cuestión, si bien queda mucho por hacer para proteger a los fumadores pasivos, pero se avanza lentamente en Canadá. “Estrategias de la industria tabacalera: comercializar cigarrillos para los jóvenes”, explica que los fabricantes de cigarrillos se han visto obligados a reconocer que un objetivo de sus estrategias de marketing eran los jóvenes a los que captan como futuros fumadores. Así lo dicen documentos internos y derivados de los litigios emprendidos contra ellos, a pesar de que IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 lo habían estado negando públicamente durante años. Dado que la mayoría de los fumadores empieza y se engancha al tabaco en edad temprana y que el vínculo entre publicidad, promoción e iniciación al consumo está bien demostrado, los países deberían adoptar una prohibición total de publicidad y promoción del tabaco. El CMCT es la mejor vía para lograr una prohibición mundial. “El fraude más grande del siglo: cigarrillos ‘light’ explica uno de los fraudes más grandes que han realizado las empresas a los consumidores. Aprovechándose del deseo de los fumadores de encontrar cigarrillos que no les perjudicasen tanto, los fabricantes de cigarrillos engañaron y confundieron a millones de personas haciéndoles creer que existía un producto de estas características y los animaron a pasarse a los cigarrillos «light», cuando sabían perfectamente que estos productos no eran en modo alguno menos nocivos que los otros. Los fabricantes de cigarrillos engañaron también a las autoridades omitiendo una información esencial porque los fumadores no funcionan como las máquinas de medición y probablemente compensen recurriendo a los cigarrillos de acuerdo con sus necesidades de aporte de nicotina. Así, las máquinas utilizadas para medir el contenido de alquitrán y de nicotina nunca podrán reflejar la realidad, y eso despoja completamente de sentido a la información impresa en los paquetes de cigarrillos. Muy pocos países han prohibido el uso de adjetivos engañosos como «light». Es de esperar que el CMCT que contiene una disposición sobre el empleo de adjetivos calificativos, evitará que se repita el fraude en el resto del mundo y especialmente en los países de África. 69 África: El cigarrillo ¿un producto con futuro? El cigarrillo no matará a la señorita C. Ella no sólo no fuma, sino que el cigarrillo le ayuda a vivir. Esta bonita guineana ha sido contratada para convencer a los jóvenes que «fumar es lo que se lleva». No dice su nombre para no perder su trabajo, pero repite a ultranza su discurso: «El que no fuma no está en el rollo. Queda relegado a segundo plano. No fumar significa estar desfasado, pasado de moda». Y continua, sin la menor vacilación: «Fumar es un acto cívico civilizado, de enorme alcance social, propio del hombre que va a la última, moderno y a la moda.» «Nunca nos quedamos sin ideas ni argumentos para incitar a los jóvenes a fumar y sobre todo a casarse con nuestra marca, nos explica, pues la competencia en ámbito del tabaco es despiadada. El mercado revierte en el que más promoción hace. El arte de convencer es una baza importante: no vacilamos en encenderle el cigarrillo al joven cuando es necesario». tabaco me permite alimentar a mi familia, ahorrar y sobre todo entablar relaciones provechosas.» Su suerte es envidiable en un país en el que el 40% de la población vive por debajo del umbral de la pobreza. Pero en países tan pobres como éste, si la salud pública importa, el mantenimiento de todos estos pequeños empleos informales del tabaco es un reo social igualmente importante. Ello explica en parte las reticencias de los poderes públicos a regular la venta de los cigarrillos y su publicidad. Guinea no es el único país africano en el que los cigarrillos gozan de todos los derechos. Bénin, por ejemplo, que ocupa el puesto 158, de los 173 censados, en la clasificación del Informe Mundial sobre desarrollo humano 2002, firmó el 18 de Junio de 2004 el primer tratado internacional de salud pública, el Convenio marco de lucha contra el tabaco, lo que muestra cierta voluntad política. Pero desde el punto de vista económico, el Estado afirma no poder prescindir ni de los empleos del sector ni de los impuestos que éste genera. Así que los distribuidores de cigarrillos disfrutan de la libertad más absoluta. En Bénin se le da vuelta fácilmente a la ley: sólo existe un decreto ministerial aprobado en Octubre 1991. Prohíbe fumar en los hospitales y servicios sanitarios. En cuanto a la fabricación y a la comercialización de cigarrillos, «las empresas gozan de libertad absoluta desde finales de los años 80», resume un agente de la Dirección de comercio interior. Encendedoras de cigarrillos La salud de la economía ante todo En Conakry, estas encendedoras de cigarrillos están por todas partes. No hay ni un solo lugar público que se libre de ellas. Están en los mercados, en las discotecas, en los estadios. Llegan a regalar paquetes enteros para dar a conocer nuevas marcas. El reclutamiento de estas azafatas no obedece a otro criterio que el de las dos «b»: belleza y boquilla. Al menos una docena de marcas conocidas se reparten el mercado guineano. Algunas emplean a unas cincuenta personas. «En este trabajo, prosigue la representante, atravesamos el país en 4x4 con unas dietas de 5000Fcfa (7,6 Euro) diarios y un salario mensual de 75.000 Fcfa (115 Euro). La promoción del Al parecer, el estado de Bénin tiene mucho que ganar gracias a esta ausencia de medidas restrictivas sobre el comercio del tabaco. A principios de los años 90, el grupo británico Rothmans (absorbido en 1999 por el americano BAT British American Tobacco) compró Manucia, la empresa pública de fabricación de cigarrillos. De 2000 a 2002 casi se ha duplicado la cantidad percibida por Bénin en concepto de derechos aduaneros sobre las importaciones de tabaco y cigarrillos, pasando de 610 millones de Fcfa a más de 1.100 millones. Este texto es un resumen de los seis artículos escritos por los periodistas del África fracónofona y presentados para este número a través de Syfia International (p. 34-38). Para la industria del tabaco, el mejor medio de vender sus productos es garantizar su promoción y evitar legislaciones restrictivas. África reúne estas condiciones que hacen de este continente un mercado de futuro, despreocupado de la salud de los consumidores. 70 Además de los ingresos propios que percibe directamente, el Estado no muestra ninguna inclinación a poner freno al patrocinio de acontecimientos culturales (especialmente de conciertos de música) por parte de las tabacaleras. “La ocupación de los espacios públicos es de pago. Nosotros la autorizamos a cambio del pago de una cantidad establecida en 25.000 Fcfa y el pago de unos derechos diarios de 1.000 Fcfa”, revela un empleado del servicio comercial del ayuntamiento de Cotonou. El ayuntamiento percibe igualmente cánones anuales que satisfacen las sociedades de comunicación, propietarias de las vallas publicitarias que alaban a diario los productos de las tabacaleras. Son cantidades irrisorias en comparación con los estropicios que provocan en la salud. Más rápidamente que Bénin, la República Democrática de Congo ha puesto en marcha desde 2002 una legislación para reducir la incitación al consumo de tabaco. Desde entonces se prohíbe la publicidad en los medios de comunicación y en banderolas y vallas publicitarias de la red viaria. En los paquetes y cartones de cigarrillos figura la advertencia sanitaria “Fumar es perjudicial para la salud”, así como el contenido en alquitrán y en nicotina. Sin embargo, estas indicaciones tienen muchas posibilidades de pasar totalmente desapercibidas en la mayor parte de los países africanos puesto que la mayoría de fumadores compran los cigarrillos por unidades y raras veces ven el color de un paquete de cigarrillos. Así pues, nada de publicidad, pero numerosos artículos en la prensa, puesto que determinadas empresas tabacaleras enarbolan la apología de la lucha antitabaco. En Kinshasa, por ejemplo, Tabacongo ha llevado a cabo de esta guisa las campañas de «prevención del tabaquismo entre los mineros» con fuerzas renovadas en los medios de comunicación. Según el director general de Tabacongo, es la amplitud del fenómeno del tabaquismo infantil lo que ha conducido a la empresa «a investigar junto con otros componentes de la sociedad, verdaderas soluciones, soluciones justas a este problema de la sociedad». Una contrapropaganda sorprendente capaz de privar a los vendedores de cigarrillos de sus futuros clientes. No, más bien una estrategia comercial innovadora para que hablen de ellos. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Resúmenes Hacer sin hacer fumar Conscientes de la ambigüedad entre salud pública y salud económica, algunas comunidades intentan prescindir del apoyo envenenado que les ofrecen las empresas tabacaleras. En Costa de Marfil, la comunidad de Koumassi, por ejemplo, organiza cada viernes, desde hace dos años, la emisión de un espectáculo gratuito que atrae a miles de jóvenes. Artistas de prestigio internacional como Aïcha Koné o Gadji Celi han participado ya en esta emisión transmitida por Radio N’Gowa. Está financiada por colaboradores muy diversos: empresas de decoración, fabricantes de cosméticos, casas de discos, de distribución de casettes y de CD. Por principio -explica M. Wayoro Guy-Chrles, director del servicio sociocultural de Koumassi-, el alcalde y su equipo, desde su toma de posesión en 2000, exigen que las empresas de tabaco y de bebidas alcohólicas no se asocien a estas manifestaciones. “Hemos comprendido que el cigarrillo hace más mal que bien y queremos organizar actividades sanas para la población rural”, sostiene también Kofi William, miembro de una asociación que organiza un torneo de fútbol muy popular en Ebilassokro, al este de Costa de Marfil. La misma política han adoptado los responsables del Palacio de la cultura de Abidján donde está prohibido cualquier cartel o actividad en el que colaboren empresas de tabaco o alcohol. Fumar mata Aunque todavía muy aisladas, las reacciones de estos organizadores de actos evidencian la toma de conciencia de los peligros del cigarrillo y sobre todo de la contradicción intrínseca de financiar las distracciones de los jóvenes por empresas cuya producción perjudica gravemente a la salud de los mismos. En regiones todavía más pobres en las que no existe mercado para el cigarrillo, el problema no se plantea: ¡sin mercado no hay patrocinadores! Desafortunadamente, en los lugares donde el cigarrillo no tiene salida, se abre paso el tabaco de mascar. En Madagascar, por ejemplo una tesis de medicina de 1995 afirma que casi uno de cada tres malgaches (31% de la población) masca tabaco industrial. Y eso que el 75% de la población vive por debajo del umbral de la pobreza. Mascar tabaco es pues un lujo, aunque el tabaco de mascar sea 20 veces menos caro que los cigarrillos. Un lujo caro en esperanza de vida, como comprobamos al leer el sitio web de la Sociedad canadiense de lucha contra el cáncer, que igual que el cigarrillo es a los pulmones “diversos estudios en todo el mundo han establecido un vínculo concluyente entre el tabaco de mascar y el cáncer de la cavidad bucal”. La empresas tabacaleras, por su parte, se comportan. British American Tobacco, al día siguiente del Día Mundial sin Tabaco 2004, inauguraba en Bénin una ampliación de sus instalaciones que le permitirá alcanzar una producción de 4.000 millones de cigarrillos L. Huber, F. Thompson y S. Ratte, p. 40 El Convenio Marco para el Control del Tabaco: ¿esperanza para África? Los países del África francófona tienen mucho que ganar del primer tratado internacional de salud pública, el Convenio Marco para el Control del Tabaco (CMCT) aprobado en Mayo de 2003 por 168 países miembros de la Asamblea mundial de la Salud. En el transcurso de las negociaciones, África mostró un frente unido y fuerte. Existen enormes dificultades para incluir el control del tabaco en el orden del día de esta región del mundo. Sólo una fuerte movilización de la sociedad civil puede asumir este reto. Algunas ONGs como la Alianza para el Convenio Marco ayudan y deben continuar apoyando la acción de algunos actores todavía aislados y favorecer el acceso a los datos y a la información disponible únicamente en inglés para que la barrera lingüística deje de ser un freno a la protección de la salud de los ciudadanos de los países del África francófona. D. Houéto y C. Kassa, p. 43 Hacia una nueva estrategia de lucha contra el tabaquismo en África La lucha contra el tabaquismo es, hoy en día, una cuestión vital puesto que la epidemia se extiende con graves consecuencias y porque los perjudicados no son sólo los fumadores. El mundo entero ha tomado conciencia del mal que representa el tabaco y se han llevado a cabo diversas iniciativas entre ellas, la de la Unión Internacional de Promoción de la Salud y de Educación para la Salud (UIPES), apoyada por diferentes socios. Esta iniciativa cuyo punto de mira está principalmente en África ha permitido que los profesionales de salud de Bénin se organicen en torno al éxito del primer seminario internacional francófono sobre IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 el aumento del consumo del tabaco, a fin de construir partiendo de los cimientos creados en Ouidah (Bénin) en Noviembre de 2002. Cuentan con las conquistas mundiales en el terreno de la lucha contra el tabaquismo y, más concretamente, con la voluntad política de sus autoridades gubernamentales. 71 www.syfia.info Syfia International – Africa día a día De la agencia de prensa a la agencia-escuela... • Syfia International es una agencia de prensa independiente que agrupa a 10 agencias (6 africanas y 4 de Europa y Canadá). Su fuerza reside en un equipo de 60 periodistas que cubren 35 países del África francófona, de Asia y de Europa. • Desde hace más de 15 años, Syfia es a la vez una agencia de prensa reconocida por numerosos medios de comunicación francófonos y una agencia-escuela apreciada por los periodistas de África. • En 2004, Syfia creó Syfia Grands Lacs, una agencia regional centrada en la República Democrática de Congo, Ruanda y Burundi. Syfia International: la agencia de prensa Otra mirada sobre los países de África • El rasgo distintivo de Syfia es la prioridad que se otorga al terreno y a los testimonios vivos. La mayor parte de los artículos son redactados por los corresponsales africanos. Una amplia difusión en la prensa francófona • Syfia produce de 5 a 8 reportajes por semana, es decir, más de 33 artículos al año. Los artículos se envían a 200 periódicos de la prensa francófona, principalmente de África. Cada artículo se publica en 8 o 10 periódicos como media. www.syfia.info: 4000 artículos y 1000 fotografías • El sitio web de Syfia, www.syfia.info, permite acceder a más de 4.000 artículos en su texto integral, es decir, a 15 años de producción de la agencia y a 1000 fotografías. Un potente navegador facilita la búsqueda de los mismos. Syfia Grands Lacs: informar para reconciliar • Inaugurada en Abril de 2004, Syfia Grands Lacs se esfuerza por dar a conocer las realidades y las poblaciones de las diversas regiones para luchar contra la estigmatización y los rumores. • La producción de artículos, su amplia difusión en los tres países de la región y la formación de los periodistas para reforzar sus competencias profesionales y deontológicas constituyen las tres actividades de la agencia. Syfia: la agencia-escuela • Para Syfia, la formación se realiza sobre el terreno; en consecuencia, es inseparable de la producción. Sus diversos programas privilegian los aprendizajes prácticos de larga duración. Formación permanente de los corresponsales • Syfia forma de manera permanente, por correo electrónico y teléfono, a los periodistas del equipo: 200 periodistas se han formado de esta manera. La tutoría • Desde hace tres años, las oficinas africanas de Syfia transmiten su experiencia a los jóvenes periodistas de las redacciones locales. FormAction: el sitio web de formación a distancia de Syfia • En 2004, Syfia creó una web de formación «tutelada a distancia» destinada a los periodistas africanos que pueden seguir módulos de formación pensados especialmente para ellos, con el seguimiento individualizado por parte de un tutor. Contact : SYFIA International 20, rue du Carré du Roi 34 000 Montpellier – Francia Tel.: 33 (0) 4 67 52 79 34 Fax: 33 (0) 4 67 52 70 31 Email: [email protected] - www.syfia.sinfo R. Ben Zid, p. 47 Túnez: proyecto piloto de reconversión de explotaciones agrícolas que cultivan tabaco en cultivos diversificados Los objetivos del proyecto que presentamos en este artículo eran reconvertir las explotaciones productoras de tabaco en cultivos no nocivos para la salud, permitiendo al mismo tiempo el desarrollo de la agricultura en un ecosistema forestal. Nos propusimos, pues, a título 72 experimental, remplazar el cultivo del tabaco en estas explotaciones por otros cultivos, especialmente cultivos de forraje, de árboles y de hortalizas. Los cultivos de forraje permiten disminuir la presión ejercida sobre los recursos forrajeros del bosque por los diferentes tipos de ganadería presentes en la zona. Por otro lado, esta política contribuye a aumentar los ingresos de las explotaciones beneficiarias del proyecto y pone en marcha una estructura comunitaria de gestión del mismo que con el tiempo podrá convertirse en Agrupación de Desarrollo Agrícola. IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Resúmenes M. H. Cherif, p. 45 Problemática del tabaco en el África francófona y perspectivas regionales del OTAF El problema del tabaco es mundial y es político. La epidemia y el aumento del tabaquismo en África es una amenaza para la salud en nuestro continente y tendrá repercusiones socioeconómicas importantes en los próximos años. Las importaciones fraudulentas de cigarrillos se llevan a cabo cada vez más en los países africanos, donde existe un contrabando bien estructurado. Los cigarrillos de contrabando son todavía más tóxicos con tasas de nicotina y de alquitrán muy elevadas. En el mundo hay alrededor de 1.100 millones de fumadores y en 2025 el número superará los 1.600 millones. De aquí a 2030, 10 millones de fallecimientos estarán relacionados con el consumo del tabaco, la mayor parte de ellos en los países en desarrollo. El padrinazgo y la publicidad directa e indirecta se desarrollan bajo todas sus formas, Proliferan los mensajes publicitarios agresivos cuyo punto de mira es la población africana sobre la que actúan con cinismo, manipulación, complicidad en el contrabando a plena luz y falta de respeto por las leyes, y explotan todos los temas para promover el consumo del tabaco entre las poblaciones diana (jóvenes, mujeres, los más pobres). La industria tabacalera recluta diariamente nuevos fumadores en África, para remplazar a los que mueren. Alrededor de 8 fumadores de cada 10 empezaron antes de los 18 años y éstos representan el futuro de la industria. La industria del tabaco aparece claramente en el núcleo del desarrollo de la pandemia del tabaquismo en el siglo XX. Los fabricantes de cigarrillos, en particular, han hecho del tabaco un producto de consumo masivo, y han ido abriendo progresivamente nuevos mercados: anteayer los hombres, ayer las mujeres y los jóvenes, hoy los países en desarrollo. La estrategia es idéntica: aumentar las ventas a costa de una pesada carga para la salud de las poblaciones. En el momento en el que la demanda disminuye en los países del Norte, las tabacaleras acuden a los países en desarrollo, y especialmente a África, para compensar sus pérdidas de mercado. La estrategia cínica de la industria apunta a África como su potencial más fuerte de desarrollo, previendo un crecimiento del consumo del 16% en los próximos diez años, según el reciente Atlas del tabaco en el mundo de la OMS. Era imprescindible poner en marcha un Observatorio del Tabaco en África francófona(OTAF) para resituar la problemática africana del tabaco, contribuir al desarrollo de la francofonía en África, dar a conocer en todo el mundo sus necesidades, sus iniciativas, sus acciones y luchar eficazmente contra el tabaco y las prácticas de la industria tabacalera. Un año después de la puesta en funcionamiento del OTAF en Bamako, gracias al esfuerzo de todos sus miembros y al apoyo de la Liga francesa contra el Cáncer y del UICC, en IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 Diciembre de 2002 ha quedado estructurado finalmente en Niamey el Observatorio del Tabaco del África francófona. El OTAF es el órgano independiente cuya misión es recopilar, elaborar y divulgar información sobre todos los aspectos del tabaco a fin de suscitar y apoyar acciones de salud pública. Se trata de un centro de referencia para el África francófona y de asesoramiento técnico para los poderes públicos sobre la temática del tabaco. Se cuenta con los trabajos del OTAF para informar a los poderes públicos sobre las medidas más eficaces para luchar contra el tabaco. Es responsabilidad del OTAF promover acciones de protección de la salud de los jóvenes y de los no-fumadores, informar sobre los perjuicios del tabaco y sobre las prácticas de la industria tabacalera. En él reside la esperanza de organizar una lucha contra el tabaco basada en datos sólidos y científicos y de calidad. El OTAF es el único órgano en el África francófona de vigilancia de la epidemia del tabaco y de las prácticas y maniobras, conocidamente deshonestas, de las industrias tabacaleras. El OTAF es hoy en día el único centro de referencia en materia de lucha contra el tabaco en el África francófona. Colabora en varios proyectos con la Liga contra el Cáncer, la UICC, la UIPES y otros. Este éxito ha sido coronado por un trofeo otorgado por la Organización Mundial de la Salud y por un diploma de reconocimiento firmado por la Directora general de dicha institución. 73 Preámbulo a la Declaración de Montreal La Declaración de Montreal se concibió como una carta para a lucha contra el tabaco en la que el conjunto de países francófonos podrían inspirarse para las actividades que realizasen con el fin de reducir el tabaquismo en el transcurso de los próximos años. Se presentó el último día de la 1ª Conferencia Internacional Francófona para el control del tabaco (18 Septiembre 2002) a los 400 participantes y a los medios de comunicación. El momento más impresionante y conmovedor fue sin duda la salva de aplausos tan intensos como inesperados que siguió a la lectura de la Declaración de Montreal por parte del doctor Marcel Boulanger, presidente del Comité científico internacional, responsable de la redacción de la declaración. Al final de la prolongada ovación, el doctor Boulanger, uno de los pioneros de la lucha antitabaco en Québec, todavía preso de la emoción, reveló a los asistentes que nunca habría llegado a imaginar, ni en sus sueños más descabellados, que podría ser testigo de un acontecimiento como aquel. Se sentía como el anciano Simeón, que exclamó tomando al niño Jesús en brazos: «Ahora, Señor, se ha cumplido tu promesa; puedes dejar morir en paz a tu servidor.» No obstante, concluyó con humor que si bien era el testimonio privilegiado de un momento único, no estaba todavía preparado para un destino tan...celestial. DECLARACIÓN DE MONTREAL POR EL CONTROL DEL TABACO 18 de septiembre de 2002 Nosotros, especialistas en el control del tabaco del mundo francófono reunidos en Montreal, hemos concluído que la lucha contra el tabaquismo pasa obligatoriamente por una solución política. La industria tabacalera está propagando la dependencia al tabaco a través del mundo, y constituye el vector de esta epidemia que mata a 4 millones de personas por año. Exigimos la puesta en práctica de una política global, que incluya en un marco riguroso a la industria tabacalera. El Estado tiene la responsabilidad de modificar los elementos del entorno social creados por la industria del tabaco, que hacen a nuestros conciudadanos vulnerables a la epidemia del tabaquismo. Los gobiernos deben poner en práctica urgentemente un plan eficaz de medidas, especialmente, reglamentarias y fiscales, apoyado por un financiamiento público, permitiendo así, controlar dicha epidemia y sus efectos. Antes de todo, es necesario: • Poner fin a cualquier forma de promoción directa e indirecta de ese producto mortal, incluyendo auspicios. • Hacer el tabaco menos accesible, aumentando los impuestos y controlando el contrabando. • Proteger a los no fumadores contra cualquier exposición al humo del tabaco. • Apoyar el alto al tabaquismo y poner a disposición las ayudas para tal actividad. • Informar al público del contenido y de los efectos de los productos del tabaco. El tabaquismo es la fuente del enriquecimiento de los fabricantes de cigarrillos, y la oposición de los mismos a estas medidas, se evidencia; y hace de ellos, los adversarios principales a combatir. La solidaridad de los países de la francofonía es muy importante sabiendo que los países en proceso de desarrollo, son los nuevos objetivos de las multinacionales tabacaleras. El Comité científico 1a Conferencia internacional francófona por el control del tabaco Montreal – Quebec - Canada Louis Gauvin Coordinador Coalición de Québec para el control del tabaco Email: [email protected] 74 IUHPE – PROMOTION & EDUCATION SUPPLEMENT 4 2005 International Union for Health Promotion and Education Union Internationale de Promotion de la Santé et d’Éducation pour la Santé Unión Internacional de Promoción de la Salud y Educación para la Salud Honorary President: Raoul Senault, France President: Maurice Mittelmark, Norway Past President: Spencer Hagard, United Kingdom Global Vice Presidents: Pierre Arwidson, France Marcia Hills, Canada Hans Krosse, The Netherlands David McQueen, United States Rob Moodie, Australia Michel O’Neill, Canada Alyson Taub, United States Marilyn Wise, Australia Regional Vice Presidents: John Kenneth Davies, United Kingdom (Europe) Marcia Faria Westphal, Brazil (Latin America) Brick Lancaster, United States (North America) Toshitaka Nakahara, Japan (Northern Part of the Western Pacific) K. Basappa, India (South-East Asia) Michael Sparks, Australia (Southwest Pacific) Regional Directors: Hiram Arroyo, Puerto Rico (Latin America) Claudia Coggin, United States (North America) Masaki Moriyama, Japan (Northern Part of the Western Pacific) N. R. Vaidyanathan, India (South-East Asia) Jan Ritchie, Australia (Southwest Pacific) Regional Offices: Europe c/o J. K. Davies Faculty of Health, Univ. of Brighton Falmer, Brighton BN1 9PH, U.K. E-mail: [email protected] South-East Asia Directorate of Health & Family Welfare Services Complex Anand Rao Circle, Bangalore 560009 E-mail: [email protected] The mission of the International Union for Health Promotion and Education (IUHPE) is to promote global health and contribute to the achievement of equity in health between and within countries of the world. The IUHPE fulfils its mission by building and operating an independent, global, professional network of people and institutions to encourage the free exchange of ideas, knowledge, know-how, experiences, and the development of relevant collaboration projects both at the global and regional levels. The work of the IUHPE includes: advocating for actions that promote health, improving and advancing the quality and effectiveness of practice, advancing knowledge, and developing capacity globally, regionally and locally to do health promotion and health education. The IUHPE comprises the following membership categories: Trustee Members (organisations of national scope which are responsible for organising and/or supporting health promotion and health education in their country, state, province, region, or equivalent level), Institutional Members (organisations of international, national, or local scope, one of whose main purposes is to undertake, or promote one or more aspects of health promotion and health education, and/or which focus on specific themes, target groups, or settings), Individual Members (individuals who support the mission, goals, and objectives of the IUHPE), and Honorary Members (an individual or organisation who makes a special contribution to the mission of the IUHPE, or to the development of its goals and objectives may be invited to be an Honorary Member). North America University of North Texas Health Science Center, School of Public Health 3500 Camp Bowie Blvd., Fort Worth, TX 76107-2699 United States E-mail: [email protected] Northern Part of the Western Pacific Fukuoka University School of Medicine Department of Public Health 7-45-1 Nanakuma, Jonanku, Fukuoka JAPAN 814-0180 Tel : +81-92-801-1011 x.3315 Fax: +81-92-863-8892 E-mail: [email protected] Latin America Universidad de Puerto Rico Recinto de Ciencias Médicas Facultad de Ciencias Biosociales y Escuela de Salud Pública Departamento de Ciencias Sociales PO Box 365067, San Juan, Puerto Rico 00936-5067 E-mail: [email protected] Southwest Pacific School of Public Health and Community Medicine The University of New South Wales Sydney, NSW 2052, Australia E-mail: [email protected] Africa This structure is currently being developed La mission de l’Union internationale de Promotion de la Santé et d’Éducation pour la Santé (UIPES) est de promouvoir la santé dans le monde, et de contribuer à la réduction des inégalités de santé, à l’intérieur des pays, et entre les pays. L’UIPES remplit sa mission en organisant et en animant un réseau mondial, professionnel et indépendant, de personnes et d’institutions, en vue de favoriser le partage des idées, des savoirs, des savoir-faire et des expériences, ainsi que le développement de projets coopératifs, au niveau mondial, ou entre les pays et les régions. L’activité de l’UIPES consiste à : plaider pour la mise en place d’actions de promotion de la santé, faire progresser la qualité et l’efficacité de la promotion de la santé et de l’éducation pour la santé à travers leur pratique et les connaissances acquises, et développer la capacité des pays à entreprendre des programmes de promotion de la santé et d’éducation pour la santé. L’UIPES se compose des catégories de membres suivantes : Membres Administrateurs (les organisations nationales qui ont la responsabilité d’organiser ou de renforcer la promotion de la santé et l’éducation pour la santé dans leur pays, état, province, région ou niveau équivalent), Membres Institutionnels (les organisations internationales, nationales ou locales dont l’un des buts principaux est de mettre en œuvre ou de promouvoir un ou plusieurs aspects de la promotion de la santé et de l’éducation pour la santé, et/ou qui concentrent leur activité sur des thèmes, des groupes cibles ou des lieux de vie spécifiques), Membres Individuels (les personnes qui soutiennent la mission, les buts et les objectifs de l’UIPES), et Membres d’Honneur (une personne ou une organisation contribuant d’une manière spéciale à la réalisation de la mission de l’UIPES peut être invitée à devenir Membre d’Honneur). Headquarters Staff Executive Director: Marie-Claude Lamarre [email protected] International Projects Manager: Catherine Jones [email protected] Office Manager: Janine Cadinu [email protected] Project Assistant: Martha Perry [email protected] IUHPE Headquarters 42, boulevard de la Libération 93203 Saint-Denis Cedex Tel: 33 (1) 48 13 71 20 Fax: 33 (1) 48 09 17 67 Website address: www.iuhpe.org La misión de la Unión Internacional de Promoción de la Salud y Educación para la Salud (UIPES) es promover la salud mundial y contribuir a la consecución de la igualdad entre los países del mundo y en el seno de los mismos en materia de salud. La UIPES lleva a cabo su misión creando y gestionando una red independiente, mundial y profesional de personas e instituciones que fomenta el libre intercambio de ideas, de conocimientos, de experiencias y el desarrollo de proyectos de colaboración relevantes tanto a nivel mundial como regional. La actividad de la UIPES consiste en : explicar publicamente las actuaciones que promueven la salud de las poblaciones en todo el mundo ; mejorar y aumentar la calidad y la eficacia de la práctica y de la teoría de la promoción de la salud y de la educación para la salud ; y contribuir al desarrollo de las capacidades de los países que emprenden actividades de promoción de la salud y de educación para la salud. Los miembros de la UIPES se dividen en las siguientes categorías : Miembros Administradores (aquellas organizaciones de índole nacional responsables de la organización o apoyo de la promoción de la salud y de la educación para la salud en su país, estado, provincia, región o nivel equivalente), Miembros Institucionales (aquellas organizaciones de índole internacional, nacional o local, entre cuyas finalidades esenciales se encuentre la provisión o promoción de uno o más de los aspectos de la promoción de la salud y la educación para la salud (centrados en temas y/o grupos de población o lugares de vida especifícos), Miembros Individuales (individuos que apoyan la misión, las metas y los objetivos de la UIPES), y Miembros de Honor (un individuo u organización que haga una aportación especial al cometido de la UIPES, o al desarrollo de sus fines y objetivos puede ser invitado a convertirse en un Miembro de Honor). IUHPE/UIPES – 42, boulevard de la Libération 93203 Saint-Denis Cedex – France. Tel: 33 (0)1 48 13 71 20 Fax: 33 (0)1 48 09 17 67 E-mail: [email protected] www.iuhpe.org